NÎMES Parler du passé pour éclairer le présent et ses atrocités
Dans le cadre du concours national Héritiers de mémoire, deux Terminales générales du lycée Dhuoda ont été sélectionnées pour leur projet sur les guerres dans l’ex-Yougoslavie.
L’opération Héritiers de mémoire, conduite par la Direction de la mémoire, de la culture et des archives (DMCA) du ministère des Armées, en lien avec le ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse et le ministère de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire, met en lumière des projets remarquables d’enseignement de défense d’écoles ou d’établissements d’enseignement secondaire. Ces projets font l’objet de films documentaires, d’attribution de mentions lors d’une cérémonie nationale de remise de trophées au Panthéon.
En premier lieu, il ne s'agit pas d'un concours mais bien d'une action de mise en valeur nationale d’actions scolaires de terrain. Héritiers de mémoire mêle par ailleurs la mémoire et le cinéma, à travers les films documentaires. Cette opération est également profondément ouverte aux approches pluridisciplinaires et à tous les âges, qu’il s’agisse des élèves d’écoles, de collèges, de lycées. Elle met chaque année tout particulièrement en lumière des classes particulièrement méritantes, comme celles de réseaux d’éducation prioritaire, de l’enseignement professionnel et de l’enseignement agricole. Héritiers de mémoire a, enfin, une dimension internationale grâce à des établissements français à l’étranger qui peuvent être primés.
Le lycée nîmois a ainsi pu accueillir un juriste de renommée internationale grâce à la contribution du ministère des Armées le temps d’une matinée. Yann Jurovics attaque devant deux classes qui ont répondu présent. « Le Droit mène à tout ! Moi, j’interviens à l’international comme pour le procès de Slobodan Milosevic ou encore dans l’affaire opposant l’Afrique du Sud à Israël. Ce que vous lisez dans la presse grand public n’est jamais tout à fait exact, je vais vous expliquer comment fonctionne la justice pénale et la cour internationale de justice. N’hésitez pas à m’interrompre ! »
On parlera ainsi de Solférino, pas du siège du Parti socialiste, mais bel et bien de la bataille. On y découvrira Henri Dunant dans un autre rôle que celui de fondateur de La Croix-Rouge. Yann Jurovics évoquera également les débuts de la convention de Genève qui avait pour but d’éviter les grandes guerres et les trop nombreux morts. Le juriste balaie les règles du monde et de la raison au recours de forces armées.
« Aujourd’hui avec la charte des Nations unies, l’État n’a plus la compétence du recours à la force armée, il n’y a plus que la légitime défense car la guerre, légalement, est censée avoir disparu, sinon, elle est illégale. On a aussi règlementé la façon de combattre et supprimé quelques armes. Le sort des prisonniers de guerre, des malades ou des blessés a évolué. Il en va de même pour la protection des populations civiles. »
Parlant de civils, la question du génocide arménien, qui jouera un rôle dans cette évolution, est évoquée. « Toute violation est considérée comme un crime de guerre, un acte individuel. Les crimes contre l’humanité sont une notion récente et la problématique entre la Turquie et l’Arménie date de 1915. On parle aussi de crime de masse mais la justice est limitée car tout le monde ne peut pas être jugé. Seuls les symboles, de manière générale, le sont. »
Dans la foulée, la Seconde Guerre mondiale et les autres conflits plus ou moins connus à travers le monde ont été évoqués. Donc, les trois génocides connus de l’Histoire sont à en Arménie, au Rwanda avec les Tutsis bien plus récemment celui des Juifs à travers l’Europe.
On parle aussi d’autres crimes de masse comme celui de Staline avec le peuple ukrainien qui serait donc plutôt un crime contre l’humanité. Pour les Tsiganes lors de la Seconde Guerre mondiale et même s’il enseigné comme génocide, Yann Jurovics ne comprend pas pourquoi ce crime est entré dans cette partie du programme éducatif. Il en va de même pour le Cambodge et les Khmers rouges.
« Et Srebrenica ? », relèvent deux élèves. « C’est passionnant ça ! L’élément constitutif d’un génocide est de vouloir tuer toute la population ciblée. C’est un sujet compliqué, d’un point de vue qualitatif le génocide est un crime de destruction biologique, pas culturelle. Je le dis à nouveau mais un massacre de masse n’est pas forcément un génocide. Les gens veulent voir des génocides partout mais c’est tellement difficile à prouver… Ça peut vous heurter ou vous décevoir car on vous l’a appris comme ça, mais chaque mort est important. On dit juste qu’il y a des contextes différents. »
Les élèves interagissent plutôt bien avec le conférencier. Ils relancent, posent des questions, prennent volontiers la parole et jouent le jeu.