Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 18.01.2021 - marie-meunier - 4 min  - vu 2532 fois

FAIT DU JOUR Covid-19 : 11 000 km séparent un couple attendant désespérément un visa

Christophe et Caren sont ensemble depuis deux ans. Ils se sont rencontrés aux Philippines, pays d'origine de Caren, et voulaient se marier là-bas mais la crise sanitaire a rebattu les cartes. (DR)

Depuis un peu plus de deux ans et demi, Christophe Vervacke, originaire de Connaux, et Caren, sa fiancée rencontrée aux Philippines, vivent une belle idylle. Ils avaient prévu de se marier pour concrétiser leur amour mais la crise sanitaire est venue s'en mêler. Alors que Christophe est rentré en France, Caren est toujours coincée à plus de 11 000 km de lui. Le couple cherche désespérément un moyen d'être réuni.

Il y a quatre ans le chemin de Christophe a croisé celui de Caren. Déjà installé depuis quelques mois aux Philippines, le Gardois, plongeur de métier, organise souvent des missions humanitaires pour nettoyer les fonds marins. C'est lors d'une de ces journées qu'il a rencontré Caren, native des Philippines. Elle lui a ensuite appris l'anglais et de fil en aiguille, ils sont tombés amoureux.

Le couple avait prévu de se marier aux Philippines avant l'instauration du premier confinement. La famille française de Christophe s'est rendue sur place pour célébrer leur union. Mais la cérémonie a été annulée car un document a été rendu en retard par les Barangays (unité administratives aux Philippines, NDLR). Début février, le président de la République philippin, Rodrigo Duterte, interdit les mariages et le pays finit par être totalement fermé.

La famille de Christophe s'était rendue aux Philippines juste avant le confinement pour célébrer le mariage du couple. Mariage qui n'a jamais pu avoir lieu. (DR)

Le couple est donc resté aux Philippines durant toute la crise sanitaire, dans sa petite maison sur l'île de Palawan. Mais là-bas, impossible de trouver du travail et les ressources des deux tourtereaux s'amenuisent de jour en jour. Christophe décide donc de rentrer en France régler quelques affaires et aussi travailler pour mettre du beurre dans les épinards.

Il pensait que sa conjointe pourrait le rejoindre rapidement mais il était loin de se douter qu'il se lançait dans un imbroglio administratif. Depuis un mois et demi, il est hébergé par des amis en Bretagne tandis que sa dulcinée est toujours aux Philippines, dans des conditions très difficiles.

"Depuis juin, on fait des pieds et des mains..."

Puisque Caren et Christophe ne peuvent se marier aux Philippines, ils souhaitaient le faire dans le Sud de la France, à Connaux. Mais le problème, c'est que sans bague au doigt, Caren ne peut obtenir de visa et donc ne peut être rapatriée en France. C'est le serpent qui se mord la queue... Christophe et sa famille font toutes les démarches pour tenter de la faire venir en France via un visa de fiancée.

"Stéphane Maurin, le maire de Connaux, nous a énormément aidés à faire les papiers. Depuis juin, on fait des pieds et des mains pour rassembler les documents pour qu'elle puisse rentrer en France", assure Dominique Vervacke, la maman de Christophe, qui réside dans le village gardois. Actes de naissance, domiciliation, us et coutumes et même RIB... "On a payé 140 € juste pour faire traduire les papiers là-bas", détaille-t-elle.

Depuis juin, Dominique Vervacke, la mère de Christophe, remplit et envoie des papiers aux Philippines pour tenter d'obtenir un visa pour Caren afin qu'elle vienne en France. Une énergie colossale, un dossier épais de plusieurs centimètres et d'importantes sommes dépensées, sans résultat pour le moment. (Marie Meunier / Objectif Gard)

Ses appels à l'Ambassade de France ne trouvent jamais d'interlocuteur. Seul le consulat philippin en France lui a répondu que la situation était verrouillée "sauf miracle". Mais Dominique a envie d'y croire encore. Tous les jours, elle envoie des messages sur WhatsApp à sa future belle-fille pour s'assurer que tout va bien, outre les 7h de décalage horaire. Il faut dire que les conditions de vie et les aides sont loin d'être celles dont on bénéficie en France...

"Elle maigrit à vue d'œil"

"Elle ne peut manger qu'un jour sur deux. Elle maigrit à vue d'œil", déplore Dominique Vervacke. Et Christophe d'ajouter : "Elle m'avait accompagné à Manille pour mon départ et demander un visa pour elle. Mais elle a dû rester deux semaines en quatorzaine avant de rentrer chez nous. Elle était logée dans une petite chambre d'hôtel minable, seule, avec le plafond qui tombe et les cafards qui courent au sol...". Le tout à ses frais bien sûr. Et à la fin, pas de visa...

Tout ce que Christophe gagne, il l'envoie à sa fiancée pour qu'elle survive. Mais la séparation devient insupportable et surtout, il ne voit pas d'issue. Il culpabilise de l'avoir laissée sur place mais il n'avait pas vraiment d'autre choix : "Il faut qu'on reste forts, on n'a pas le choix. Est-ce que j'ai bien fait de partir ? Mais si j'étais resté je n'aurais rien pu faire. Il fallait manger, le pays n'est alimenté que par les bateaux de ravitaillement. Ils vivent du tourisme et du coup, là, tout le monde crève la dalle." En plus, la saison des typhons débute aux Philippines. Encore moins rassurant. Pas plus tard que ce dimanche, des rafales allant jusqu'à 290 km/h ont été enregistrées au sud de Manille.

Jeudi, Caren a enfin reçu deux mails l'interrogeant sur sa situation maritale. Pas de suite depuis. Reste à savoir si c'est signe que la situation se débloque... ou pas. Le projet du couple de s'installer et de travailler ensuite en Suisse paraît très loin. "Le seul moyen qu'on aurait, ce serait de passer l'hiver ensemble en Turquie car le visa est plus simple à obtenir des deux côtés. En France, c'est encore ouvert", relate Christophe, bien conscient du caractère ubuesque de la situation. Mais il est prêt à tout pour retrouver celle avec qui il veut passer sa vie.

Marie Meunier

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