FAIT DU JOUR On a testé la ligne Nîmes-Dublin
Avec 15 312 passagers transportés entre début mai et fin octobre 2023, la ligne Nîmes-Dublin fait figure de Petit Poucet dans le trafic aérien. Objectif Gard a pris une valise de 55 cm - pas plus - et enfilé un coupe-vent pour rejoindre cette petite capitale très animée qui échappe au surtourisme. Mais est-ce vraiment moins cher de voyager avec Ryanair ? Quels sont les pièges à éviter ? Que voir à Dublin ?
« I fly high in the skYYY”, “I fly high in the skYYY ». En ce mercredi de printemps, une petite voix chantonne en Anglais : « Je vole haut dans le ciel. » Coloriages, pâtes à modeler, la maman de cet Irlandais a déployé toute la panoplie mais, au bout d’1h30 de vol, elle ne peut empêcher ce concert improvisé. Le ton enjoué de ce petit âgé de 4 ans déride une dame un peu contrariée car elle n’a pas pu s’asseoir à côté de son amie. Elle ne devait pas savoir que chez Ryanair, si on veut voyager à côté de ses proches, il faut payer un surcoût.
Une douche explosive
« I fly high in the skYYY ». L’excitation du petit Irlandais amuse aussi un adolescent français de 12 ans. Il en oublie presque ses péripéties matinales. Lorsque ce blond aux yeux bleus s’est présenté à la zone de contrôle de l’aéroport de Nîmes pour embarquer, les agents de sécurité l’ont bloqué. Ses papiers et sa valise étaient en règle mais lui était positif aux explosifs ! Un passage, deux passages sous les détecteurs et toujours la même sentence : positif. La maman a été interrogée et ses réponses soigneusement notées : quels sont ses loisirs ? Quelqu’un a-t-il touché ses affaires ? Qu’a-t-il fait avant de venir à l’aéroport ? « Il a pris une douche », a répondu la maman. Et voilà, le coupable identifié : c’est le shampoing-douche à la camomille. Certains produits cosmétiques possèdent des composés similaires à ceux utilisés dans certains explosifs.
Atterrissage
« I fly high in the skYYY ! », chantonne encore le petit garçon en regardant, par le hublot, les paysages verts qui commencent à apparaître. Il finit par réveiller un grand brun qui s’était assoupi dans la travée voisine. Lui voulait s’occuper dans l’avion en lisant un journal. Mais impossible d’en trouver un à l’aéroport. Il n’y a qu’une seule boutique dans l’entrée de l’aérogare. Elle propose du snacking et des mots croisés… « We are landing. Nous atterrissons ». Une hôtesse, avec un accent irlandais, invite à boucler sa ceinture. Le petit Irlandais stoppe sa mélopée. Il est 10h45, heure française, 11h45, heure irlandaise, l’avion se pose à l’aéroport de Dublin. En à peine 2h, on a quitté les champs d’oliviers tourmentés par le Mistral pour des étendues d’un vert intense. Changement d’ambiance : l’aéroport est immense. On marche, on marche. De l’aéroport, on peut prendre un bus à 7 € par personne pour rejoindre le centre-ville. Mais lorsque l’on voyage en famille, le plus simple est de prendre un taxi. Pour une vingtaine d’euros, on rejoint en une vingtaine de minutes la partie nord de Dublin. Mais quand on grimpe à l’intérieur, on est déstabilisé en voyant le chauffeur s’installer à droite.
Climat chaleureux
Le guide Lonely planet assure que les Irlandais sont « accueillants ». Survendeur ? Pas du tout. Quand des Dublinois aperçoivent des familles esseulées avec des bagages dans une rue, ou sceptiques face à des horaires de train de banlieue, ils n’hésitent pas à venir leur demander si tout va bien, à leur conseiller un pub où se mettre au chaud… Quatre jours plus tard, il faut déjà quitter cette ambiance chaleureuse. Le dimanche matin à 6h25, pas mal de passagers du vol aller se retrouvent à l’aéroport de Dublin pour prendre l’avion retour.
Une fois posé à Nîmes, à 11h40 heure française, on ne pense qu’à une chose : réserver des billets pour explorer les côtes irlandaises du côté du lac du Connemara, à l’Ouest de la péninsule. Mais cette fois-ci, on prendra le taxi ou la navette pour rejoindre l’aéroport de Nîmes. Le tarif du parking, 78 € pour quatre jours, était plus cher que le prix du billet aller…
Billets : attention aux tarifs affichés
Est-ce très avantageux de voyager sur Ryanair ? Vendredi 26 avril, en fin de matinée, Objectif Gard le magazine fait une simulation pour des dates au hasard. Départ le mercredi 29 mai et retour le dimanche 2 juin. Le billet aller s’affiche à 12,99 € et le retour à 89,86 €. Les tarifs varient en fonction de la date prévue et du jour où on réserve.
12,99 € pour parcourir 1 800 km, cela fait rêver. Mais pour ce tarif, on peut simplement voyager avec un sac à main ou un petit sac à dos à placer sous le siège avant. Pour emporter un bagage cabine de 10 kg, il faut rajouter 33,25 €.
