ÉDITORIAL Barnier, la force tranquille
Aura-t-il le temps de mener jusqu'au bout ses propositions ? Tout cela ne tenant qu’à un fil…
Michel Barnier a passé son grand oral sans encombre. Hier, mardi. Devant les députés, du RN aux Insoumis. Sans trembler non plus. Avec une méthode bien différente de ses prédécesseurs. Nous sommes probablement de retour quelques décennies en arrière dans le style du Premier ministre, mais on a gagné une meilleure posture politique. Pas de grands discours, pas de grandes envolées. Pas de fioriture. Juste la vérité sur la situation et une humble envie de résoudre les défis immenses qui attendent le pays. Alors bien sûr, tout cela est réalisé sous le prisme d’un logiciel de Droite qui ne plaira pas à tout le monde. On peut toutefois espérer que le calme dont il fait preuve, l’absence de communication à outrance depuis son arrivée, offrent une capacité de dialogue avec toutes les sensibilités politiques qui composent l’Assemblée nationale. Ce n’est pas gagné certes. Il suffit de voir le comportement des députés LFI hier pour comprendre que la tâche ne sera pas aisée. Mais enfin, les autres mouvements politiques vont peut-être finir par se laisser séduire par ce Premier ministre différent. Qui n’a rien à perdre, tout à gagner. Et n'a pas les yeux fixés sur le calendrier présidentiel de 2027. Pour tenter d’offrir à la France des prochains mois plus sereins, le Républicain a esquissé quelques propositions savamment conservées à l’abri de tous. Face à une dette "colossale", il propose une réduction des dépenses et une hausse des impôts pour les "plus fortunés" et "les grandes entreprises." Pour éviter des remontrances de l’Europe, il prend l’engagement de ramener le déficit à 5 % en 2025 et de poursuivre les efforts avec une trajectoire de 3 % en 2029. Dans son discours, il a étonné par son engagement climatique. Rappelant les conséquences du réchauffement climatique, il assure que le gouvernement en fera une priorité absolue. Enfin, sur le sujet le plus polémique du moment, la réforme des retraites, il promet de "réfléchir à des aménagements justes et raisonnables." Il n’a pas oublié non plus le pouvoir d’achat des Français avec une hausse anticipée du SMIC de 2 % au 1ᵉʳ novembre. Certainement la proposition la plus symbolique et loin d’être à la hauteur des attentes. Mais Michel Barnier fait aussi avec une situation économique dont il vient d’hériter. Et veut probablement éviter de braquer les petites et moyennes entreprises déjà dans la difficulté. Il n’oublie pas non plus que son maintien dans sa fonction est conditionné au bon vouloir des Macronistes. Surveillé de près, il a voulu hier éviter la faute. C'est la raison pour laquelle, sur le volet sécuritaire, il s'est bien gardé d'en faire un peu trop, comme son (déjà) encombrant ministre de l'Intérieur. Il a promis des forces de l'ordre "encore plus visibles et présentes sur la voie publique", une réflexion sur l'excuse de minorité et la création de places de prison. Tout en reprenant une proposition forte du candidat Macron en 2017 : le recours au travail d'intérêt général et aux contraventions administratives. Aura-t-il le temps de mener jusqu'au bout ses propositions ? Tout cela ne tenant qu’à un fil…