FAIT DU JOUR Un Noël "Made in Gard"
Comment soigner la planète tout en soutenant l’énergie et la créativité de l’économie locale ? C’est simple. Il suffit d’offrir des cadeaux de Noël fabriqués dans le Gard. Et le choix ne manque pas. Dans un coin de la colline de Montaury, des métiers à tisser façonnent de la toile de jean pour les Ateliers de Nîmes… À quelques centaines de mètres de là, derrière ses machines à coudre, Sandrine Schlup crée des sacs colorés aux finitions soignées… À Aigues-Vives, 17 artisans fabriquent des chaussures inusables à La Botte gardiane… Duchesse, Cherry Uzès, À l’ombre du figuier… Valérie Rossi invente des parfums en Uzège… Antoine Restencourt distille du whisky aux Salles-du-Gardon et il a même fait vieillir un de ses fûts pendant six mois dans une grotte… Clara de la Forest, ancienne avocate, modèle des santons inspirés de personnes réelles.
Le jean tissé à Nîmes
Tchakatac, tchakatac, tchakatac. Le bruit très régulier du métier à tisser résonne dans une ancienne usine de chaussures de la colline de Montaury. La machine étire méthodiquement de longs fils indigo.
Un homme aux cheveux châtain clair la surveille du coin de l’œil. Il porte une blouse de travail verte et un jean soigneusement coupé. « J’ai toujours bien aimé le jean », reconnaît-il dans un sourire. Après avoir travaillé dans la communication, il revient à Nîmes en 2014 et se lance un défi : tisser à nouveau de la toile de jean à Nîmes. « Il a fallu partir d’une page blanche. Il y a eu beaucoup de défis et beaucoup d’échecs au début. » Des retraités de l’industrie textile le conseillent. Il récupère deux machines à tisser des années 50 en Italie puis arrive à mettre la main sur le dernier métier à tisser fabriqué en France : « Il était dans la Loire et devait partir en Turquie. Je me suis jeté dessus. » En 2020, il commence à tisser à Nîmes. Une machine neuve renforce l’atelier en 2022. La France ne produit pas de coton. Celui qui alimente les Ateliers est un coton bio, produit et filé en Turquie.
Consommation d’eau
« La fabrication du jean est beaucoup décriée pour son impact écologique et pour sa consommation en eau, reconnaît Guillaume. Les industriels utilisent en fait des fils enrobés de colle. Il faut ensuite les rincer avec de l’eau chaude et des solvants pour la faire disparaître. » Les Ateliers de Nîmes ont rajouté une étape supplémentaire au moment du filage pour ne pas avoir à utiliser de colle : plutôt que de les coller, ils moulinent ensemble deux fils pour obtenir un fil doublé. 36 litres d’eau sont ainsi économisés par pantalon.
Les rouleaux de toile tissés à Nîmes sont envoyés à Porto, au Portugal, où ils sont coupés, cousus, rivetés. Les Ateliers de Nîmes proposent quatre modèles hommes du 28 au 38 et quatre modèles femmes du 24 au 34. Leur prix oscille entre 150 et 200 €. Les fins de série sont vendues 65 €. À terme, les Ateliers de Nîmes aimeraient faire de la filature eux-mêmes. En attendant, pour les 10 ans de la marque, l'enseigne va proposer un modèle en édition limitée. Les précommandes seront lancées en février 2024. La composition de ce modèle chaud et doux ? 45% de coton, 45% de laine et 10% de soie. Un retour aux origines car au XVIe siècle, des industriels nîmois tissaient un sergé (*) à base de laine et de soie. Chassés par la révocation de l’édit de Nantes, les industriels protestants nîmois ont emporté ce savoir-faire outre-Manche. « Il aurait transité d’Angleterre aux États-Unis, détaille Guillaume Sagot. C’est là qu’il aurait été transformé par Jacob Davis et Levi Strauss. » Ils en ont fait un solide pantalon de travail rebaptisé plus tard blue jean. La toile de ce pantalon a gardé le nom de "denim".
Boutique au 2 rue Auguste-Pellet à Nîmes. Ouverte du lundi au samedi de 10 à 12h et de 14 à 19h du lundi au vendredi et non-stop le samedi.
Les sacs colorés de Savannah Piu
Marron glacé, bleu pétrole, gris clair, noir… Les sacs Lili étalent leurs couleurs avec gourmandise sur une table en bois. Les finitions de ces modèles, petit et grand format à bandoulière, sont soignées. On trouve aussi des pochettes à 49 €, des étuis à lunette à 18€. À l’arrière de l’espace de vente, Sandrine Schlup s’affaire derrière une machine à coudre professionnelle. Des rouleaux de tissus sont empilés sous une table de découpe. Pour Noël, à la demande de ses clientes, elle revisite le sac banane dans une version plus glamour : « Je vais le proposer avec plein de couleurs : des noirs différents, des versions tressées ou pas, du camel… »
Nageuse, maître-nageur, coach sportif… cette blonde discrète et souriante a connu un premier parcours professionnel dans le sport. Blessée, elle doit se reconvertir. Après la naissance de sa fille, Savannah, elle s’achète une machine pour coudre les rideaux de la maison. Elle apprend à l’utiliser avec des tutoriels sur Internet. « Petit à petit j’ai fait des pochettes pour les copines », raconte-t-elle. Vu le succès, elle propose à une boutique de vendre son premier modèle de sac. Elle leur livre une quinzaine de pièces dans une grosse valise. Deux semaines après, la boutique la rappelle, il n’y a plus rien. « J’ai recommencé. À cette période-là, je travaillais de 6h du matin à minuit, décrit-elle. J’ai eu jusqu’à 40 boutiques qui vendaient mes sacs. Il y en avait à Amiens, à Aurillac. Je faisais parfois 9h de route par jour. Pour moi c’était incroyable. »
En 2016, elle s’installe dans un atelier rue Franklin-Roosevelt à Nîmes. Les vitres sont volontairement opaques. C’est un atelier, pas une boutique. « Mais les gens avaient trouvé mon adresse et venaient me voir pour acheter les sacs », se souvient-elle. Création, découpe, montage… elle fait tout elle-même et ne parvient pas à fabriquer à la fois pour les revendeurs et pour l’atelier. Depuis deux ans, elle ne vend qu’à l’atelier où elle reçoit ses clientes avec un petit café.
35 avenue Franklin-Roosevelt, Nîmes. Ouvert lundi, mardi, jeudi et vendredi de 10h à 18h30 et le mercredi de 13h à 18h30 ainsi que les samedis de décembre de 10h à 18h30. 06 07 45 75 68.