AU PALAIS Harcèlement à la mairie de La Grand’Combe : « Une immense farce ! »
Nasser Kebaili, un agent de la mairie de La Grand’Combe, affirme avoir été victime de harcèlement au travail. Il accuse le maire de la ville, Patrick Malavieille, ainsi que plusieurs de ses collaborateurs.
« Ce procès, c’est une immense farce ! » Voici le réquisitoire très orienté de Mélodie Fabre, substitut du procureur, pour conclure les longs débats qui se sont tenus, ce vendredi, au tribunal correctionnel d’Alès. À la barre, face à la présidente Amandine Abegg, cinq accusés : le maire et ses collaborateurs qui nient en bloc les faits de harcèlement : « Je m’estime plutôt être en situation de victime », complète Patrick Malavieille. Et pourtant, ce vendredi, c’est Nasser Kebaili qui occupe cette place-là. Selon lui, il serait la cible, depuis plusieurs années, d’harcèlement moral au travail.
« Au bureau avec ses lunettes de soleil et son baladeur sur les oreilles »
Nasser intègre les équipes de la mairie de La Grand’Combe en 2007. Il enchaîne plusieurs CDD avant d’être titularisé en 2011. Il fait alors partie du service urbanisme et semble poser quelques difficultés, comme le révèle Patrick Malavieille :
- M. Kebaili a du mal à avoir une attitude conforme au cadre de la fonction publique et à respecter les horaires. Il arrive au bureau avec ses lunettes de soleil et son baladeur sur les oreilles. Ses absences sont répétées, parfois injustifiées, et il passe trop de temps en pause cigarette.
En 2014, de retour d’un arrêt maladie, Nasser est transféré vers les services techniques de la commune, ce qu’il vit comme une mise au placard :
- J’avais ni fiche de poste, ni ordinateur, ni matériel. Je me suis retrouvé dans un local technique isolé qui n’est plus aux normes. Il m’est même arrivé de passer la journée dans ma voiture parce que je n’avais pas la clé pour rentrer, peste-t-il.
L'année suivante, nouveau changement : il devient agent comptable. Mais ça ne s’arrange pas, l’agent se sent toujours isolé :
- Pendant les pauses cigarette, on m’assigne dans une cour intérieure sans abri alors que les autres peuvent aller où ils veulent !
La victime agit « pour le bien » de ses collègues
En 2016, la situation se corse davantage : suite à un litige avec un autre agent de la commune, le conseil de discipline prend la décision d’exclure Nasser pendant un an. Là encore, il n’y voit qu’une stratégie pour l’évincer, « une sanction déguisée pour être allé à une réunion de l’opposition. » Patrick Malavieille tient un tout autre discours :
- J’ai demandé au conseil de discipline de réduire ce délai à cinq mois pour assurer la situation financière de M. Kebaili (…). Vous savez, j’ai toujours essayé d’agir en bon père de famille.
Toujours employé au sein de la collectivité aujourd’hui, Nasser assure qu’il ne cherche pas à gagner de l’argent à travers ce procès, mais qu’il s’agit plutôt d’une démarche altruiste :
- Si je fais ça, c’est pour le bien de mes collègues. Moi j’ai tenu le choc, j’ai eu de la chance !
- Alors pourquoi demandez-vous 10 000 euros de dommages et intérêts ?, interroge malicieusement la présidente Amandine Abegg.
- Ah ça je ne sais pas, c’est mon avocat qui décide, répond Nasser un brin gêné.
Loin d’être convaincue, et c’est peu dire, par les arguments de la victime, le substitut du procureur Mélodie Fabre réclame une relaxe pour les cinq prévenus. Elle va même plus loin en qualifiant la démarche du plaignant « abusive » et en demandant 1 500 euros d'amende à son encontre. La décision sera rendue le 9 février 2018.
Élodie Boschet