FAIT DU JOUR Les sœurs Aleksïïva : le rêve olympique pour oublier la guerre
Prodiges de la natation synchronisée, les jumelles Maryna et Vladyslava Aleksiïva, qui ont quitté leur ville de Kharkiv (Ukraine) bombardée, préparent les Jeux Olympiques à la piscine Nemausa de Nîmes. Elles rêvent de devenir championne olympique sous la bannière ukrainienne.
Chargée de s’occuper de trouver des lieux d’entraînements en France à des athlètes du monde entier en vue des Jeux Olympiques de Paris (26 juillet – 11 août), la société Spartner a sollicité Nîmes métropole pour accueillir à la piscine Nemausa les sœurs jumelles Maryna et Vladyslava Aleksiïva. Les Ukrainiennes âgées de 22 ans font partie des cadors de la natation synchronisée. Doubles championnes d’Europe, cinq fois championnes du monde, médaillées de bronze à Tokyo, elles rêvent d’être couronnées d’or cet été. « C’est déjà une fierté que notre pays soit représenté aux JO », attestent-elles.
L’Agglo a rapidement accepté de les accueillir et a mis à disposition gracieusement durant deux semaines, du 5 au 19 mai, l’équipement communautaire à raison de cinq heures d’entraînement par jour. À cette occasion, le président Franck Proust a remis un bouquet de fleur à chaque nageuse accompagnée d’un message de sympathie. « C’est un réel rayonnement pour le territoire, bonne chance pour les Jeux », a glissé l’élu nîmois. La perspective de briller aux yeux du monde et être le symbole de toute une nation permet d'oublier, un peu, la guerre qui fait rage dans leur pays depuis plus de deux ans.
Leur pisicine détruite
Maryna et Vladyslava sont originaires de Kharkiv, ville particulièrement bombardée par l’armée russe. « Quand la guerre a commencé, personne ne savait ce qu’il fallait faire. Au bout d’une semaine, notre entraîneuse nous a amenées en Italie. Notre esprit était occupé par quelque chose, la natation donnait un sens à notre vie », expliquent-elles avant de revenir à Kiev, la capitale mais aussi à Kharkiv, sous les bombes, où elles se trouvaient encore il y a à peine six mois. « Notre piscine et notre famille se trouvaient là-bas », justifient-elles. Leur piscine a fini par être détruite par les obus russes. Elles sont donc retournées à Kiev.
C’est un pléonasme de dire que ces conditions sont évidemment difficiles pour préparer une telle échéance sportive. Mais quelque part la guerre renforce leur motivation. « On a envie de montrer que l’Ukraine est un pays fort, indépendant et libre, capable de participer aux Jeux Olympiques. » À Paris, elles se présenteront en duo avec deux programmes prévus : l’un intitulé « War Story », en référence donc à la guerre et l’autre plus positif. Si dans le bassin, elles sont focus sur leur programme, dès qu’elles sortent la tête de l’eau, elle pensent forcément à leurs proches surtout quand elles se trouvent loin du conflit.
Le mari de Vladyslava ne peut pas sortir du pays
« Quand on est à l’étranger et qu’on lit les informations c’est un peu plus compliqué. On s’inquiète toujours. Quand on est sur place, on voit tout de nos propres yeux. » Une crainte permanente surtout qu’elles ont déjà perdu des amis et des camarades sportifs. « Certains sont décédés et d’autres sont sur le front », abonde Vladyslava. C’est le cas de son mari qui ne pourra pas venir la voir au centre aquatique de Saint-Denis car les hommes ont interdiction de quitter le pays. « Seule notre maman pourra peut-être venir », espèrent les sœurs. Cette délégation a apprécié la qualité de l’eau et de l’infrastructure nîmoise.
Ce dimanche, elles ont droit à une journée de repos et en profiteront pour aller découvrir le centre-ville de Nîmes. Après leur séjour dans le Gard, elles prendront la direction du Canada, pour participer à une manche de la Coupe du Monde. La dernière répétition officielle avant de plonger dans le grand bain avec le rêve de devenir championne olympique et de faire rayonner l’Ukraine sur le toit du monde.