GARD Le légal privilège... ou " circulez il n'y a rien à voir dans le monde des affaires "
C'est une nouvelle loi qui est débattue ce mardi en débat à l'Assemblée nationale. Un texte refusé par l'ensemble des avocats qui montent au créneau.
Les avocats du barreau de Nîmes, d'Alès, de Tarascon et d'Avignon sont montés au créneau ce lundi pour dénoncer "le légal privilège"... Un terme complexe et confus qui pourrait bien modifier le devenir des procédures en favorisant les grandes entreprises au détriment des petits salariés ou des lanceurs d'alerte, selon les avocats présents à Nîmes, ce mardi matin.
Le président de la Conférence des bâtonniers a récemment dit tout le mal que pensait la profession de ce légal privilège : la reconnaissance du légal privilège « serait de nature à affaiblir le secret professionnel de l’avocat ». « La garantie des droits de la défense repose sur ce secret professionnel, pilier de la relation de confiance entre avocats et clients, assurant la préservation de l’équité et de la justice. On ne peut étendre ce secret aux juristes dont les missions se bornent aux intérêts de l’entreprise », dénonçait dans le journal La Gazette du Palais le président de la conférence des batonniers de France, Jean-Raphaël Fernandez en demandant aux parlementaires de rejeter ce texte. "Cette évolution serait de nature à porter atteinte au principe du droit à la preuve, consacré par les plus hautes juridictions françaises et européennes (...) Comment les justiciables (consommateurs, salariés etc.) pourront-ils apporter la preuve des agissements qu’ils dénoncent, notamment devant le conseil de prud’hommes, si les entreprises refusent au nom de la confidentialité de produire des documents pouvant leur nuire", résume, toujours dans la Gazette du Palais, ce président de la conférence des bâtonniers.
À Nîmes, la fronde est identique. "Lorsqu'un justiciable voudra saisir les juridictions, il ne pourra pas le faire et il ne pourra pas montrer toutes les atteintes qui pourraient exister au sein d’une entreprise parce qu’on lui opposera des documents frappés de la confidentialité du juriste d’entreprise", estime la bâtonnière de Nîmes, maître Aoudia.
Pourtant, si tous les juristes de France sont vent debout contre ce texte étudié ce mardi à l'Assemblée nationale, il sera bien débattu aujourd'hui. Un texte voulu par une petite poignée d'avocats parisiens soutenus par la Chancellerie et son patron Éric Dupond-Moretti. "Il n'est plus avocat, il est garde des Sceaux", flingue le bâtonnier d'Avignon Philippe Cano, très critique à l'encontre de ce "légal privilège" qui permettra à des juristes au sein de l'entreprise d'avoir un rôle similaire à celui d'un avocat sans "en avoir le concours, l'éthique", rappelle le bâtonnier de Tarascon. "Notre profession d'avocats est attaquée. À la veille du 1er mai, il y aura un obstacle de plus à la liberté d'information avec les lanceurs d'alerte qui vont être baillonnés", insiste un autre avocat venu à cette manifestation inter barreaux. "Avec cette loi, si elle passe, ce sera une protection suplémentaire pour les affaires et les délits d'affaires. Ce sera encore plus circulez il n'y a rien à voir dans le monde des affaires", ajoute une autre robe noire.
Des avocats locaux qui dénoncent, comme l'ensemble des barreaux de France, ce "légal privilège. "Malgré l'opposition de tous les avocats, certains lobbys infuents et quelques avocats parisiens pèsent plus que nous, même s'ils sont ultra minoritaires", insiste un autre bâtonnier. Reste à savoir si ce "légal privilège" sera voté par une majorité de parlementaires alors que la fronde des robes noires ne fait que commencer.