FAIT DU JOUR Départementales sur Roquemaure : et si le FN prenait le canton ?
Il faisait partie des trois cantons classés « risque FN » par la gauche, qui a tenté en vain de monter une liste commune avec le Front de Gauche. Le risque est-il réel ? La droite peut-elle faire un coup sur ce canton historiquement à gauche ? La gauche a-t-elle une chance de le conserver ? Etat des lieux.
Le FN optimiste
« Ici, si on se bouge tous, ce siège il est gagné. » La phrase, prononcée vendredi soir lors d’une réunion publique à Laudun par le maire FN de Beaucaire Julien Sanchez, en dit long sur l’optimisme des frontistes quant à leurs chances de remporter le canton de Roquemaure le mois prochain.
Il faut dire que le FN peut se gargariser de très bons scores sur ce territoire aux dernières élections européennes : 40,55 % à Roquemaure, 37,13 % à Saint-Géniès-de-Comolas, 35,41 % à Laudun-l’Ardoise et même 55,22 % à Codolet, qui rejoint le canton. « Et entretemps on a encore progressé », dixit Julien Sanchez vendredi soir. Sans compter que le FN avait atteint le second tour sur le canton en 2011 avant d’être battu par le socialiste Patrice Prat, qui a passé la main à Nathalie Nury après les législatives de 2012.
Alors pour optimiser ses chances, le FN a investi deux candidats plutôt expérimentés : le responsable de la circonscription du Gard rhodanien pour le parti François Bonnieux, officier à la retraite et militant depuis 28 ans, ancien conseiller régional, et ancien conseiller municipal à Sorgues et Villeneuve-lès-Avignon ; et Brigitte Roullaud, au FN depuis 1999 et ancienne candidate aux municipales aux Angles. En revanche, aucun candidat, remplaçants compris, n’est domicilié sur le canton — comme du reste beaucoup de candidats FN à cette élection dans le département.
Des candidats au discours (très) offensif, plus proche de la ligne « historique » du parti incarnée par Jean-Marie Le Pen que par celle prônée par Marine Le Pen. De quoi capitaliser sur un électorat déjà acquis et qui a plus besoin d’être conforté que d’être déculpabilisé par un discours « dédiabolisé » ?
La droite aura fort à faire
Face à un Front national attendu très haut, quel rôle peut jouer la droite ? Unie ici comme dans l’écrasante majorité des cantons du département sous l’étiquette du « Bon Sens gardois », elle est représentée par le maire UMP de Saint-Géniès-de-Comolas Olivier Jouve et l’adjointe roquemauroise Mireille Gros-Jean.
Ses candidats jouent les cartes du dynamisme et de la proximité, avec un discours pouvant s’avérer assez vif (« L’assistanat on n’en veut plus »), pour aller récupérer les électeurs du FN, qui « ne sont pas des fachos, juste des gens qui en ont marre » et qui « se sont égarés », d’après Olivier Jouve.
La droite aura tout de même fort à faire : lors des dernières élections cantonales, en 2011, elle n’avait pas réussi à passer le premier tour… Cette fois-ci, portée par son unité et un rejet de la politique nationale, les choses pourraient se passer différemment.
La gauche divisée
En face, la gauche est dans l’incertitude. La conseillère générale sortante PS Nathalie Nury part en binôme avec un autre fidèle de Patrice Prat, le jeune maire PS de Laudun Philippe Pécout, après l’échec des négociations pour monter une « alliance technique » avec le Front de Gauche. Un échec dû à la candidature de Luc Rousselot et Marie-Pierre Vaselli, encartés au Parti de Gauche, sous le nom de « Majorité Citoyenne ».
Si elle se dit « pas inquiète », il s’agit tout de même d’une très mauvaise nouvelle pour Nathalie Nury, qui peut craindre de voir se répéter le scénario des dernières municipales à Roquemaure. Luc Rousselot s’était maintenu au second tour, faisant 16,04 % des voix quand Nathalie Nury était battue par la liste UMP conduite par André Heughe (36,66 % contre 47,29 %). Si le candidat de « Majorité Citoyenne » ne semble pas en position de rafler le canton, il pourrait bien jouer un rôle capital. Lui estime que « le PS n’a besoin de personne pour provoquer la victoire de la droite. » « Il fait le con, il va faire gagner le FN » nous a dit un socialiste gardois, alors que le communiste Elian Cellier, pressenti initialement comme candidat dans le cadre de l’« alliance technique » avec les socialistes, lui avait lancé : « Au 2e tour, tu iras voter entre le FN et l’UMP. »
En attendant, la probabilité de voir le FN au second tour est forte. Et cette fois-ci, pas sûr qu’un « front républicain » suffise à le battre.
Thierry ALLARD