FAIT DU JOUR Avec la ferme du Gubernat, le canard, c’est aussi dans le Gard !
On peut faire des produits à base de canard ailleurs que dans le Sud-Ouest, et même dans l’Est du Gard. C’est ici, à Saint-Laurent-de-Carnols, près de Bagnols, que la famille Vialle s’est lancée il y a pas loin de trente ans.
« Nous sommes les seuls à 300 kilomètres à la ronde ! », s’amuse Franck Vialle, à la tête de la ferme du Gubernat avec son épouse Anne et son fils Justin. Il est vrai que leur activité, le gavage, l’abattage de canards et leur transformation en foie gras, magrets, aiguillettes ou autres cuisses confites, n’est pas banale sous nos latitudes. Tout a démarré à la fin des années 1980, lorsque les parents de Franck Vialle, respectivement employé de banque et professeure d’anglais, lancent leur ferme-auberge, à Saint-Laurent-de-Carnols.
Le principe est simple : la famille sert sa propre production à ses clients. C’est la raison pour laquelle la famille Vialle commence à acheter des canards. « Une soixantaine pour la ferme-auberge, qui tournait pas mal », rejoue le fils, qui était à l’époque vigneron à Laudun. À la retraite des parents, au début des années 1990, la ferme-auberge cesse son activité, mais la famille décide de lancer une entreprise de produits à base de canard. Nous sommes en 1993.
Des clients prestigieux
Depuis, l’entreprise s’est bien développée, et fait tout sur place, sauf l’élevage, qui est un métier différent. Les canards viennent donc… du Sud-Ouest (tout de même). Aujourd’hui, la ferme du Gubernat produit « 4 000 canards par an, soit deux tonnes de foie gras », présente Franck Vialle. Le tout avec une ambition : « travailler un produit haut de gamme, tranche le gérant. C’est pour ça que nous travaillons avec des chefs. »
Et pas des moindres. La ferme compte parmi ses clients Pierre Gagnaire de l’Imperator, Vincent Croizard ou encore Damien Sanchez du Skab. Et hors des étoilés, la ferme travaille avec une dizaine de restaurants. Le reste de la production est vendu sur place, à la boutique, « et il y a de la demande, nous n’avons pas assez de production », avance Franck Vialle. Une production distinguée d’une médaille d’or Gard Gourmand en 2019 pour le foie gras, du reste.
Il faut dire qu’ici, tout est fait de manière artisanale, et que les produits sont travaillés non pas frais, mais extra-frais : « Nous abattons le lundi et le mardi, et le mercredi soir les clients sont livrés », présente le gérant. C’est notamment important pour le foie gras, car « plus on le travaille tôt, moins on a de fonte à la cuisson et plus on préserve les arômes », avance Justin Vialle. Ça a de quoi surprendre parfois : « Tous les restaurants ont l’habitude d’avoir le foie-gras à J+7 après l’abattage, nous c’est à J+2, donc la couleur est plus rouge, moins jaune », précise Franck Vialle.
« C’est un métier très prenant »
Concrètement, tout se passe sur place. « Le canard est en salle de gavage 12 à 14 jours et est nourri au maïs entier uniquement. Ça prend deux fois plus de temps qu’au maïs en purée, mais c’est aussi ce qui fait la qualité du produit », présente Justin Vialle. Le maïs est local, puisqu’il est cultivé près de Barjac, et l’exploitation en passe 35 à 40 tonnes par an. Quant à la salle de gavage, elle est hyper-ventilée, et les canards sont à quatre par cage.
Ensuite, direction l’abattage. « Le canard est étourdi par électronarcose, ce qui ne dure même pas cinq secondes, puis saigné, poursuit Justin Vialle. Il est abattu en même pas trente secondes. » Tout se passe dans le même bâtiment, sans transport. « Et nous sommes contrôlés deux fois par an, pour l’hygiène et le bien-être animal. Nous y faisons vraiment attention », ajoute Justin Vialle.
Après avoir été plumé et vidé, le canard part en chambre froide quelques heures avant la découpe et la transformation. Tout est fait ici, avec une cuisine ou encore un autoclave pour les conserves. « Et rien n’est automatisé ! », s’amuse Justin Vialle. Et aucun conservateur n’est ajouté, les dates limites de consommation y perdent ce que le goût y gagne.
Autant dire que « c’est un métier très prenant. C’est sept jours sur sept, 34 semaines par an », explique Franck Vialle, surtout en fin d’année, avec le rush des fêtes qui a d’ores et déjà commencé. D’autant que l’entreprise familiale est une petite PME, avec seulement un salarié à mi-temps en plus des trois Vialle. Mais familiale, la ferme le restera, puisque Justin Vialle se prépare à prendre la suite de son père. Dans l’entreprise depuis cinq ans, il a racheté les parts de son grand-père pour faire perdurer le savoir-faire familial.
Thierry ALLARD