Devant le lycée Alphonse-Daudet, Emma Guin, étudiante en prépa pour les grandes écoles d'ingénieurs dans la filière math spé, n'ira pas voter dimanche. "Attention ce n’est pas parce que je ne m’y intéresse pas au contraire, assure-t-elle. Je n’ai pas la possibilité de retourner dans la ville où je suis inscrite sur les listes électorales." En pleine période d'examen, elle n'a pas trouvé le temps de se renseigner sur les programmes. 

Pour Violette, élève en Terminale, tout juste âgée de 18 ans, "ça va être une grande première". Et d'ajouter : "Je vais aller voter même si le monde de la politique me paraît encore un peu loin." Faire son choix parmi tous les candidats n'a pas été pour elle un exercice compliqué : "C’est assez simple de se renseigner sur les programmes, c’est d’ailleurs ce qui m’a fait prendre la décision de voter car chaque voix est importante je pense."

"Pour moi ce sera une grande première, j'espère que mon vote apportera un soutien supplémentaire"

En attendant son bus, Quentin Tessier, 19 ans et étudiant en licence d’Histoire, explique pourquoi il ne se rendra pas aux urnes dimanche prochain : "Pour être sincère, je ne vais pas aller voter. Je ne me suis même pas inscrit sur les listes électorales, je ne vois pas l'intérêt. Que je vote ou non, le résultat sera le même et je ne me suis jamais suffisamment intéressé à la politique pour voter sur ce genre d'élections.” Les jeunes ne sont-ils pas assez pris en compte par les candidats ? "Non je ne pense pas que cela vient de là, répond-il. À la sortie de la fac, on m’a distribué des tracts, je vois pas mal de vidéos sur les réseaux comme TikTok des candidats qui, je pense, visent un public de mon âge."

Un peu plus loin sur un banc, un groupe de jeunes. Parmi eux, Victor concède : "Bien sûr qu’il faut voter, je sais que chacun est libre de faire ce qu’il veut, mais je pense que c’est un droit que nous avons d’aller voter. En plus, pour moi ce sera une grande première, j'espère que mon vote apportera un soutien supplémentaire à la personne pour qui je vais voter et que sa voix portera à l’Assemblée.” Pour son ami, Andréa, "c’est tout le contraire je souhaite aller voter mais je n’ai toujours pas regardé les programmes".

Eva Peerlinck, collégienne à Beaucaire âgée de 15 ans, ne pourra de fait pas participer à ce scrutin. Elle s'y intéresse pourtant et considère que "ces élections sont au moins aussi importantes que les présidentielles", avec des thèmes qu'elle estime centraux tels que l'immigration et l'écologie. Concentrée sur les épreuves du brevet, elle n'a pas trouvé le temps de lire dans le détail les programmes des différents candidats, mais a suivi quelques-uns des débats. Elle l'admet, entre jeunes, pas de grandes discussions sur le sujet, "à part ceux qui peuvent être impactés par les possibles lois, par exemple les enfants binationaux (elle-même est franco-belge, NDLR), sinon on en parle très peu entre nous."   

Voter, un "devoir civique" ?

Du côté de Bagnols-sur-Cèze, la sonnerie de midi vient de retentir au lycée Einstein. Plusieurs élèves de Terminale discutent devant l'établissement en sortant d'une épreuve de bac. Parmi eux, Léo(*) qui fêtera ses 19 ans dans un mois. Il entrera dans l’isoloir pour la première fois ce dimanche. Il est bien décidé à glisser son bulletin dans l’urne. Il comprend ses camarades qui ne vont pas voter mais lui ira, il « considère que c’est un devoir civique ». Il poursuit : « L’Union européenne comporte des enjeux importants. Cela fait partie de mes centres d’intérêt, il y a des valeurs à défendre. » La politique se fait une place dans les discussions en famille du jeune homme. Pour faire le choix le plus éclairé possible, il s’informe, décortique les propositions des différentes listes pour trouver celles qui « collent le plus à ses intérêts ».

Ce qui l’anime ? L’écologie, l’environnement, la justice sociale et le fédéralisme européen. Il pense avoir arrêté son choix. Lui ne se tournera pas vers les extrêmes, alors que selon les sondages, beaucoup de jeunes pourraient donner leur voix à Jordan Bardella. « Je les comprends. La société est de plus en plus divisée sur des sujets inutiles dus aux inégalités qui se creusent. À un moment, j’y avais même pensé aussi, mais non. Il ne peut pas y avoir de dialogue avec les extrêmes », conclut Léo.

Son camarade Maxime (*), en Terminale aussi, va également voter pour la première fois avec une certaine appréhension. Il pense que les jeunes sont « très influencés par les réseaux sociaux », pour bâtir leurs idées politiques. Lui devrait glisser le bulletin pour la tête de liste RN de 28 ans. « Je le trouve un peu extrémiste mais les autres ne le sont pas assez. C’est un vote par dépit. Mais il faut voter, si tout le monde s’abstenait ce serait la catastrophe car il y aurait une absence de vote. »

À Alès, Virgilia va également voter. Ce seront ses deuxièmes élections, après les Présidentielles. "En tant que femme du XXIe siècle, le vote est non seulement un droit mais aussi un devoir car je tiens à rappeler que le droit de vote n'est accordé aux femmes que depuis 1944 et nous avons le devoir d’honorer la mémoire de ceux qui se sont battus pour que nous puissions exprimer nos choix politiques", détaille-t-elle. "Le vote reste un choix personnel qui doit représenter les valeurs que nous souhaitons mettre en avant à travers l’élection d’un candidat qui, on l’espère, portera les valeurs au niveau européen que nous souhaitons représenter et redonnera à la France toute la place qu’elle mérite", continue-t-elle.

Enfin pour Alexandre, âgé de 21 ans, ces élections sont aussi très importantes : "Toutes les lois votées en Europe le sont presque autant que celles votées en France." Le jeune homme a suivi les programmes et les candidats à travers les réseaux sociaux : "Pour moi c’est un facteur important de voir l’implication des candidats dans ces réseaux car c’est là que tout se passe et que la jeunesse est présente". Rendez-vous dimanche pour le tour unique.

(*) Ces prénoms ont été modifiés.