Article réservé aux abonnés
Publié il y a 6 mois - Mise à jour le 30.04.2024 - Sabrina Ranvier - 9 min  - vu 71 fois

LE DOSSIER « Les femmes romaines n’étaient pas du tout les recluses que l’on imaginait »

Martine Muracciole-Aziza avait acheté cette galère romaine pour un forum du livre peplum organisé par son association Carpefeuch. La XVe édition de
ce forum était programmée, juste avant les journées romaines,
le dimanche 21 avril au musée
de la romanité de Nîmes.

- Sabrina Ranvier

Martine Muracciole-Aziza, agrégée de Lettres classiques, fait la chasse aux clichés en organisant avec l’association Carpefeuch un défilé-spectacle gratuit aux Jardins de la Fontaine samedi et dimanche à 12h.

Sa tenue est prête : une toge de cotonnade bleu ciel, assortie à ses yeux clairs. Martine Muracciole-Aziza ne la revêtira pas dans les arènes pour la reconstitution historique. Cette professeure de Lettres classiques va la porter aux Jardins de la Fontaine où elle jouera les maîtresses de cérémonie d’un défilé-pièce de théâtre. Derrière les tenues, en quelques saynettes, elle retracera la place de la femme sous l’empire romain.

Un petit panneau « Carpe diem » est vissé sur le portail d’entrée de sa maison nîmoise. À l’intérieur, dans le salon lumineux, des petites amphores côtoient des statuettes de l’antiquité, de beaux livres. Une fresque représentant des visages féminins est encadrée. « Ce sont des Crétoises, mais on les appelait les Parisiennes à cause de leur allure », sourit-elle.

Juste à côté, une galère couverte de boucliers rouges et argentés vogue dans une vitrine. Des légionnaires miniatures campent devant des tentes bleues. Un lion sort d’une porte monumentale juste à côté d’un gladiateur. La tentation est forte, mais aucun des cinq petits enfants de Martine Muracciole n’a le droit de toucher ses Playmobil®. Une colonne antique est posée derrière le canapé, face à la bibliothèque. « Je suis un peu mono maniaque, éclate de rire cette jeune retraitée. Cette colonne est en carton-pâte, elle était à une amie ». À force qu’elle lorgne dessus, elle la lui a donnée, en clin d’oeil. « Chaque fois que j’allais à Rome avec mes élèves, je les emmenais voir les décors en carton pâtes de la Cinecitta ». Ce sont dans ces studios qu’ont été tournés de très nombreux peplums.

Manifestation au rectorat en toge

Martine Muracciole-Aziza a été initiée au latin en sixième : « J’ai eu un professeur de latin qui était un puits de sciences. J’ai adoré. » Après une classe préparatoire au lycée Louis-le-Grand à Paris, elle décroche l’agrégation de Lettres classiques. Elle enseigne en banlieue parisienne avant de rejoindre Nîmes à la rentrée 1999. Elle est affectée au collège Feuchères, en plein centre-ville, tout près de l’amphithéâtre romain. En 2015, une réforme prévoit de réduire l’enseignement du latin et de fondre les cours de latin dans des enseignements pédagogiques communs. Cette mère de cinq enfants enfile sa tenue romaine et part manifester sous les fenêtres du rectorat. « C’est fini le temps où le latin était une option élitiste, assure-t-elle. Au moment de cette réforme, j’avais une petite élève d’origine maghrébine qui adorait le latin et qui s’était écrié "C’est pas vrai que les autres n’auront pas le droit de faire ce que l’on fait" ».

En 2009, elle crée l’association Carpefeuch qui organise notamment un forum du livre péplum chaque année. C’est cette association qui se charge du défilé des Jardins de la Fontaine. 18 bénévoles sont mobilisés. « Dans l’association, il y a tous les âges, tous les métiers. Le trésorier travaille dans l’informatique, il y a un prof de maths à la retraite… Beaucoup font de la cuisine romaine. Tous s’intéressent à l’Histoire », décrit-elle. Beaucoup participent aussi à « Germanicus et la colère barbare ». Ils assureront donc le défilé entre midi et 13h aux Jardins de la Fontaine et le spectacle aux arènes.

