Publié il y a 5 ans - Mise à jour le 19.10.2019 - anthony-maurin - 3 min  - vu 610 fois

SAMEDI TOROS Qui a inventé la corrida ?

Le paseo de la corrida goyesque d'Arles en 2019 (Photo Anthony Maurin).

Toro du Victoriano del Rio Photo Anthony Maurin)

Qui a inventé la corrida ? Ah... Si seulement la réponse était aussi évidente qu'un seul nom, qu'une seule date, qu'un seul lieu originel ! On vous dira certainement qui a fait d'elle ce qu'elle est devenue au fil du XVIIIème siècle mais son origine propre, pure, là, il est plus ardu de s'avancer.

De l’aurochs préhistorique au toro de Miura, des premiers élevages formels à l'empire Domecq, l'histoire a fait son lit dans les draps de la tauromachie. L'Homme a, de tout temps, combattu la bravoure des cornus. Culte de Mithra, besoin d'évaluer l'intelligence humaine grandissante par rapport à la force bestiale renaissante, rites initiatiques ou de passages, animal totem affronter pour se viriliser... La lettre A de notre alphabet n'est autre qu'un berceau de cornes stylisé avec le temps.

Ces duels sont restés gravés sur les murs des grottes et peints au plus profond des émotions humaines. Saut humain entre les cornes à la manière des recortadores, passage au plus près des cornes avec esquive instantanée comme le font les écarteurs landais ou affrontement direct avec un leurre pour dévier la course du brave sont les symboles encore inscrits au plus profond de la terre.

Une codification qui date de la fin du XVIIIème

Cérémonie sacrificielle qui aura évolué avec les âges ou spectacle flamboyant qui s'est adapté à la société au fil des siècles et des changements de moralité, nul ne saurait répondre dans le mille et dire vraiment de quoi et par qui a été faite la corrida. Quoiqu'il en soit avant la fin du XVIIIème en Espagne avec Pepe Hillo (en autres), la corrida telle qu'on la connaît aujourd'hui avec ses codes et son règlement, n'existait pas. Il y avait bien les mata-toros qui tuaient des toros à l'épée, mais ces épreuves de force étaient déjà visibles sous l'Antiquité avec le même matériel.

Le toro dans son élément naturel (Photo Archives Anthony Maurin)

Quand on dit qu'au moyen-âge la corrida existait, c'est une erreur. Autant dire qu'elle existe depuis la nuit des temps alors. Le spectacle n'a eu de cesse de se mouvoir à travers le temps, de se codifier, d'évoluer. Des jeux taurins étaient organisés et la corrida serait née de ces instants populaires désorganisés. Bien après les premières peuplades sédentaires du moyen-orient, les nobles espagnols, alors à cheval, combattait les toros choisis avec des lances affûtées. Leurs serfs, probablement des Maures qui se déplaçaient à pied et qui leur servait d'écuyers, poursuivirent la tradition et c'est de là que sera formalisée la corrida.

Mais son origine est bien plus ancestrale que le XVIIIème siècle. Dès la naissance de l'humanité, quand l'Homme s'est regroupé, s'est mis à travailler la terre, à la cultiver, on retrouve des traces symboliques où apparaît clairement un lien entre l'humain et le taurin.

Le temps passe, les thèmes restent

Partout où l'on cherche des traces de l'art humain, on peut y trouver un toro représenté. Le bassin méditerranéen n'a jamais vraiment aimé un autre animal que le toro qui symbolisait force et bravoure, beauté sauvage et fertilité. Aujourd'hui encore, quand on va aux arènes, c'est ce que recherchent bon nombre d'aficionados, la dualité entre l'intelligence humaine, l'esquive d'un corps fluet et la sauvagerie d'un animal sculpté dans la masse, sans faille ni manque.

Toro de Juan Pedro Domecq (Photo archives Anthony Maurin)

À Nîmes, c'est en 1853 qu'elle arrivera pour la première fois codifiée dans l'amphithéâtre romain où elle se pratique encore aujourd'hui mais avec d'autres éléments de règlement. Disons que cette première a bien failli être la dernière car ce fut un vrai désastre, surtout pour le second duel qui a vu le toro. Pourtant, on parlait de 30 000 spectateurs pour ce premier acte nîmois. Il faudra dix ans de plus avant que la corrida ne reviennent pour ne plus partir. En effet, même quand la loi exigera son arrêt, le peuple des toros continuera à organiser et à se rendre à des corridas pour y trouver une source d'inspiration ou des fragments de vies passées.

La corrida est la résurgence d'un monde ancien dans une modernité aseptisée. On cache la mort, on vit plus vieux, on préserve l'humain de tous les malheurs qu'il peut rencontrer sur le chemin de sa vie mais on oublie l'essentiel. La corrida le montre, la tauromachie l'explique. Que l'on soit âgé de 10 ans ou de 90 ans, on apprend, encore et toujours. On apprend à vivre, on apprend à mourir. Rappelons que tauromachie vient du grec tauros (taureau) et makheia (combat).

Pour en savoir plus, l'Observatoire a réalisé un documentaire nommé Tauromachies universelles.

Anthony Maurin

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