Publié il y a 1 an - Mise à jour le 27.09.2023 - Anthony Maurin - 4 min  - vu 353 fois

NÎMES L’amphithéâtre : une œuvre architecturale à l’épreuve du temps

Caroline Lefebvre de l'Inrap (Photo Anthony Maurin).

Caroline Lefebvre, archéologue du bâti à l’Inrap, proposait une conférence au Musée de la Romanité dans le cadre de la journée d'étude de l'Inrap.  

Caroline Lefebvre de l'Inrap (Photo Anthony Maurin).

"Aujourd’hui, 29 travées ont été restaurées. Le système d’information géographique a été fait pour la façade et les gradins, bloc par bloc y compris pour la partie sommitale de l’amphithéâtre. Il sert à mieux percevoir le monument dans sa globalité."

"Sa construction a dû durer 20 ans et elle a commencé par les piliers puis s’est poursuivie par la cavea (partie de l'intérieur d'un édifice de spectacle contenant les sièges des spectateurs qui forment plusieurs rangées concentriques de gradins en pierre, NDLR) et enfin s’est achevée par la couronne extérieure. Nous observons des ruptures de chantier vers la travée 45 puis entre les travées 60 et 2 marquant la fin du chantier et le raccordement des deux chantiers qui arrivaient de part et d’autre."

La salle cruciforme des arènes de Nîmes, sous la piste de l'amphithéâtre (Photo Anthony Maurin).

Un webdocumentaire retrace l’histoire des arènes de Nîmes, l’amphithéâtre le mieux conservé du monde romain,  des origines de sa construction aux actuelles campagnes de restauration. À destination de tous, notamment du jeune public, son approche ludique et interactive intègre les données les plus récemment acquises sur le monument.

"Il y a des éléments moulurés en façade qui montrent d’autres changements. Certaines inscriptions qui figurent sur des blocs nous font envisager un moyen de comptage puis de mise en place sur une même assise ou sur une même zone mais la signification de certaines de ces inscriptions nous échappent encore."

"On peut également voir le réemploi, pour ériger le monument, un peu partout mais on pense plutôt à des blocs, des repentirs de ce chantier qui ont été réemployés. On voit un bloc qui devait être destiné à des latrines, ou un autre à un mausolée ou une sorte de petit édicule."

Le chantier en cours à l'amphithéâtre (Photo Archives Anthony Maurin).

"Nous observons plusieurs manières de sceller les blocs dont des pièces mécaniques en plomb comme des goujons. Il y a aussi des crampons en doubles queues d’aronde qui sont d’ailleurs souvent en chêne car ce matériau est moins coûteux que le plomb. La dendrochronologie, l’étude des cernes des arbres, nous indique que ces matériaux datent soit du changement d’ère, soit du dernier quart du premier siècle de notre ère", ajoute Richard Pellé, archéologue de l'Inrap qui coonaît parfaitement les arènes. Ainsi, on note également la présence d’un premier édifice primitif de spectacle.

Rappelons que Nîmes trouve son origine six siècles avant notre ère, édifiée par la tribu gauloise des Volques Arécomiques. Ceux-ci s’allient aux Romains aux alentours de 120 avant notre ère. Elle devient rapidement une cité majeure de Narbonnaise et fait l’objet d’un programme architectural monumental sous Auguste, devenant Colonia Augusta Nemausus. L'amphithéâtre est construit à la toute fin du Ier siècle de notre ère, une trentaine d’années après le Colisée.

L'amphithéâtre de Nîmes attire le tourisme, y compris avec l'échange de maisons (Photo Archives Anthony Maurin).

"Sur les dix bas-reliefs que nous connaissons, six nous sont parvenus en étant visibles. Un combat de gladiateurs, un triple phallus ailé entouré d’oiseau, la louve avec Romulus et Rémus…"

"La travée 60, celle du protomé des taureaux, évolue avec les études. Au rez-de-chaussée avec les piliers on voit des plateformes qui devaient en leur temps accueillir des statues entres les travées 58 et 2. Au premier niveau de la travée 60, il devait y avoir un espace interdit ou à l’accès limité."

La fameuse travée 60... (Photo Anthony Maurin).

Le tympan du fronton était orné de décors métalliques qui nous sont inconnus. Des divinités, des héros des jeux, des édiles ? Au-dessus des arcs on avait peut-être la possibilité de suspendre des tentures.

"La cavea nous laisse une trace de la pratique comme on peut le voir sur la mosaïque des gladiateurs conservée à la Villa Borghèse à Rome. En effet on y voit un gladiateur mort, Astacius, et on peut envisager qu’il s’est également battu à Nîmes puisqu’on retrouve son nom sur un gradin. L’auteur de cette inscription devait être un simple spectateur assis au 29e rang !"

L'amphithéâtre intègre toutes les caractéristiques des édifices à structure creuse de l'époque flavienne, dont une façade à deux niveaux d'arcades superposées et un attique. Durant l’Antiquité, il accueille des venationes (chasses de bêtes sauvages) et des munera (combats de gladiateurs), et reçoit jusqu’à 23 000 spectateurs, voire un peu plus.

La piste de l'amphithéâtre (Photo Anthony Maurin).

Une occupation ininterrompue jusqu’à nos jours le sauve de la destruction : à partir du VIe siècle, le monument est transformé en forteresse. Au XIVe siècle, l’édifice perd sa fonction militaire, il est alors investi par des constructions privées. Au début du XIXe siècle, ces bâtiments sont détruits, l’amphithéâtre retrouve alors sa vocation d’édifice de spectacle.

"Plusieurs autres gravures sont observables sur les phases postérieures de l’attique ainsi que sur les gradins. Ces gravures signalent l’emplacement des sièges pour les spectateurs. On peut aussi noter la probable présence à certains endroits de panneaux de bois fixés par des attaches métalliques qui devaient apporter d’autres informations."

"Nous voyons clairement les traces en lien avec des usages d’installations médiévales ou modernes, notamment en façade ainsi que de nombreux graffiti, des marques de compagnons, de visiteurs de passage ou bien entendu d’habitants."

Anthony Maurin

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