L’INTERVIEW Thierry Desouches, porte-parole de Système U : “Si St Mamet n’avait pas été racheté, nous ne serions pas dans cette situation”
Le groupe Système U a prévu une rupture avec l’entreprise St Mamet à partir de fin février 2024. Cette décision désavantage fortement les agriculteurs de la coopérative Conserve Gard. Thierry Desouches, porte-parole de Système U, réagit.
Objectif Gard : Pourquoi avez-vous décidé de déréférencer la marque St Mamet de vos magasins ?
Thierry Desouches : Ceci est intervenu il y a déjà plus d’un an. C’est à cette période que Agromousquetaires, la filiale de production d'Intermarché, a décidé de racheter St Mamet. Cette marque nous fournit un bon nombre de produits. Et dans ce genre de circonstance, quand un de nos concurrents achète un de nos fournisseurs, il est de règle, chez nous, d'interrompre la relation commerciale.
Quand avez-vous choisi de rompre cette relation ?
Nous avons fait cette annonce il y a exactement 12 mois, en février 2023. Donc depuis un an, nous avons averti notre fournisseur, St Mamet, que nous interrompions notre relation commerciale. Il est clair que cette situation ne vaut pas que pour St Mamet. Par exemple, quand le groupe Intermarché a repris une conserverie de poisson en Bretagne, Capitaine Cook, nous avons arrêté de vendre les produits de cette marque. Quand une entreprise qui était indépendante rejoint l’un de nos concurrents, nous ne souhaitons pas leur apporter notre chiffre d'affaires.
Donc vous avez prévenu la marque depuis un an et non depuis le mois dernier ?
Oui, le délai a été respecté. Nous avons prévenu les propriétaires de l’usine St Mamet que nous arrêterions la collaboration en février 2024 et ce courrier date de février 2023. On aurait fait ce préavis d'un mois, nous serions attaquable juridiquement. Lorsqu’on travaille avec un fournisseur depuis des années, nous ne pouvons pas dire du jour au lendemain, “on arrête de travailler avec vous”. Si nous avions procédé ainsi, St Mamet pouvait nous attaquer en justice. Nous avons tout fait dans les règles, en respectant les délais légaux.
Est-ce que vous comprenez la surprise de cette décision pour la coopérative Conserve Gard ?
Le repreneur de St Mamet, le groupe Intermarché, n’est pas surpris de notre démarche. Il savait que nous n'allions pas rester au sein de St Mamet une fois qu’il l’aurait racheté. Donc, ils avaient l'information depuis plus d’un an. Est-ce qu’ils l’ont communiquée à Conserve Gard ? Système U ne le sait pas. Cette situation quitte nos prérogatives et ce n’est pas à nous de faire ce genre de démarches.
Donc cette situation ne vous concerne plus ?
Du point de vue du droit, ce n’est plus notre affaire. Simplement, nous avons bien entendu les représentants de la coopérative Conserve Gard et la difficulté dans laquelle ils se trouvaient. Cependant, nous n’avons pas une entière responsabilité mais le repreneur en a une. Nous avons quand même pris contact avec Monsieur Guaquiere, le président de la coopérative, pour voir comment nous pourrions essayer de trouver des solutions. Aujourd’hui, le but n’est pas de trouver un coupable, mais bien de trouver des solutions.
Et quelles sont-elles ?
Les solutions peuvent passer éventuellement par les magasins U que nous avons dans la région gardoise. Cela peut être une solution pour écouler une partie des volumes. Nous avons également un nouveau fournisseur, la société Rochefontaine. Alors, nous avons invité Monsieur Guaquiere à se rapprocher de Rochefontaine pour voir s’il pourrait y avoir des solutions éventuelles. Nous essayons de rapprocher les gens pour faire en sorte que ça puisse peut-être se transformer en débouchées positives. Mais nous n’avons pas la solution à une situation que nous n’avons pas provoquée. En effet, si St Mamet n’avait pas été racheté par Agromousquetaires, nous ne serions pas dans cette situation. La solution n’est pas uniquement entre nos mains, le nouveau propriétaire de St Mamet peut aussi en trouver de son côté.
Système U a-t-il compris le désarroi des agriculteurs gardois ?
Bien sûr ! Nous ne pouvons pas dire d’un côté que nous essayons de privilégier la production française et laisser cette situation sans au moins une écoute et un début de réponse. Très rapidement, un contact a été pris avec Conserve Gard et nous essayons de faire bouger les choses avec notre nouveau fournisseur Rochefontaine.
Êtes vous au courant que la plupart des fruits de votre nouveau fournisseur, la société Rochefontaine, ne sont pas français ?
En effet, une partie ne sont pas d’origine française, nous le savons. Le problème c’est qu’en France, très peu d’entreprises font ce genre de produit. Rochefontaine est la seule qui a les volumes dont nous avons besoin pour nos magasins. Notre relation avec cette société est très récente, mais nous allons essayer de faire en sorte qu’il y ait le plus possible de fruits français dans les conserves. Mais c’est délicat. Autant avec les anciens propriétaires de St Mamet, la relation était installée depuis longtemps donc nous faisions un travail en commun, autant là nous venons d’arriver. Nous ne pouvons pas leur demander du jour au lendemain de travailler autrement.