NÎMES OLYMPIQUE Polak, président des Gladiators : "Le boycott, ça nous déchire le cœur"
Alors que le Nîmes Olympique a bien débuté le championnat de Ligue 2, les tensions entre la direction et les associations de supporters restent exacerbées. Polak, le président des Gladiators Nîmes 1991, revient pour Objectif Gard sur la position du plus important groupe de supporters des Crocos.
Objectif Gard : On a revu les Gladiators investir le Pesage Est du stade des Costières samedi, pour le match contre Dijon (2-1). Comment avez-vous vécu ce premier rendez-vous de la saison ?
Polak : Au stade, tout le monde s'est régalé à pousser l'équipe. Ça fait plaisir de pouvoir retrouver notre passion. Même si nous sommes en conflit avec Rani Assaf, nous faisons la part des choses. Côté sportif, l'équipe répond présent et nous sommes même agréablement surpris par ses débuts.
La bâche des Gladiators était à l'envers. Qu'est ce que cela signifie ?
Dans le code des Ultras, il s'agit d'un geste de désapprobation qui vise en l'occurence la direction et sa politique tarifaire.
La saison dernière, les premiers matches étaient ouverts au public mais vous aviez annoncé ne pas vouloir y assister en raison des mesures sanitaires. Aujourd'hui, l'épidémie court toujours. Qu'est-ce qui justifie votre retour ?
Il y a un an, le port du masque était obligatoire et il fallait respecter les mesures de distanciations. Ce n'était pas compatible avec notre mode de supportérisme. Ces mesures ne sont plus obligatoires aujourd'hui, d'où notre retour. Quant au pass sanitaire, on estime que c'est à chacun d'exercer son libre arbitre.
Vous étiez donc au stade contre Dijon, mais pour le match face à Pau, vous appelez au boycott aux côtés des autres groupes. Pour quelle raison ?
Cela fait partie des actions que nous comptons mener pour protester contre la politique tarifaire de Rani Assaf (alors que les abonnements de la saison 2019/2020 n'ont toujours pas été remboursés, les places s'achètent désormais à l'unité à 15€ en Pesage Est, 20€ en tribune Sud et 25€ en tribune Nord, ndlr). Nous voulions être là pour le premier match et nous serons aussi du déplacement à Valenciennes car, encore une fois, on est derrière l'équipe. Que les choses soient claires : ce boycott nous déchire le cœur. On se prive de notre passion et je crois que c'est une première dans l'histoire de l'association. Mais on pense qu'il faut marquer le coup contre Pau.
Le président est le propriétaire économique du club, mais les supporters ont aussi une propriété affective à exercer. Avec cette politique tarifaire, Rani Assaf met de côté de nombreux étudiants, des personnes en situation de précarité mais aussi des familles. Or, le stade doit être un lieu où s'exprime la mixité sociale. Surtout, on trouve cette mesure illogique quand on sait qu'un projet de construction de nouveau stade est en cours. Quelle est la stratégie de Rani Assaf sinon de creuser un peu plus encore le fossé entre le club et ses supporters ? Si les jeunes et les familles n'ont plus les moyens de venir régulièrement encourager l'équipe, il est à craindre qu'un trou générationnel apparaisse chez les supporters.
Ce boycott a-t-il vocation à être reconduit ?
Non, c'est juste pour ce match. Ensuite, nous reviendrons au stade et nous envisagerons d'autres actions.
Avant même le début de la saison et alors que le Nîmes Olympique traversait une crise liée à la perte de l'agrément de son centre de formation, les Gladiators annonçaient ne plus faire confiance à Rani Assaf et ont réclamé son départ. Qu'en est-il aujourd'hui ?
On a été très clair : on n'adhère plus au projet de Rani Assaf, auquel nous avons pourtant longtemps cru. Petit à petit, il nous a montré qu'il amorçait une transformation totale de l'identité du club. Il a clairement déclaré qu'il s'en fichait des supporters. Enfin, sa vision entrepreneuriale du football ne nous convient pas. Lui soutient des modèles de championnats fermés comme la Super League qui sécurise les actionnaires, nous, nous pensons au contraire qu'il doit y avoir une prime au mérite et à la réussite sportive.
Votre défiance va donc bien au-delà de la politique tarifaire.
Bien sûr, mais, dans un premier temps, nous demandons qu'elle soit revue. Aujourd'hui, on se sent clairement visés. Rani Assaf veut isoler les Gladiators du reste du stade. Il ne laisse plus les supporters s'exprimer. Même pour faire passer une banderole au stade, c'est la croix et la bannière. Nous avons dû user de tous les stratagèmes possibles pour réussir à faire rentrer nos bâches contre Dijon. La saison dernière déjà, des banderoles ont été interdites. À l'entrée, les stadiers nous disent : "Pas de banderoles contre M. Assaf". Pourtant, on ne l'insulte pas, on exprime juste notre avis.
Dans ce climat délétère, une issue positive est-elle possible ?
De notre côté en tout cas, on fait la part des choses entre l'aspect sportif et nos désaccords avec la direction. On est derrière l'équipe qui a besoin de nous. On ne souhaite pas qu'elle se casse la gueule pour que le projet de Rani Assaf échoue, bien au contraire. Cette période est très difficile pour nous. Mais on ne lâchera pas, on sera toujours là. En Ligue 1 ou en Ligue 2, on restera toujours aussi passionnés.
Propos recueillis par Boris Boutet
Samuel Rancan, le responsable de la billetterie du Nîmes Olympique, ne fait plus partie de l'organigramme du club.