Ils sont rodés pour le défilé qui a déjà eu lieu en mars au lycée Daudet. Martine Muracciole-Aziza en fait défiler les images sur son ordinateur. On y voit par exemple une scène de naissance où un homme soulève fièrement un bébé emmailloté très serré. Un monsieur balaie à côté. « Il y avait des rites de purification. Ce rite de balayage était réalisé pour que les esprits soient purs ». Le spectacle raconte aussi les petits dessous de la période antique. Elle met en scène la "bona dea", cette fête réservée aux femmes sur laquelle on a peu de sources. « On mangeait, on dansait. Il y avait peut-être des sacrifices et certainement des choses un peu grivoises, mais ce sont des hypothèses, sourit-elle. Sous l’empire, les femmes ont eu une certaine influence et un certain pouvoir. Ce ne sont pas du tout les recluses que l’on imagine ». Dans son défilé-spectacle, un intrus va se glisser parmi les participantes de la "bona dea"… Un homme déguisé en femme, un clin d’œil à une histoire qui s’était déroulée à l’époque de César.

Sur l’écran de son ordinateur apparaissent des femmes vêtues de noir, le visage démoli de douleur. Ce sont les pleureuses qui, pour les deuils, sanglotent et crient bruyamment. « Elles se tirent les cheveux, se lacèrent le visage et se font saigner », décrit celle qui anime une fois par semaine Antiquissimo surradio Alliance plus. Ces pleureuses sont des professionnelles payées pour leur prestation. Peseuses de laine, vendeuses de laine, cuisinières, médecins soignant les femmes… Les femmes romaines ont exercé diverses professions. « On le sait par les épitaphes », indique celle qui a pris sa retraite à 65 ans en septembre dernier. Mais elle continue de transmettre sa passion de l’antiquité : elle donne des cours une fois par mois au Cadref, l’université du temps libre. Le 9 mars dernier, elle a animé un escape game pour « Les elles de la science », au muséum d’histoire naturelle. C’est elle qui en a écrit le scénario. Petite entorse, il ne parle pas de romanité mais porte sur la destinée tourmentée des femmes médecins grecques.

Martine Muracciole a adapté les recettes d'Apicius en 2019 dans Rome côté cuisines. 25,50€.  • Sabrina Ranvier

Recette des crevettes glacées au miel

Les Romains mélangeaient le sucré et le salé ou encore le sucré et le poivré. Ils pouvaient mettre dans un même plat de la viande, du poisson et des œufs. Mais surtout, ils étaient addict aux épices. Martine Muracciole-Aziza a adapté les recettes d’Apicius dans son livre "Rome côté cuisines". « Elles sont laconiques, parfois étranges, voire incohérentes, il s’agit de faire preuve de bon sens et de tester pour pouvoir tout quantifier », reconnaît-elle. Envie de prolonger l’ambiance des journées romaines ? Cette passionnée propose aux lecteurs d’Objectif Gard le magazine de concocter des crevettes glacées au miel.

Ingrédients : deux oignons rouges, 600 grammes de crevettes décortiquées, de l’huile d’olive, du miel, du nuoc-mam, menthe, cumin en poudre et en grains, vinaigre et vin doux.

Couper deux oignons rouges en petits morceaux et les faire rissoler dans l’huile avant de les mettre de côté.

Prendre 600g de crevettes cuites et décortiquées, bien égouttées, les faire revenir à la poêle dans de l’huile d’olive pendant huit bonnes minutes.

Les égoutter à nouveau avant de les remettre sur le feu dans quatre bonnes cuillerées de miel liquide dissoutes dans un demi verre de garum. L'incontournable garum, présent dans 90 % des recettes, est en fait du nuoc-mam.

On rajoute oignons et aromates (menthe, cumin en poudre et en grains) et un demi-verre de vinaigre, un de vin doux. On laisse bien le mélange se faire et imprégner les crevettes qui doivent rester craquantes.

