FAIT DU JOUR Dans le ciel comme au sol, la Sécurité civile s'apprête à lancer sa saison
La Sécurité civile est en train de se préparer car la saison des feux de forêt approche à grands pas. Nîmes accueille la plus grande base de la Sécurité civile en France et compte bien en faire la figure de proue de la lutte européenne face à des incendies qui grignotent chaque année un peu plus la végétation du Vieux continent.
Nîmes est bien placée, au centre de l’arc méditerranéen, et pourrait bel et bien jouer un rôle majeur dans cette lutte qui concerne tous les pays européens. Quand on dit Nîmes, c’est pour raccourcir car certains parleront de Garons et d’autres de Saint-Gilles. Les querelles territoriales sont loin d’être au centre des débats, il faut voir plus loin, bien plus loin, au-delà des clochers mais aussi par-delà les frontières.
« L’été, c’est l’immédiateté », avoue un responsable. En effet, l’été, les sols sont secs et si le vent se lève, les dégâts peuvent être rapides et nombreux.
Comme en 1989 où l’année avait été dramatique, 2022 a franchi un cap. Depuis cinquante ans, elle fait partie des dix pires. En France, plus de 72 000 hectares (19 711 incendies) ont brûlé et quelque 8 600 largages qui ont été effectués durant les 3 800 heures de vols des Canadair et Dash. Avant ces largages, les 19 avions bombardiers d’eau engagés ont dû écoper en mer ou sur des lacs.
Une nature dévastée mais seulement quelques maisons parties en fumée. Pas même une victime n’a été à déplorer. Le savoir-faire des pompiers du ciel, appuyés par ceux qui restent au sol, est réel dans notre pays et encore plus dans notre région.
Pour ce même responsable, « Un feu, c’est un échec. Un échec de sensibilisation, un échec de prévention. À chaque incendie, notre objectif est d’attaquer le feu le plus rapidement possible, en moins de dix minutes si les enjeux sont importants. »
Il faut dire que 90 % des deux ont été éteints avant qu’ils ne brûlent cinq hectares sur plus de 12 000 départs d’incendies. Mais pour avoir une telle puissance de feu avec l’eau, il faut mettre les moyens humains, techniques et technologiques et donc, financiers.
Le but de la Sécurité civile et des pompiers est d’arriver sur le feu en moins de sept minutes. Si l’on veut réduire d’une minute ce délai, il faudrait doubler les moyens humains et financiers. « Si on rate les cinq hectares, on doit attaquer de manière massive avec 20 avions de notre base nationale et 22 hélicoptères et avions loués par les SDIS français. Avec cela, on arrive à contrôler un feu allant jusqu’à une centaine d’hectares. » Une fois ces moyens de lutte dépassés, tout se complique pour lutter de manière efficace. Alors, il faut que la Sécurité civile et les pompiers se réorganisent et usent du brûlage tactique, de la séparation du combustible et de la protection des lieux sensibles. « On attend d’être en meilleure position que l’incendie. »
En 2022, 90 % des dégâts ont été faits par neuf ou dix grands incendies. Même avec l’aide de la coopération européenne comme ce fut le cas en Gironde (six pays engagés en renfort) cela n’a pas empêché le feu de manger 25 000 hectares.
Cette année, la campagne de lutte contre les feux de forêt sera lancée du 1er juin au 30 septembre avec des ajustements si le besoin s’en fait ressentir. Il se pourrait bien que tout démarre plus tôt car les nappes phréatiques sont basses et que la végétation est sèche. En tout et au groupement de la mission d'appui de Sécurité civile ce sont 470 personnes qui œuvrent dans l’intérêt de tous.
À Nîmes, la base est équipée de 12 Canadair CL-415, 8 Dash 8 Q400MR, 3 Beechcraft 200 Super King Air et des hélicoptères EC 145. Les Canadair sont utilisés en noria de quatre pour être le plus efficace possible car les deux ou trois premiers passages servent à refroidir l’incendie et l’eau larguée s’évapore quasi instantanément. C’est seulement au bout de 25 tonnes d’eau larguée que l’eau devient efficace.
Jamais ou très rarement ce matériel est réuni et utilisé de manière simultanée. Dans ce monde, l’entretien prend une place unique. Ici, la sécurité passe avant tout. C’est pour cette raison qu’en hiver la maintenance est lourde, très lourde. Et en saison, on parle de rénovation toutes les X heures de vols. À cela viennent évidemment s’ajouter les problématiques courantes de chocs, de coups, de casse. Les Canadair, par exemple, sont souvent bloqués en maintenance, même en été mais les mécaniciens bossent jour et nuit afin que les pélicans sauvent des vies.
Plus produits depuis une quinzaine d’année, les Canadair connaîtront bientôt une nouvelle vie. Mais en attendant, il faut trouver des pièces et cela aussi prend du temps. Pour en gagner un peu, pour prévenir avant de guérir, il faut connaître les sols et le temps. C’est là que Météo France apporte sa pierre à l’édifice mis en place. Le canevas se resserre et chacun en sait plus sur ce qu’il faut faire.
Les secteurs sensibles ou secs sont mieux repérés pour être au plus proche des réponses à apporter sur le terrain. L’Office national des forêts est, lui aussi, entré dans la danse.
Dans notre grande frange sud, on compte 35 départements pour lesquels les équipes nîmoises peuvent attaquer les feux le plus vite possible. Sur ces zones, Météo France et l’ONF ont détaillé 211 secteurs, parfois avec une précision de 100 m2.
Mais la Sécurité civile n’agit que rarement seule. Elle a besoin, au sol, de l’action des pompiers. En France, 51 colonnes (sept donc 500 sapeurs-pompiers de plus qu’en 2022) de camions spécialisés dans l’extinction des feux de forêt vont faire en sorte d’aller encore plus vite et d’être plus près. En tout, il y aura 3 500 personnes mobilisées, mais on peut vite monter à plus de 10 000 pour prêter mains fortes à la Sécurité civile.
« Avec les 150 millions investis par l’État français, nous aurons plus de 1 000 camions supplémentaires, ils viennent compléter les 4 000 déjà existants, c’est un quart de nos forces ! Il faut dire que les SDIS ont une constante augmentation de leurs interventions de l’ordre de 5 à 6 % par an… » Un rattrapage nécessaire.
Dans le Gard, le SDIS prévoit de doubler l’activité et en conséquence le nombre de personnels cet été. Le Gard a connu 2 200 départs d’incendies l’année dernière. Le travail pour sauver les 16 500 hectares ravagés par les flammes (forêts et végétation) représentent plus de 50 800 heures d’interventions. Chaque jour, en comptant les repos et tout le reste, les pompiers gardois sont environ 50 % à pouvoir partir au feu. « Nous allons louer deux hélicoptères bombardiers d’eau pour gagner du temps et approcher au plus près des débuts d’incendies. L’an dernier avec ces deux hélicos, nous sommes allés sur 200 feux et avons procédé à 1 000 largages. »
La base aérienne de Sécurité civile de Nîmes et un exercice en images :