FAIT DU SOIR Émile Noël, le pionnier du bio est à Pont-Saint-Esprit
Entreprise centenaire, le groupe Émile poursuit sa croissance avec une large gamme d’huiles, d’aliments et de produits de beauté entièrement bio distribués dans le monde entier depuis la rue des Oliviers, à Pont-Saint-Esprit.
Il n'a presque pas bougé depuis 101 ans. Le moulin du groupe Émile est toujours dans le même quartier de Pont-Saint-Esprit qu'au tout début de l'histoire, en 1920, lorsqu'Émile Noël rachète un vieux moulin à huile pour faire de l'huile d'olive, le Gard étant à l'époque constellé d’oliviers. L'entreprise familiale connaît un premier tournant à l'hiver 1956. Une vague de froid record sévit sur la France, et les oliviers, pas que dans le Gard, sont quasiment tous rayés de la carte par le gel.
L'entreprise fait alors ce qu'elle n'aura de cesse de faire ensuite dans son histoire : se diversifier. Émile Noël se lance dans l'huile de tournesol et dans celle de colza, il est alors le premier à le faire. Une démarche qui se poursuivra dans les années 1980 pour arriver aujourd'hui à une large gamme d'huiles, la plus étendue du marché en bio, et de produits de beauté, avec la marque Emma Noël, lancée en 2004.
Cette dernière fournit par ailleurs des huiles à des grands noms des cosmétiques comme L'Oréal, Yves Rocher ou Estée Lauder. Parallèlement, Émile Noël fils devient le pionnier du bio dans son domaine en dirigeant la première huilerie à triturer des graines biologiques en 1972, et ce alors que la notion d'agriculture biologique n'existe pas encore.
Des produits bio et équitables
Aujourd'hui, le groupe Émile, via ses marques Émile Noël, Emma Noël et la petite dernière La Fabric sans gluten, rachetée il y a moins d'un an, « ne fait que du bio, dans une optique de ne pas tromper les consommateurs », affirme le chargé de communication du groupe, Pierre Domergue. Une volonté qui traverse les générations dans un groupe toujours resté familial. Après Émile Noël père et fils, la fille d'Émile Noël, Annick Garnier, puis aujourd'hui le petit-fils, David Garnier, se sont succédé aux commandes d'une PME familiale qui compte aujourd'hui quelque 80 salariés, pratiquement tous à Pont-Saint-Esprit entre le moulin, la boutique et le service expédition.
Cependant, ils sont bien plus nombreux à travailler pour l'entreprise. Depuis trente ans, le groupe Émile a développé des filières avec les producteurs locaux, comme au Mali pour la filière sésame « et dernièrement en Guinée où nous ouvrons une flière avocat, dont nous allons lancer la production », précise Pierre Domergue. Le but est de nouer des relations durables et pérennes avec les producteurs pour garantir les quantités et les revenus.
À Sao Tomé par exemple, la mise en place d'une filière entre le groupe spiripontain et un producteur de noix de coco de l'île a permis de réhabiliter des cocoteraies abandonnées et d'augmenter les salaires des employés, aujourd'hui à trois fois le salaire minimum. « Ce sont des produits commerce équitable », commente Pierre Domergue.
Aujourd'hui, l'entreprise s'approvisionne dans une vingtaine de pays du monde entier pour sa gamme qui compte quelque 250 références. La France n'est pas en reste et une bonne partie des graines, ainsi que des olives, proviennent de notre pays, notamment de sa moitié sud. « Et nous avons notre laboratoire interne pour analyser et contrôler les huiles et vérifier qu'elles sont conformes à notre charte, sinon nous les renvoyons », explique Pierre Domergue.
« Tout est bio, mais il faut que ce soit mieux »
Aujourd'hui, l'entreprise poursuit sa diversification en lançant régulièrement de nouveaux produits. « Cette année nous avons lancé douze nouveautés », précise Pierre Domergue. Parmi elles, une gamme de vinaigrettes, des chips ou encore du houmous, avec une idée commune : « Prendre des tendances hors bio et de les proposer en bio sur la gamme la plus large possible », avance-t-il.
Y compris dans le sans gluten, avec le rachat, il y a quelques mois, de la Fabric sans gluten, entreprise valentinoise qui fait dans les tartes salées de saison et les brownies. « C'est une entreprise qui prône le bio et les circuits courts et qui a un aspect solidaire en n'embauchant que des personnes en réinsertion », précise-t-il.
Les nouveautés se retrouvent aussi dans la gamme de produits de beauté Emma Noël, avec de l'huile de ricin ou encore de nouvelles formules et de nouveaux conditionnements pour les savonnettes et les baumes pour les lèvres. Par exemple, « les savonnettes sont éco-conçues à 99 % d'origine naturelle, et l'emballage utilise de l'encre végétale. Et pour le lait corporel, nous avons lancé une nouvelle formule plus verte », développe Pierre Domergue. Car, poursuit-il, « tout est bio, mais il faut que ce soit mieux ».
De quoi valoir à l'entreprise régulièrement des distinctions pour ses produits, comme le Meilleur produit bio, décerné par un jury de cent consommateurs. Très présente dans les magasins bio, la gamme du groupe spiripontain l'est aussi dans les grandes surfaces depuis quelques années avec la marque dédiée Le Moulin de mon père, toujours en bio, évidemment. Et depuis Pont-Saint-Esprit car, comme nous le disait David Garnier il y a quelques années, « il est important de garder ses racines ».
Thierry ALLARD