Garder au frais assez longtemps. Martine Muracciole-Aziza préfère manger ce plat froid, voire glacé.

Programme détaillé : les Journées romaines de Nîmes 2024

Les Journées romaines qui sont un des plus grands événements de reconstitution historique d'Europe reviennent à Nîmes du 3 au 5 mai. Au programme : spectacles dans les arènes, camp et fort romain, marché antique, ateliers, défilés, conférences…

Voici le récapitulatif détaillé des spectacles et animations proposés par la ville de Nîmes et par la société Edeis, chargée par délégation de service public de la gestion des monuments romains depuis 2021.

Aux Arènes : grand spectacle et visites

• Le grand spectacle historique. Porté par Edeis, il a pour thème « Germanicus et la colère barbare ». Il prend naissance avec la plus grande tragédie qu’ait connu le monde romain : le massacre par les tribus germaniques, menées par Arminius, de trois légions romaines et des civils qui les accompagnaient, soit environ 25 000 morts. Cet épisode commence en 9 sous le règne d’Auguste et prend sa toute fin en 40, peu de temps avant la fin du règne de Caligula.

Vendredi 3 mai à 17h30 et le samedi 4

et le dimanche 5 mai à 15h30.

- Catégorie 3 assis placement libre :

Tarif plein 15 € / Tarif enfants de 4 à 12 ans 5 €

- Catégorie 2 assis numéroté :

Tarif plein 34 € / Tarif réduit 19 €

- Catégorie 1 assis numéroté :

Tarif plein 54 € / Tarif réduit 29 €

- Catégorie Premium assis numéroté :

Tarif plein 64 € / Tarif réduit 39 € *Tarif réduit : enfants de 4 à 12 ans et groupes à partir de 20 personnes. Gratuit pour les moins de 4 ans.

• Visites aux flambeaux des arènes.

Le 30 avril, le 2 mai et le 3 mai de 20h30 à 23h30.

Durée 45 minutes.

Aux Jardins de la Fontaine : animations et banquet de chef

• Les spectacles : – Panorama littéraire autour d’Arminius, une lecture par la compagnie Triptyk Théâtre (vendredi, samedi et dimanche à 11h). – Les âges de la vie à Rome, un défilé costumé avec l’association Carpefeuch (samedi et dimanche à 12h). – Barbares ?, un seul en scène avec la compagnie de la Lune d’Ambre (vendredi, samedi et dimanche à 14h30). – Le déclin de Rome, spectacle burlesque interactif et en déambulation par la compagnie Art Scène Lutin (vendredi, samedi et dimanche à 16h30).

• Visites guidées. De Nemoz à Nemausus (service valorisation du Patrimoine de la ville de Nîmes).

Vendredi, samedi et dimanche à 14h30.

• Animations jeune public. Avec fabrication de médaillons, atelier création des enseignes perdues, atelier couronnes végétales, puzzle des monuments antiques.

Vendredi, samedi et dimanche de 11h à 13h et de 14h à 18h.

• Le Banquet romain (chapeauté par Edeis). Le chef Maxime Chenet du restaurant gastronomique « Entre Vigne et garrigue » à Pujaut proposera un repas inspiré par les mariages romains.

90 € par personne (200 couverts maximum).

Samedi 4 mai dès 20h.

Au Bosquet des Jardins de la Fontaine : fort des légionnaires

• Le fort des légionnaire revient avec visites des tentes militaires, présentation de paquetage des légionnaires, démonstrations de manœuvres, des ateliers (cotte de mailles, sculpture, musique…). Porté par Edeis.

Du mercredi 1er au dimanche 5 mai de 11h à 19h.

Billets en vente sur place. 7 €, tarif réduit 4 €, gratuit pour les moins de 4 ans.

Esplanade : village gallo-romain

• La Ville met en place le traditionnel village gallo-romain sur l’Esplanade. Avec ateliers, démonstrations de fauconnerie, jeux en bois et banquet romain avec un menu unique d’inspiration gallo-romaine (midi et soir pour le vendredi et le samedi et midi seulement pour dimanche).

