UZÈS Jérôme Robert, artisan de la simulation de course automobile
Passionné de sport automobile, Jérôme Robert, la quarantaine, modélise des circuits et des voitures de course en 3D dans la cave aménagée de sa maison de pierre d’un village près d’Uzès.
Le but n’est pas de faire de banales parties de jeu-vidéo, mais des véritables simulations réalistes destinées aux pilotes de course, un peu à l’image des simulateurs de vol pour les pilotes d’avion. Une activité à laquelle il s’adonne depuis sept ans pendant son temps libre, et qui prend de l’épaisseur : Jérôme Robert a monté une entreprise en ce mois de janvier pour la développer. Car il en est certain : la simulation est l’avenir de la course auto. Pas pour la remplacer, mais pour s’entraîner et se familiariser avec les circuits. « Les écuries commencent à s’équiper de simulateurs et il y a quelques centres professionnels en France, affirme-t-il. D’ailleurs, les pilotes sont désormais obligés de passer par un simulateur avant de participer aux 24 heures du Mans. »
Un marché naissant en France, mais déjà plus mature à l’étranger, où les « simcenter », les centres de simulation de course, sont plus développés. « Je travaille beaucoup à l’étranger, en Allemagne et en Suisse notamment », précise Jérôme Robert. En France, c’est encore différent : « Ici, il y a encore l’image du jeu-vidéo qui colle, et souvent on me dit : ‘mais t’as 40 ans et tu joues encore à la console ?’ », souffle-t-il. Chiffrant plus de cent créations de circuits au compteur, pratiquement tous les circuits et les courses de côtes français, dont le pôle mécanique d’Alès ou la course de côte Bagnols-Sabran, Jérôme Robert a modélisé le circuit de Magny-Cours il y a quelques mois. « Ils s’en servent pour leur école de pilotage, pour faire une première sélection, car sur le simulateur, on fait des temps identiques au réel », ajoute-t-il.
Il lui faut « 400 heures de boulot par circuit soit trois mois de travail », précise-t-il, après avoir récupéré une vue satellite dudit circuit. Côté voitures, Jérôme Robert a modélisé, entre autres, la monoplace Wolf et la Lamera. « J’ai été contacté par Lamera pendant le confinement, c’est un constructeur français d’une voiture propulsion de 350 chevaux, détaille-t-il. Or il est arrivé que lorsqu’ils la faisaient découvrir sur circuit à leurs clients, certains la cassent, et chaque voiture coûte 80 000 euros. » Jérôme Robert passe quatre mois à modéliser la voiture avec toutes ses données et son comportement routier, utilisée par le constructeur pour faire découvrir son modèle à ses clients. « Et certains pilotes de la Lamera cup ont la simulation pour s’entraîner chez eux », rajoute-t-il.
Des pilotes « bluffés »
Ses simulations, Jérôme Robert les fait tourner sur le simulateur Assetto Corsa, entièrement paramétrable, sur lequel travaillent tous ses clients, et a greffé à ses simulations des outils de télémétrie professionnels. Quant à son simulateur personnel, il est équipé de matériel dernier cri, avec un volant de course à retour de force et la reproduction des vibrations qui permettent une immersion rapide et réaliste. Ceux qui le souhaitent peuvent même mettre le casque de réalité virtuelle. De quoi convaincre des pilotes comme le champion de France des rallyes Nicolas Bernardi, la pilote Wolf racing Sonia Roussel ou encore Philippe Brooks, « qui a fait cinq fois Le Mans », de venir passer du temps chez Jérôme Robert pour tester ses modélisations. « Ils ont tous été bluffés », affirme le Gardois.
La récompense pour ce passionné qui ne compte pas ses heures. « J’y bouffe tous mes week-ends et toutes mes vacances », glisse-t-il, lui qui vend désormais ses créations via sa nouvelle entreprise. Et s’il s’agit d’une activité secondaire pour lui, il travaille « en bonne et due forme, en demandant toujours aux ayant-droits. »
Reste que cette activité est toujours méconnue. La preuve : lors de ses premières visites à la CCI et à la Chambre de métiers, « on m’a d’abord dit qu’on ne comprenait rien à ce que je faisais, on ne savait pas si c’était de l’artisanat, et je suis dans un code NAF d’infographiste, ce métier n’existe pas », rigole-t-il. Il faut dire que Jérôme Robert revendique d’être « le seul en France à faire ce que je fais, il y en a peut-être qui font des créations mais qui ne sont pas montés en société. » L’Uzégeois commence à se faire un nom dans un milieu qui le passionne. Prochaine étape : « enchaîner. »
Thierry ALLARD