Réserver son siège
En payant ce supplément, vous pourrez aussi réserver votre siège. Si les autres membres de votre famille ont eux aussi payé le surcoût, vous pourrez choisir des sièges voisins. On peut sélectionner soi-même les places sur le schéma de l’avion. Attention. Seules certaines zones sont en placement gratuit. Pour accéder à certains sièges, il faut verser un surcoût variant entre 2 et 13 €. Pour placer une valise en soute, comptez 18,99 € pour 10 kg et 24,49 € pour 20 kg. L’assurance annulation basique qui couvre aussi les bagages et « dépenses médicales » est facturée 15,70 €. Vous n’aurez pas le temps de vérifier si tout cela n’est pas déjà couvert par votre propre assurance responsabilité civile, car si on ne valide pas très vite, Ryanair envoie un message signalant qu’il ne reste que quelques minutes avant qu’il vous déconnecte.
Témoignage
« 11 000 Français sont déclarés au consulat d’Irlande »
Originaire de Salindres, Nicolas Nouelle-Parrat, est chauffeur à l’ambassade de France de Dublin. Il a aussi été élu conseiller des Français de l’étranger en Irlande.
Il y a 20 ans, Nicolas Nouelle-Parat, titulaire d’une maîtrise de communication, prend un billet pour l’Irlande afin d’améliorer son niveau d’Anglais. Il maîtrise désormais parfaitement la langue. Il peut même trinquer dans un pub et souhaiter la bienvenue en gaélique. Mais il n’est jamais reparti d’Irlande où il est chauffeur à l’ambassade de France. Il fait même partie des quatre personnes élues "conseiller des Français de l’étranger".
Combien y a-t-il de Français en Irlande ? « 11 000 personnes se sont déclarées au consulat. Mais on estime peut-être qu’il y a 15 000 à 20 000 Français qui vivent en Irlande, principalement à Dublin et à Cork », précise-t-il. Parmi eux, on trouve pas mal de jeunes qui travaillent pour les géants américains Google, Paypal, Aibnb, Amazon… « Ces sociétés ont leur siège européen à Dublin et font travailler des Français pour le marché français », précise-t-il. Certains sont chargés de répondre en Français au service client. Beaucoup de Français sont aussi présents dans le secteur de l’hôtellerie-restauration. « Beaucoup de jeunes viennent travailler en Irlande car c’est le seul pays anglophone membre de l’union européenne », observe-t-il. Avant le Brexit, les jeunes Français pouvaient facilement travailler quelques mois en Angleterre. Terminé. Aujourd’hui, il faut des visas. Le post-Brexit a donc été favorable à l’Irlande. Un peu trop peut-être. « À Dublin, on n’arrive pas à absorber l’ensemble de ces jeunes. Cela a accentué la crise immobilière », analyse-t-il. La ville est devenue « extrêmement chère » : il faut compter « entre 1 000 et 1 200 € » pour une chambre en centre-ville.
Très accueillants
Nicolas Nouelle-Parat avait réussi à s’acheter un appartement dans le quartier de Temple Bar, avant cet afflux. Il adore le côté très accueillant des Irlandais : « Ils sont super serviables, très positifs. Très facilement ils vous offrent un verre, juste comme cela. » On peut aussi facilement vous faire un compliment sur votre tenue dans le bus, juste par gentillesse. Nicolas Nouelle-Parat devait garer son vélo derrière une porte très lourde : « Huit fois sur dix quelqu’un venait me tenir soit le vélo, soit la porte pour que je puisse entrer. » Un jour, il est gêné par des poubelles pour faire un créneau en voiture. Des dames les déplacent aussitôt. « Au quotidien c’est vraiment très agréable, admet-il. Les gens de tous les âges sortent beaucoup dans les pubs. Pour la communion du petit, après la messe, ils vont au pub. C’est là que vous rencontrez d’autres personnes ».
S’il apprécie toute cette chaleur humaine, la chaleur tout court lui manque. Sa famille est originaire de Salindres. Si lui a régulièrement déménagé pour suivre un père militaire, il passait quasiment toutes ses vacances chez ses grands-parents maternels et paternels sous le soleil gardois. « Le temps change tout le temps en Irlande. En été, il fait 15 à 20° avec des pointes à 22-23° », décrit-il. Dans un éclat de rire, il précise que la « canicule » irlandaise se situe à 25°. Quand le vent frais devient trop pesant, Dublin propose une excellente alternative : son immense aéroport. « On peut aller partout en Europe, reconnaît-il. Je pars facilement deux week-ends par mois ».
Ses bonnes idées
- Le petit cimetière huguenot à côté de Saint Stephen’s Green. Fondé en 1693, il abrite 239 tombes de huguenots français ayant fui les persécutions après la révocation de l’édit de Nantes.
- Le « General Post office » qui abrite un musée, est le lieu où a été lue la proclamation de la République d’Irlande en 1916. Les leaders indépendantistes ont ensuite été enfermés dans la prison de Kilmainham Gaol qui se visite aussi.
- Pour découvrir un vrai pub irlandais, inutile d’aller dans les secteurs les plus touristiques, on pousse simplement la porte à côté de son airbnb.