FAIT DU JOUR Jérôme Arpinon : du rêve au cauchemar
Officiellement mis à pied par le Nîmes Olympique ce vendredi, Jérôme Arpinon aura passé 226 jours à la tête de l'équipe première. Ce qui devait être le rêve de sa vie s'est finalement transformé en cauchemar. Un échec dont le scénario s'étirait depuis l'automne.
Tout avait pourtant bien commencé. Après avoir participé aux succès des Crocos sous la direction de Bernard Blaquart en tant qu'adjoint très impliqué, Jérôme Arpinon prenait logiquement la succession de ce dernier, usé par quatre saisons et demies jalonnées d'exploits. Celui qui avait attendu dans l'ombre, passé et obtenu son Brevet d'entraîneur professionnel de football (BEPF) sans jamais cacher son ambition de devenir un jour coach principal, entrait enfin dans la lumière.
Et si Nîmes ne gagnait aucun de ses matches de préparation, la première journée du championnat avait le mérite de rassurer tout le monde. Des Crocos affûtés terrassaient Brest (4-0) et caracolaient en tête du championnat. Les prestations qui suivaient étaient honorables avec notamment un match nul obtenu sur la pelouse de Lyon (0-0) et une défaite aussi spectaculaire qu'encourageante contre Rennes (4-2). À la veille de la seconde trêve internationale, Nîmes remportait même le derby à la Mosson (0-1). Une première.
Ce jour-là, Jérôme Arpinon et ses hommes sont accueillis en triomphe à la Bastide par des supporters en liesse. "En tant que seul Nîmois ayant entraîné le NO en Ligue 1 je suis très heureux de rendre ce peuple fier", explique-t-il à notre micro.
Mais l'état de grâce ne dure pas. La faute à quatre défaites consécutives, dont deux terribles à domicile contre Metz en supériorité numérique (0-1), puis Angers (5-1). Et malgré un troisième succès de la saison obtenu contre le cours du jeu à Reims (0-1), la dynamique négative ne s'enraye pas.
Prometteuses sur le papier, la majorité des recrues peine à confirmer les espoirs placés en elles. La faute pour le Norvégien Birger Meling et le Paraguayen Andrés Cubas à des pépins physiques venus compliquer des débuts convaincants. Mais plus généralement pour Patrick Burner, Niclas Eliasson ou l'attaquant choisi par Jérôme Arpinon lui-même, Karim Aribi, à une incapacité à s'imposer par l'enchaînement de bonnes performances. Ultra sollicité, le gardien Baptiste Reynet est la seule recrue à s'être régulièrement montrée décisive.
À l'automne et en l'espace de quelques semaines, le coach nîmois a quant à lui grillé toutes ses cartouches, tergiversant constamment dans le choix des hommes et des dispositifs tactiques. Jusqu'à aligner un improbable 3-4-3 pour défier Lorient au Moustoir dans un match déjà crucial, où les Crocos à côté de leurs pompes sont sévèrement giflés (3-0). Ou encore de lancer dans le grand bain et avec des succès mitigés les jeunes Guessoum, Alhinvi et Majouga.
Un communication qui ne passe pas
Après chaque revers pourtant, Jérôme Arpinon tente de positiver et d'afficher un visage combatif. Mais sa tendance à trop mettre en avant la responsabilité de ses joueurs, de l'arbitrage ou de la malchance, sans tirer les enseignements de ses propres erreurs agace chaque semaine un peu plus les supporters.
Pire, ces derniers constatent match après match l'abysse qui sépare ce discours résolument optimiste et le comportement apathique des joueurs sur le terrain. Car en plus des carences techniques déjà entrevues la saison dernière, les Crocos sont absents dans le combat. Symptomatique et effarante, la baisse de 27% des duels aériens gagnés par rapport à l'an passé après autant de matches disputés parle d'elle-même.
Le décalage entre le discours de Jérôme Arpinon et les prestations de ses joueurs a fini de ruiner sa crédibilité à la tête de l'équipe. Tout comme ses nombreux rétropédalages en conférences de presse, où il déclare tantôt vouloir mettre l'accent sur "la solidité défensive", puis sa volonté d'être "plus ambitieux offensivement", ou de promettre de lancer "des jeunes qui ont faim", puis, quelques jours plus tard, de "s'appuyer sur ses cadres expérimentés."
0,68 point pris par match
Bref, si l'on ne saura probablement jamais vraiment comment son discours était perçu dans le vestiaire, sa communication extérieure renvoyait l'image d'un coach un peu perdu, ne sachant pas réellement où il voulait aller. Jérôme Arpinon a certes su mobiliser ses joueurs face aux cadors du championnat, contre qui les Crocos ont souvent fait bonne figure, mais il est passé à côté de presque tous ses rendez-vous cruciaux pour le maintien. Surclassés par Strasbourg (5-0), Lorient (3-0) et Dijon (3-1), les Nîmois sont bons derniers d'un championnat où leurs concurrents directs pour le maintien - l'ambition affichée du club en début de saison - avancent pourtant au ralenti.
Leur entraîneur se retire avec une moyenne famélique de 0,68 point pris par match joué, à quelques jours d'une série de rencontres face à des équipes de bas de tableau, que les Crocos ont jusqu'alors si mal gérées. Les deux exploits à la Mosson et au Vélodrome n'éclaircissent que trop peu un bilan comptable catastrophique de quatre succès en 22 rencontres. Un résultat qui reste loin de celui de René Girard lors de la saison 1994-95. Alors sur le banc gardois, l'actuel entraîneur du Paris FC n'était pas parvenu à remporter un seul de ses dix matches de Division 2. Le pire bilan de l'histoire du club.
Boris Boutet