"La fragilité des êtres où en un instant tout peut basculer." C'est par ces mots que maître Manon Casteran débute sa plaidoirie. Elle défend une femme qui fait face aux jurés gardois depuis lundi, une jeune femme aujourd'hui âgée de 23 ans renvoyée devant la cour d'assises du Gard pour "violence volontaire ayant entraîné la mort sans intention de la donner". Une terrible affaire d'un bébé de 8 mois secoué mortellement par sa très jeune maman.

Des faits survenus au domicile de la famille à Uchaud, entre Noël et le jour de l'an 2021, avec cette mère de famille qui va commettre et admettre après quatre mois de dénégation avoir tué son enfant en le secouant. Des hématomes plus anciens ont été relevés sur le corps de la petite victime, sans savoir après trois jours d'audience criminelle qui a pu commettre ces autres gestes... 

"J'ai cette peur terrible, cette angoisse profonde de me dire que l'on va peut-être lui faire une sorte de sort qu'elle n'a pas mérité", enchaîne maître Isabelle Mimran qui se lève pour la dernière fois de sa carrière devant une juridiction. La pénaliste nîmoise prend sa retraite, mais dans ce dernier tour judiciaire, elle vient en aide à cette maman accusée. "Le futur et le destin de Calista est entre vos mains, tout dépend de vous", poursuit Me Mimran à l'adresse des jurés gardois. 

"Elle n'a pas été une mauvaise mère jusqu'à ce 29 décembre 2021. Ce n'est pas une mère maltraitante. Il n'y a pas de maltraitances d'habitude et d'ailleurs elle n'est pas poursuivie pour ça", estime l'avocate avant d'aborder la personnalité de sa cliente en pleurs dans le box. "Elle est fragile Calista. Sa personnalité est fragile, c'est une gamine. À la naissance de Lylio, elle a 20 ans. C'est une mère, une femme inexpérimentée. Qu'est ce qu'on sait à 21 ans ?", interroge-t-elle. 

"La vie, elle tape toujours sur ceux qui ont des problèmes [...]. Calista, elle n'a pas de chance car le bébé est prématuré. Pas de chance car il va être hospitalisé et qu'elle va rentrer à la maison sans lui. Elle n'a pas de chance car elle n'a jamais été aimée par son père, par sa mère [...]. Et elle se sent seule car tout le monde lui donne des conseils qu'elle ne peut pas suivre. C'est un acte volontaire qui est déconnecté de la volonté. C'est un acte qui se produit sans que votre cerveau le contrôle", certifie la pénaliste gardoise. "Après, comment on vit avec ça ?".Après ce geste terrible s'interroge avec humanité maître Mimran... "On ment pour dire ce n'est pas moi Calista qui ait pu faire ça, ce n'est pas possible que je sois l'auteur d'un si grand malheur", estime l'avocate qui aborde ensuite le futur de cette maman accusée. 

"Ce poids de la culpabilité, elle va le porter toute sa vie", certifie Me Mimran. "Il faut que vous laissiez une porte, une espérance à cette très jeune femme", insiste l'avocate devant les jurés gardois. "On m'a reprochée de ne pas avoir beaucoup parlé de Lylio, il me manque énormément", déclare la mère de famille habillée de noir dans le box des accusés. Vers 13h15 ce mercredi, la cour d'assises du Gard a rendu son verdict. La jeune accusée est condamnée à 13 ans de réclusion criminelle. Il lui est interdit d'avoir une activité professionnelle en lien avec les enfants pendant cinq ans. 

"Votre destin vous le tenez", a tenu à préciser le président, Éric Emmanuelidis, après le verdict. Une décision qui tient en compte les faits et les zones d'ombres du dossier, mais aussi la personnalité de cette maman accusée selon le magistrat. Un verdict qui se situe entre "la rigueur de ce qui s'est passé et la confiance que nous vous faisons".