Publié il y a 8 mois - Mise à jour le 04.03.2024 - Sacha Virga - 3 min  - vu 867 fois

L'INTERVIEW Nathalie Ravet, directrice de la Banque de France dans le Gard : "On peut voir du positif sur le pouvoir d'achat"

Nathalie Ravet, directrice départementale de la Banque de France

Nathalie Ravet, directrice départementale de la Banque de France

- Sacha Virga

Comme à la même période chaque année, le bilan de l'année écoulée et celui à venir sont présentés par la Banque de France. Sa directrice pour le Gard, Nathalie Ravet, éclaire un peu plus sur ce qui va attendre les Français pour 2024, tout en prenant des pincettes puisqu'un changement brusque est vite arrivé.

Objectif Gard : Vous attendiez que cette année 2023 soit plus difficile que prévue, dites-nous pourquoi ?

Nathalie Ravet : Dans nos prévisions, on avait anticipé à la fin 2022 qu'un ralentissement économique allait avoir lieu en 2023, mais la croissance au deuxième trimestre avec l'aide des exportations a été plus favorable qu'on ne l'attendait avec 2,5 %. Ce ralentissement a été perçu par les entreprises après l'été dernier, pour rentrer dans le dur fin 2023. La prévision de croissance a été un plus relevée que ce qu'on estimait fin 2022. Pour 2024, on pense qu'elle sera un peu plus molle, alors qu'on s'attendait à une reprise au vu du ralentissement. Le deuxième trimestre 2023 a été très favorable.

Vous expliquez aussi que les Français sont assez prudents avec leur épargne...

Pendant la crise, on a vu que le taux d'épargne avait atteint 21 % en moyenne. On a un repli de cette épargne, les Français en débloquent pour consommer, mais on reste à des taux entre 16 et 17%, bien supérieur au taux d'épargne que l'on avait connus à la période avant-covid. Supérieur parce qu'il y a des crédits, et la France est réputée pour être un pays avec beaucoup d'épargne. Cette évolution favorable est due, par exemple, aux taux bloqués du Livret A jusqu'en 2025 à 3 %. Avant ce blocage, les Français s'étaient déjà mis à épargner, le "quoi qu'il en coûte" a favorisé cela. Les gens ont aussi touché un salaire pendant le Covid, et cela leur a permis de mettre de côté, en raison des dépenses moindres qu'ils pouvaient avoir. Cela a eu des répercussions sur la restauration, qui est un peu plus en difficulté en raison du changement de mode de travail et du mode de vie.

Où en sommes-nous sur les prêts garantis par l'État (PGE) ?

Cela représentait 144 milliards d'euros, donc 11 milliards en Occitanie. 52 % des PGE en France ont été remboursés, un pourcentage plus faible dans notre région. Ce n'est pas négatif de dire qu'il y en a encore qui ne l'ont pas fait. Les PGE ont été faits à des taux relativement bas, les entreprises les ont consommés ou ont gardé de l'argent pour faire face à d'autres situations éventuelles. Certains ont étalé leur remboursement sur un certain nombre d'années possibles. Les entreprises qui sont en train de les rembourser peuvent avoir besoin de restructurer leurs PGE pour tenter de les alléger, une aide peut être apportée par la Banque de France dans le cadre de la médiation du crédit ou par le tribunal de commerce si on ne s'y rend pas trop tardivement, parce qu'une entreprise trop fragilisée ne peut plus s'en sortir.

Il y a aussi cette grosse augmentation du nombre de défaillances...

Oui, elles ont également explosé depuis la sortie de la crise sanitaire, même si on n'est pas sur des standards d'avant-covid. Les TPE y sont représentées à 90 % au niveau national. Lors de la reprise économique, il fallait regarder que les projets que ces entreprises avaient restent rentables. Certains ont réussi à répercuter les hausses qu'ils subissaient, d'autres non. En France, l'an dernier, les défaillances d'entreprises augmentaient de 35,6 %. Le Gard se situe en deçà de cette moyenne nationale avec +28,6 %. Par ailleurs, les délais de paiement ont tendance à s'allonger.

Les salaires sont-ils en adéquation avec l'inflation ?

Les chefs d'entreprises rentrent souvent en négociation salariales en fin d'année. En France en 2022, la hausse de l'inflation a été importante avec la guerre en Ukraine, représentant environ 10 %. Compte tenu des données : en 2023, il y avait 6 % d'augmentation salariale, en moyenne annuelle, le taux d'inflation était à 5,7 %. On estime que les hausses de salaire au niveau macro-économiques seront de 4 % en 2024 pour une inflation fin 2024 prévue à 2,5 %. La hausse des salaires sera donc supérieure à l'inflation.

Doit-on être optimiste pour le pouvoir d'achat en 2024 ?

On peut voir du positif sur le pouvoir d'achat. La demande intérieure va tirer la croissance cette année puisque les Français pourront consommer grâce aux hausses de salaires. On a d'ailleurs déjà remarqué une baisse de l'énergie, par exemple sur le gaz ou d'autres sources d'énergie. Si on regarde la compositon de l'inflation, l'énergie prenait une place énorme. En 2024, la part serait nulle et en 2025, elle serait même réduite. De nos prévisions, la part des services serait la plus importante, c'est celle qui a augmenté le plus tardivement avec la guerre en Ukraine. Les produits alimentaires ont explosé avec la crise agricole, les matières premières également. On vit dans un contexte d'incertitude. Chaque jour, les mauvaises nouvelles nous amènent à revoir nos prévisions, c'est pour cela que nous communiquons, chaque trimestre, une révision de nos prévisions.

Sacha Virga

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