NÎMES À la prison d'arrêt, Manuel Valls promet une réponse "globale"
En visite à la maison d'arrêt de Nîmes, le premier ministre Manuel Valls et le Garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas ont fait une annonce "globale", en vue d'un plan de lutte contre la surpopulation carcérale.
Les couloirs sont interminables et étonnements silencieux. Les portes blindés, closes, laissent échapper le ronron habituel d'un téléviseur, d'une radio. Rien de plus. Au passage du premier ministre, des journalistes, élus et agents de l'administration pénitentiaire, aucun hurlement ne vient perturber l'assistance. Le personnel est étonné, la procureur Laure Beccuau aussi : "Je ne m'attendais pas à cela, je suis surprise" avance t-elle. Mais le calme sera de courte durée. Une cinquantaine de détenus font leur sortie matinale dans la cour bétonnée et ne manquent pas d'interpeller le chef du gouvernement. "Manu !". La procureur revient sur ses propos : "Nous voilà rassasié sur leur capacité d'expression." Des détenus qui aurait sûrement eu des choses à dire sur leurs conditions de détention dans la prison la plus surpeuplée de France. À aucun moment la visite ne prévoyait une discussion, même courte, entre le premier ministre Manuel Valls, le Garde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas et un détenu. Seulement deux cellules, vidées de leurs occupants pour l'occasion, sont pénétrées par les deux représentants de l’État.
Le tableau est désarmant, en temps normal il l'est d'avantage. Ici, 406 hommes et femmes effectuent leur peine, dans un établissement ne pouvant en accueillir, en théorie, que 192. "Des gamins, pour la plupart" précise le directeur de la prison, Luc Joly. Unique prison du département du Gard depuis la fermeture de celle d'Alès en 1990, la maison d'arrêt de Nîmes a vécu. Construite il y a 42 ans, l'établissement a bénéficié de quelques rafraichissements mais dévoile des conditions de travail difficiles pour les personnels. "On est directement impacté par le surencombrement. Cela devient très compliqué de réaliser notre mission d'encadrement" répond un agent au premier ministre. 100 personnes - détenus et familles confondus - peuvent cohabiter dans un parloir de moins de 80 m2 et dans une cacophonie totale.
Trente cellules et 80 détenus par étage
L'état de l'unité de soins ou du quartier des arrivants sont tout aussi alarmants. "Le fait que nous ne soyons pas dotés d'un mirador nous préserve des détenus dangereux" rassure comme il peut le directeur. Mais si la population est essentiellement gardoise, "paradoxalement, beaucoup préfèrent être incarcérés ici pour rester proche de leur famille" ajoute le procureur général Michel Desplan, 50 % est issue d'affaires criminelles. À Nîmes, certains couvrent des peines allant jusqu'à 30 ans de réclusion. Le taux d’aménagement des peines est considérable, 49 % contre 35 % au niveau national, mais ne suffit pas à désengorger des cellules où le matelas au sol demeure l'ultime recours, faute de moyens suffisants enclenchés depuis plusieurs décennies.
À l'heure où la sécurité nationale est sur toutes les lèvres, le gouvernement de Manuel Valls annonce des financements en faveur du parc pénitentiaire d'ici octobre, mais ne dit rien en détail. "Si nous devions faire une annonce à chaque visite, ça ne serait pas une bonne politique" lance t-il, suivi par Jean Jacques Urvoas, "la réponse sera globale." 1 100 postes dans les administrations pénitentiaires ont été crées en France depuis l'élection de François Hollande. À Nîmes, toutefois, une étude sur la faisabilité d'un agrandissement au sein du périmètre actuel est lancée, financé par le plan de lutte antiterroriste. Insuffisant selon certains agents, qui anticipent une augmentation du nombre de détenues. Un cercle vicieux qui sera long à résoudre.
Baptiste Manzinali