NÎMES À l’APSH30, le salaire de la discorde
« C’est immoral » : un collectif de salariés de l’association pour l’Accompagnement des personnes en situation de handicap du Gard (APSH30), association qui gère notamment l’ESAT Osaris de Nîmes, s’insurge contre l’augmentation salariale du directeur général de l’association.
Arrivé en septembre 2019, Christophe Paillard a une rémunération brute 35,25 % supérieure à celle de son prédécesseur, selon un document interne que nous avons pu consulter. Et si cette augmentation est jugée « immorale » par le collectif de salariés souhaitant rester anonymes, c’est que « dans le même temps, on enlève des avantages aux travailleurs en situation de handicap de l’ESAT Osaris, une semaine de congés payés et des oeuvres sociales qui leur permettent de aire du sport ou de s’abonner à des magazines », poursuit le représentant de ce collectif.
Même si notre interlocuteur ne veut pas voir « des vases communicants » entre l’augmentation salariale et ces avantages présentés comme rognés, « c’est un peu abusé », selon ses termes, sans compter « nos salaires qui stagnent ». Du reste, le commissaire aux comptes a refusé de certifier les compte 2020 de l’association pour ce motif. Dans son rapport, que nous avons pu consulter, le commissaire aux comptes affirme que l’augmentation du DG « est contraire à la stricte application de la convention collective. »
Le directeur général se défend
Une version réfutée par le principal intéressé. « Je ne fixe pas ma rémunération moi-même, elle est contrôlée et validée par l’autorité de tutelle et de contrôle (l’Agence régionale de la santé, ndlr), elle est conforme au droit du travail, tout ceci est encadré », affirme Christophe Paillard. Le DG reconnaît toutefois que « la différence peut paraître importante » entre sa rémunération et celle des travailleurs sociaux. Il indique par ailleurs que l’association « a diligenté l’été dernier une mission d’étude et d’enquête sur la situation économique et financière de l’association, rien d’anormal n’a été trouvé. »
De fait, le rapport a été présenté lors d’une réunion extraordinaire du Comité social et économique de l’association le 20 octobre dernier. Signé du cabinet Syndex, « cabinet désigné par les syndicats et les élus », note le DG, il précise effectivement que « la situation de l’association est saine et solide. » Quant à la question de la rémunération du directeur général, elle correspond « à des niveaux d’ancienneté et de technicité différents de ceux de son prédécesseur », note le rapport. Et sur le refus d’approbation par le commissaire aux comptes, le document note qu’il y a des « difficultés » avec ledit commissaire depuis « septembre 2019 » et que « l’ARS a intégralement approuvé le résultat des comptes administratifs de 2020 qui intègrent ces évolutions. »
Dont acte. Christophe Paillard ajoute que « le commissaire aux comptes a commis un certain nombre d’erreurs par le passé » et que le procureur en charge des affaires financières et économiques, saisi lors de la non certification des comptes, « a rendu sa décision et dit qu’il n’y avait pas d’infraction caractérisée », affirme-t-il. Le DG, remonté, précise que « l’association se réserve le droit, au regard des conséquences à son détriment, d’ester en justice. »
Sur le volet des avantages des travailleurs en situation de handicap présentés comme rognés par le collectif, le DG affirme qu’il s’agit de « calomnies, ces informations sont erronées, s’il y avait eu une chose de la sorte, l’ARS s’en serait saisie. »
Le management en question
Reste un dernier point, le management attribué au DG. « Il ne contrôle pas trop ses colères, nous affirme le porte-parole du collectif. Les démissions et les ruptures conventionnelles, en ce moment, ça y va. On n’a jamais vu ça dans l’association. » Là aussi, le directeur général s’inscrit en faux : « si le management était brutal, il y aurait des saisies de l’inspection du travail, des prud’hommes, l’ARS serait intervenue, or il n’y a rien de tout cela. »
Le directeur général reconnaît toutefois qu’à son arrivée, accompagnée d’un changement de présidence, « un certain nombre de choses méritaient une évolution. » Il ajoute que lors de sa prise de fonction, « nous avons découvert des choses issues d’éléments antérieurs, des faits significatifs, probants, attestés, mais je ne vais pas donner ces éléments dont nous pourrons nous servir dans d’autres procédures. »
Reste que du côté de ce collectif de salariés, soutenu par le syndicat Sud Santé Gard, on est très remonté. Ainsi, lors du mouvement national de grève du 1er février prochain, un piquet de grève sera devant le siège de l’association dès 8 heures. Une pétition sera remise au directeur général à cette occasion.
Contacté, le délégué de l’ARS pour le Gard Claude Rols nous a répondu qu’il n’avait « pas de position exprimable pour l’instant, l’Agence étant en cours d’examen des éléments liés à cette situation. » Et du côté du Conseil départemental, financeur de l’association, si on affirme ne pas avoir d’avis à donner sur les rémunérations, pour autant « on reste attentifs sur cette situation », affirme le vice-président délégué à l’autonomie des personnes âgées et handicapées Christophe Serre.
Thierry ALLARD