FAIT DU JOUR Le Gard rhodanien a du chemin à faire dans l’économie sociale et solidaire
La Chambre Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire (CRESS) du Languedoc-Roussillon tenait mardi matin une rencontre d’échanges sur le thème de l’économie sociale et solidaire et de la politique de la ville, à laquelle assistaient des élus et membres du monde associatif.
« L’économie sociale et solidaire, ce sont des entreprises en majorité non lucratives mais qui créent de l’emploi, affirme Muriel Nivert-Boudou, déléguée régionale de la CRESS du Languedoc-Roussillon. C’est près de 100 000 emplois en région, soit 12,5 % des emplois du Languedoc-Roussillon. » Voilà pour le poids, important, de l’économie sociale et solidaire dans nos contrées, sachant que la région est la quatrième de France dans le domaine.
L’ESS, késako ?
Mais qu’est-ce que l’économie sociale et solidaire, souvent dénommée par son acronyme ESS ? « Les entreprises de l’ESS doivent avoir une utilité sociale, suivre un guide de bonnes pratiques, qui est en train d’être établi. Le but poursuivi doit être autre que le partage des bénéfices, et la gouvernance doit être démocratique, selon le principe une personne = une voix, quel que soit le capital apporté », explique Muriel Nivert-Boudou. L’ESS est composée de coopératives, mutuelles, fondations, associations loi 1901 et, nouveauté issue de la loi datée du 2 août dernier, de sociétés commerciales agrées ESUS (entreprises solidaires d’utilité sociale).
Des acteurs économiques qui sont au cœur de « beaucoup d’initiatives dans les quartiers concernés par la politique de la ville », note Muriel Nivert-Boudou. D’ailleurs, une convention-cadre a été signée en 2013 pour « améliorer la connaissance de l’économie sociale et solidaire, créer de l’activité dans les quartiers, soutenir l’accès des jeunes des quartiers aux emplois de l’ESS et développer l’entrepreneuriat social et l’innovation sociale dans les quartiers. »
Pour autant, « contrairement aux idées reçues, l’économie sociale et solidaire doit avoir une appétence pour la politique de la ville, mais l’ESS n’est pas que l’économie du social » tempère Muriel Nivert-Boudou. De fait, ici comme ailleurs, l’ESS c’est aussi de l’enseignement privé, des banques, des assurances ou encore des coopératives agricoles.
« Un sous-développement endogène du secteur »
Mais où se place le Gard rhodanien en termes d’économie sociale et solidaire par rapport au Gard et à la région ? « L’ESS a un poids très réduit, il y a un sous développement endogène du secteur dans le Gard rhodanien », explique Osée Kougou, chargé de mission à la CRESS, venu rapporter une étude complète sur le sujet établie à partir de données de l’Insee.
Un constat étayé par les chiffres : l’économie sociale et solidaire emploie 7,1 % des salariés du Gard rhodanien, un chiffre qui grimpe à 12 % en moyenne dans le Gard et à 12,5 % à l’échelon régional. Idem pour la rémunération : dans le Gard rhodanien, la part de la rémunération brute venant de l’ESS est de 5,4 %, contre 10,1 % pour le Gard et 10,9 % pour la région.
Ces écarts de rémunération peuvent s’expliquer assez facilement par le fait que 77 % des structures de l’économie sociale et solidaire du Gard rhodanien sont des associations. Des associations souvent petites qui rencontrent fréquemment de grandes difficultés à financer des emplois salariés…
« Un potentiel à exploiter »
Au rayon des spécificités du Gard rhodanien, l’étude fait ressortir que les domaines de la santé et de l’agriculture - industrie notamment sont au dessus de la moyenne départementale et régionale en termes d’effectifs. Pour Osée Kougou, c’est le reflet « de la connotation industrielle et agricole du territoire. »
Une connotation qui pourrait expliquer le « sous-développement » de l’ESS dans le Gard rhodanien. Pour Osée Kougou, « ce n’est pas spécialement un territoire en retard, mais un territoire où le poids de l’ESS est réduit. L’industrie et l’agriculture sont plus développées qu’ailleurs. » On peut en déduire que le poids historique de l’industrie et de l’agriculture n’a pas aidé à développer l’économie sociale. Une caractéristique partagée « par certains territoires de l’Aude notamment », note Osée Kougou, qui reste optimiste : « il y a un potentiel à exploiter pour développer l’économie sociale et solidaire dans la Gard rhodanien. Il y a des possibilités de faire plus. »
Le Gard rhodanien aurait sans doute à y gagner : en France, le nombre d’emplois créés par l’économie sociale et solidaire a bondi de 24 % en 13 ans, soit 5 fois plus que hors ESS, « sachant qu’il s’agit d’emplois le plus souvent non-délocalisables », complète Muriel Nivert-Boudou. Sur le Gard rhodanien, le CRESS estime que 705 postes seront à pourvoir dans l’ESS d’ici 2020, rien que pour compenser les départs en retraite.
Thierry ALLARD