FAIT DU SOIR Samuel Rancan (ancien responsable billetterie NO) : « Ce club c’est ma vie et j’aimerais retrouver mon poste »
Après avoir joué au Nîmes Olympique dans les catégories jeunes puis avoir été salarié pendant 13 ans, Samuel Rancan a été licencié lors de l’été 2021. L’ancien responsable de billetterie conteste son licenciement économique qu’il a appris par l’intermédiaire des réseaux sociaux. Toujours amoureux de son club de cœur, il estime avoir été remercié abusivement. Son dossier est désormais dans les mains du conseil des Prud’hommes de Nîmes. Entretien avec un Nîmois en colère.
Objectif Gard : Vos liens avec Nîmes Olympique sont-ils anciens ?
Samuel Rancan : Oui car l’histoire a débuté alors que j’étais enfant. J’ai commencé à jouer au Nîmes Olympique chez les débutants et j’ai fait toutes mes classes jusqu’au centre de formation. J’ai joué jusqu’à l’âge de 25 ans, dans la troisième équipe qui évoluait en DHR (Division d’Honneur Régionale, NDLR).
Que s’est-il passé ensuite ?
À partir de 18 ans, j’ai commencé à travailler aux guichets du stade des Costières : les soirs de match je vendais des places. Comme cela se passait bien, j’ai ensuite participé aux campagnes d’abonnements. De fait, je connais bien les fidèles supporters.
À partir de quand avez-vous pu vivre de cette activité ?
En 2008, quand Nîmes Olympique est remonté en Ligue 2, Jean-Louis Gazeau, qui était président du club, m’a fait signer un CDI. C’est pour cela que j’ai 14 ans d’ancienneté au poste de responsable de la billetterie.
« Je suis monté à Paris avec Fethi Harek pour défendre le club »
En quoi consistait votre poste de responsable de la billetterie ?
Il faut gérer les abonnements et les invitations. C’est beaucoup de préparation en amont de la rencontre. Quand il y avait des guichets, il fallait préparer les fonds de caisse, convoquer les guichetiers et sortir les places. Sur un derby Nîmes – Montpellier, c’est au moins trois semaines de préparation.
Votre histoire avec ce club est aussi familiale...
Mon papa s’est occupé des Minimes pendant 12 ans et après il a été en charge des ramasseurs de balle pendant plus de 20 ans. Mon frère a travaillé à la billetterie avec moi, et mon fils Ethan a 12 ans, cela fait six ans qu’il joue au Nîmes Olympique.
Que représente Nîmes Olympique pour vous ?
J’ai le sang rouge. À l’époque des matches soi-disant truqués, je suis monté à Paris avec Fethi Harek pour défendre le club. Je n’ai pas hésité une seconde, même si ce n’est pas au responsable de la billetterie de le faire. Il fallait que le club soit représenté par un salarié et tout le monde avait peur d’y aller. On est monté en commission d’appel pour défendre nos couleurs. Le club devait être rétrogradé en National et il a finalement été maintenu en Ligue 2 avec huit points de pénalité. Je ne dis pas que j’ai sauvé le club mais c’est pour moi un fait marquant.
« J’ai appris mon licenciement sur les réseaux sociaux »
Êtes-vous toujours attaché à ce club ?
Bien entendu. Quand il a un résultat négatif, j’ai presque envie de pleurer. C’est mon club.
Comment avez-vous appris votre licenciement ?
J’ai appris mon licenciement le 12 août sur les réseaux sociaux, puis par la presse. Un soir, mon téléphone s’est mis à sonner et j’ai eu des dizaines de messages d’amis qui m’envoyaient des captures d’écran de la nouvelle sur les réseaux sociaux. À cette époque j’étais en chômage partiel à cause de la crise sanitaire. J’ai ressenti de la colère, beaucoup de colère.
Comment se fait-il que vous ne l’ayez pas appris avant ?
Je n’en sais rien. J'ai reçu une lettre recommandée que beaucoup plus tard, le 1e septembre.
« Le président n’a pas le cran de l’annoncer lui-même »
Avez-vous eu une explication de Rani Assaf, le président du Nîmes Olympique ?
Non, car tout passait par Laurent Tourreau, le directeur des opérations. Quand ce dernier est arrivé au club, Rani Assaf nous a dit de ne plus passer directement par lui mais par Laurent Tourreau. Lui aussi a été licencié.
Quel est le motif de votre licenciement ?
C’était un licenciement économique. L’entretien préalable au licenciement doit être effectué par le président du club, mais pour mon cas c’est la responsable administration, Valérie Merchez, qui s’en est chargée. C’est d’ailleurs elle qui s’occupe de cette tâche pour tous les licenciements parce que le président n’a pas le cran de l’annoncer lui-même. C’est à mon sens un problème de procédure et de rapport humain. J’estime qu’il aurait eu du cran de se mettre devant moi et de me dire : « Samuel, je suis désolé mais ça s’arrête pour toi. »
Contestez-vous les problèmes financiers du Nîmes Olympique ?
Pas du tout, mais cet été-là, le club a engrangé six millions d’euros sur le marché des transferts. Nîmes Olympique a peut-être besoin de faire des économies mais pas sur le plus petit salaire du club. Le président a profité de la fermeture du centre de formation pour m’inclure dedans. Je suis le seul salarié de l’administratif à partir avec la vague du centre de formation avec lequel je n’ai pourtant jamais eu de rapport. Et puis dans son rapport du 1er juillet, la DNCG (Direction nationale du contrôle de gestion) souligne la bonne santé économique du club puisqu’aucune décision restrictive n’a été prise à l’encontre du Nîmes Olympique.
« Je n’en fais pas une histoire d’argent mais je ne vais pas me laisser faire »
Que demandez-vous aujourd’hui ?
Ce club, c’est ma vie, et j’aimerais retrouver mon poste.
Et si vous ne le retrouvez pas ?
Je n’en fais pas une histoire d’argent mais je ne vais pas me laisser faire, et le dossier est dans les mains du conseil des Prud’hommes de Nîmes. Je conteste le motif économique, je pense que c’est un problème personnel pour ce que je représente avec mon ancienneté. Les anciens joueurs ne sont pas reconnus, c’est le seul club du monde où ils doivent payer leur place.
Plusieurs personnes connaissaient le projet de votre licenciement bien avant vous, personne ne vous a alerté ?
Il y en a certains que je connais depuis longtemps et avec lesquels j’avais de très bons rapports. Ils étaient au courant depuis le mois de juin et ils ne m’ont rien dit. J’ai appris la nouvelle par les réseaux sociaux au mois d’août.
« C’est le régime de la terreur »
Vous leur en voulez ?
Je suis déçu ! Mais je peux comprendre que personne n’ait osé me parler par peur de représailles. C’est le régime de la terreur.
Le 15 février, maître Pierry Fumanal, votre avocat, dénonçait sur France Bleu Gard-Lozère « une purge des historiques au Nîmes Olympique ». Soutenez-vous cette thèse ?
Oui, je le pense. Il y a eu Laurent Boissier, Jérôme Arpinon, Laurent Tourreau et moi. On a l’impression que l’on dérange. C’est peut-être aussi parce qu’aux yeux du président, l’histoire ne compte pas.
Propos recueillis par Norman Jardin