SAINT-NAZAIRE Joémi Beltramo, jeune beatmaker disque d'or
Joémi Beltramo passe des journées entières, seul dans son studio aménagé à l'étage, sous les combles de la maison familiale à Saint-Nazaire, à côté de Bagnols-sur-Cèze. Et pour cause, le jeune homme de 24 ans s'est lancé dans un métier qui l'absorbe pendant des heures sur son écran : beatmaker. En clair, il compose des sons pour des artistes, qui y apposent leur voix. Le Gardois, connu le surnom Jolly Roger dans le milieu, a déjà de belles collaborations à son actif.
Joémi a toujours baigné dans l'univers de la musique. C'est même le métier de son père qui joue du tuba et du trombone. Dès 4-5 ans, il entre au conservatoire de Bagnols-sur-Cèze et s'essaie à la trompette puis à la batterie. Pendant ses études supérieures, impossible de transporter son instrument à percussion. "C'est là que j'ai appris à faire de la production, de la musique sur ordinateur", indique-t-il.
Ce qui n'était qu'une activité en dilettante est devenue une priorité. Après un DUT "élec", Joémi s'oriente vers une école pour devenir ingénieur dans le nucléaire en alternance. Il n'accroche pas vraiment, mais c'est véritablement l'arrivée du covid-19 qui va avoir un effet déclencheur. Plongé en télétravail, ses perspectives d'avenir toutes tracées à Tricastin s'éloignent. Le jeune homme accorde de plus en plus de place à la musique. Jusqu'à se rendre compte que c'est cela qu'il veut faire.
"Il faut de l'énergie ou de l'émotion"
Lors de ses précédents passages à Paris, il a noué quelques contacts. Joémi finit par se faire repérer par le rappeur Rilès. Il cosigne finalement dans son label Rilèsundayz et avec Sony : "L'avantage, c'est que je peux être en contact avec de gros artistes. C'est aussi Sony qui paye les sessions studio." En échange, les trois co-signataires se partagent les droits d'auteur. À savoir qu'un beatmaker ne touche un cachet que lorsque le son sort. De nombreuses productions sont réalisées avant qu'une piste soit validée. En moyenne, Joémi passe 3-4h à élaborer un son, grâce à son logiciel MAO (maintenance assistée par ordinateur) qui réunit des milliers d'instruments et de sonorités : "J'essaie toujours de me renouveler. Je commence toujours par la mélodie puis viennent le rythme, les basses..."
Il alterne entre "formats tubes" qui rentrent dans le moule et les codes de la radio, et créations plus détonantes. Spécialisé dans le rap, Joémi incorpore aussi des vibes R'n'B, afro voire zumba. "Même si les accords sont simples, il faut de l'énergie ou de l'émotion", atteste-t-il. Parfois, il fait écouter une production qui plaît à un artiste et ce dernier appose sa voix dessus. Parfois, il élabore directement le son en collaboration avec l'artiste en studio.
Une collaboration avec ZKR sur un album certifié disque d'or
"La musique, c'était un rêve quand j'étais petit. La concurrence est rude, personne ne compte ses heures, souvent solitaires. C'est pour cela que j'aime bien aller en studio pour partager. Mais quand je signe avec un artiste, cela me redonne de la force", narre Joémi. Il y a quelques mois, un de ses sons a été choisi par le rappeur ZKR. Il accompagne les paroles de sa chanson À l'arrêt, un morceau de 3'12 qui a fait 600 000 vues sur YouTube, sans clip. Pas mal, mais ce n'est pas tout. Le son figure dans l'album Dans les mains, sorti en 2021. Il sera vendu à plus de 50 000 exemplaires et certifié Disque d'or trois mois plus tard. Depuis peu, Joémi affiche fièrement la récompense rutilante sous cadre dans son studio.
Pour le mois de juillet, le Saint-Nazairien se donne l'objectif de faire écouter plein de sons et de cibler de gros rappeurs pour de futures collaborations. Il compte aussi apprendre à jouer du piano et de la guitare pour élargir sa palette de beatmaker, "humaniser" sa musique et aussi gagner en légitimité. Il a encore de belles choses à montrer.
Marie Meunier
Vous pouvez suivre Joémi Beltramo sur Instagram en tapant Jollyroger.beats.