Vendredi 3 mai de 17h à 21h et samedi 4 et dimanche 5 mai de 10h à 18h.

• Le marché antique. Une quarantaine de commerçants proposeront à la vente les produits les plus répandus à l’époque romaine.

De 10h à 22h le vendredi, de 9h à 22h le samedi, de 9h à 18h le dimanche, sur le mail de l’Esplanade.

Place Gabriel-Péri et place du Chapitre : Gladiateurs, danse et théâtre

• Démonstration de combats de gladiateurs, place Gabriel-Péri.

Vendredi 3 mai : 11h à 13h et de 14h à 15h, samedi 4 mai : 10h à 18h, dimanche 5 mai : 11h à 17h30.

• Spectacles de danse antique, place Gabriel-Péri.

Vendredi 3, samedi 4 et dimanche 5 de 15h30 à 16h15 et de 17h30 à 18h45.

• Pièces de théâtre, place du Chapitre.

Vendredi 3, samedi 4 mai de 16h30 à 17h15.

Au Musée de la Romanité : taverne, ateliers, contes et musique…

Du 3 au 5 mai :

• Dans la peau d’un légionnaire à la caupona (taverne romaine) Dégustez dans une taverne romaine des mets cuisinés selon les recettes d'Apicius au niveau du thermopolium ( le fast food antique). Vous pourrez aussi goûter aux vins romains et découvrir l'oenologie antique, tout en vous initiant aux jeux de plateau que pratiquaient les clients de la caupona. Cette caupona s’inspire des fouilles de la Domus de Julia Felix de Pompéi. A la suite du tremblement de terre de l’an 62, Julia Felix convertit une partie de sa riche maison en taverne pour financer les travaux de reconstruction.

• Les cérémonies de la prêtresse germanique chérusque : à la découverte de la civilisation germanique du 1er siècle. Découvrez au travers du récit de la prêtresse Chérusque les coutumes et les croyances ainsi que le rôle de la femme.

• La femme romaine à l’époque d’Agrippine l’Ancienne. Femmes de l’élite ou femmes du peuple, libres citoyennes ou esclaves, apprenez-en plus sur leurs rôles, leurs droits.

• Atelier participatif « Coiffées comme les Romaines » : samedi 4 et dimanche 5 mai dans les Jardins du Musée. Faites-vous coiffer comme une Romaine du 1er siècle après Jésus-Christ, découvrez à quelle classe sociale vous appartenez, votre métier… Dans cet atelier, l’animateur donnera des explications sur les différentes techniques employées pour le travail du bois dans les domaines de l’architecture par les Gaulois.

• Déambulation contée et musicale « Germanicus ou le dernier éclat de Rome » par Pascal Minne – samedi 4 et dimanche 5 mai après-midi dans les jardins du Musée de la Romanité. A partir de textes d’auteurs antiques et de Shakespeare, laissez-vous conter la vie trépidante de Germanicus par son fidèle frère d’armes.

Office de tourisme : chasse aux trésors

• A l'office de tourisme, les familles peuvent se procurer la carte et le livret de la chasse aux trésors. Le but : trouver un lieu dans le périmètre du centre historique de Nîmes. Le point de départ est l'office du tourisme.

Durée pendant la manifestation : 1/2 journée.

Gratuit. Horaires : 10h – 18h.

Et aussi : défilé aux flambeaux, conférences , déambulations

• Conférences historiques gratuites les jeudi 2 et vendredi 3 mai à 19h. Université de Nîmes – site Vauban sur le thème des peuples barbares.

• Grand défilé aux flambeaux – Plus de 500 reconstitueurs chemineront de la Maison Carrée vers les Arènes, le samedi 4 mai à 20h30.

• Déambulations gratuites des figurants du spectacle en petits groupes dans les rues commerçantes du centre-ville de Nîmes : les samedi 4 et dimanche 5 mai de 11h à 12h.

Sabrina Ranvier

A la une

Voir Plus

En direct

Voir Plus

Studio