ALÈS Annie Chapelier aux agriculteurs : « Là-haut, ils ne comprennent rien ! »
Pour la députée de la 4ème circonscription du Gard, les jours se suivent et… se ressemblent. Depuis mercredi, elle a été prise à partie par les gilets jaunes en colère, puis par les commerçants agacés par le comportement des premiers (relire ici). Et ce matin, les agriculteurs sont venus clôturer cette semaine animée.
On ne s’ennuie pas cette semaine dans la rue Michelet à Alès, là où se trouve la permanence de la députée Annie Chapelier. À 10 heures ce vendredi matin, une trentaine d’agriculteurs et de viticulteurs est venue à sa rencontre pour lui demander quelques explications. « Elle nous a reçu à plusieurs reprises, et toujours très bien, mais là on en a assez d’être pris pour des cons », tranche Anthony Bafoil, co-secrétaire de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) et porte-parole du syndicat des vignerons du Gard.
Les manifestants reprochent à la députée de faire à Alès des promesses qu’elle ne tient pas à Paris : « Elle n’a pas voté l’amendement pour le maintien du dispositif TODE (travailleur occasionnel demandeur d’emploi, NDLR) et il est passé à une voix près. Les autres députés du Gard, eux, étaient là », poursuit Anthony Bafoil. Cet amendement permet aux employeurs du monde agricole de bénéficier d’exonération de charges sociales pour les travailleurs occasionnels. Ils sont 20 000 travailleurs saisonniers dans le Gard et, sans ce vote, « c’était 350€ perdu par saisonnier, soit 7 millions d’euros », affirme le représentant de la FNSEA.
« Il faut un changement complet du modèle agricole »
Comme elle l’a fait toute la semaine, Annie Chapelier est allée au devant des manifestants et s’est expliquée en dévoilant son calendrier : « Cet amendement devait être voté lundi. J’étais à la séance lundi soir, mais le vote a été repoussé au lendemain pour qu’il ne passe pas. Mais mardi, je suis rentrée à Nîmes pour enterrer un ami », explique-t-elle la voix subitement brisée et la larme à l’œil. Silence dans l’assemblée. Il ne dure pas bien longtemps.
Des voix s’élèvent, mais toujours dans le respect. « On crève la dalle dans l’indifférence générale », lance un homme visiblement à bout. Un viticulteur demande, lui, à ce qu’on ne stigmatise pas le vin lors des campagnes contre l’alcool. Un troisième apostrophe la députée : « Vous avez perdu un ami. Moi, j’ai perdu un frère qui s’est suicidé. Tous les jours, il y a un agriculteur qui met fin à ses jours et personne n’en parle ».
Annie Chapelier, qui a retrouvé sa voix, semble finalement dans son élément : « Vous savez, je suis une fille d’agriculteur et je sais ce que c’est que de travailler toute sa vie et de toucher 700€ de retraite », commence-t-elle avant de poursuivre : « Là-haut, ils ne comprennent rien. Il faut une remise à plat générale. Un changement complet du modèle agricole ». Vaste programme. Plus concrètement, la députée a assuré qu’elle enverrait un mail à Didier Guillaume, le ministre de l’Agriculture, avant de lui parler de la situation gardoise de vive voix mardi prochain, répondant ainsi à une demande des agriculteurs présents ce matin qui espèrent rencontrer leur ministre dans les plus brefs délais.
Tony Duret