NÎMES Au Chemin Bas, la peur de retourner à l'école
Ce lundi matin, seulement 35 élèves sur 251 et quatre enseignants sur 19 sont retournés à l'école Georges-Bruguier
Voilà où nous en sommes aujourd'hui au quartier nîmois du Chemin Bas. L'insécurité liée au trafic de drogue est telle que les parents ont peur d'envoyer leur enfant à l'école et les enseignants de les instruire. Un climat d'insécurité qui n'est pas nouveau malheureusement mais la crainte de prendre une balle perdue à n'importe quel moment de la journée est à son paroxysme depuis les récents événements.
Le 10 février, une fusillade a éclaté à l'heure où les enfants sortaient de l'école. Miraculeusement, alors qu'une balle a terminé dans l'appui-tête d'une automobiliste, aucune victime n'a été à déplorer. Mardi dernier, à 21h30, c'est un homme de 39 ans qui a été tué devant son fils de 8 ans. La peur est grande et ce lundi matin, beaucoup de mamans l'ont fait savoir, devant les grilles de l'école, en s'adressant à Mathias Nieps, sous-préfet chargé de la politique de la Ville.
"On a la boule au ventre, on vit avec cette peur"
"On les laisse aller à l'école mais on n'est jamais tranquille, mon fils est stressé", fait savoir une première mère de famille. "On a la boule au ventre, on vit avec cette peur", complète une deuxième. Le sous-préfet tente de les rassurer comme il peut en leur expliquant les moyens de sécurisation mis en place en évoquant les résultats des différentes forces policières mobilisées, "plus de 15 personnes présumées membres de commando ont été interpellées et écrouées".
Cela ne semble pas les convaincre pour le moment puisque seulement 35 élèves sont venus à l'école ce lundi matin sur un effectif total de 251. Une présence très faible également du côté des enseignants où seulement quatre sur 19 se sont rendus au sein de l'établissement. Certains sont en arrêt, d'autres exercent leur droit de retrait. "On a peur de faire des sorties scolaires", lâche une enseignante marquée par l'image de voir l'une de ses collègues traumatisée après avoir été à proximité de la fusillade en pleine journée avec ses élèves.
Un portail électrique et une nouvelle entrée
Depuis ce matin, l'entrée de l'école a été modifiée pour les enfants de maternelle. Ils rentrent et sortent désormais au même endroit que les élèves du primaire, au 10 rue du commandant l'Herminier. Les horaires de cours en revanche ne bougent pas. D'ici la rentrée prochaine, la ville de Nîmes investit pour créer une plate-forme à cette nouvelle entrée avec un intérieur aménagé.
En premier lieu, c'est un portail électrique qui va être bientôt installé pour éviter que le personnel soit obligé de descendre de véhicule, comme c'est le cas aujourd'hui, pour se garer dans l'enceinte. À la municipalité, on regrette d'ailleurs ne pas avoir été convié à une réunion de sécurité en préfecture, la semaine dernière, avec les enseigants. "C'est navrant alors que le personnel de mairie prend des risques et qu'il a toujours répondu présent", constate amer un responsable.
"L'école n'a pas être déplacée"
Devant l'entrée générale, les mamans sont inquiètent. Certaines, résignées, demandent carrément "de délocaliser l'école car le trafic de drogue ne cessera pas" mais cette solution radicale ne fait pas l'unanimité. Elle ne semble pas aussi à l'ordre du jour chez les décideurs à l'image de Christophe Mauny, Dasen du Gard, présent également ce matin. "Clairement ce n'est pas une solution à l'étude. Il ne faut pas céder un pouce de terrain aux trafiquants", confie Mathias Nieps.
Même son de cloche pour Véronique Gardeur-Bancel, adjointe à la Ville chargée de l'éducation : "l'école n'a pas être déplacée, ce sont les dealers qu'il faut virer de là. L'école est sécurisée mais c'est dès que l'on sort...". "L''école était là avant et sera là après", martèle la directrice Élodie Pascal alors que deux remplaçantes arrivaient autour de 8h20. Le peur de venir travailler se ressent aussi chez les agents de la mairie annexe qui jouxte l'école.
"Les usagers eux-mêmes nous disent de ne pas venir travailler"
"Durant les deux semaines des vacances, on a vu qu'une fois les policiers", reproche une agent qui hésite à exercer son droit de retrait ainsi que ses collègues. "Les usagers eux-mêmes nous disent de ne pas venir travailler", ajoute t'elle. Et surtout l'inquiètude de voir cette situation s'ancrer dans le temps, "la guerre des territoires ne fait que commencer", se soucie la directrice qui invite ces agents municipaux à venir rencontrer le Dasen et le sous-préfet. "Qu'est-ce que vous risquez ?""Au point, où on en est plus rien ! À part de prendre une balle", conclut la fonctionnaire.
Retrouvez ci-dessous l'interview vidéo de Mathias Nieps :