NÎMES Le député de la France insoumise, Manuel Bompard : "À Nîmes en particulier, il y a une déception à l'égard de la politique"
"Le sentiment que la politique ne peut pas changer les choses."
Le député et coordinateur de la France insoumise, Manuel Bompard, organise une réunion publique demain samedi 16 novembre aux Costières. Avant son arrivée à Nîmes, il s'exprime sur Objectif Gard.
Objectif Gard : Vous êtes une nouvelle fois à Nîmes demain samedi pour une réunion publique avec les militants de la France insoumise. Comment expliquez-vous cet engouement pour Nîmes ?
Manuel Bompard : Au moment des élections législatives, je suis venu pour défendre et soutenir les candidats du Nouveau Front Populaire. Je considère que la bataille politique ne se mène pas qu'au moment des élections. Il faut continuer à défendre les idées qui sont les nôtres, expliquer la situation politique du pays, les solutions qu'on propose, les batailles que l'on mène, etc.
Quel regard portez-vous sur la capitale du Gard ?
Je crois qu’à Nîmes en particulier, il y a une déception à l'égard de la politique, le sentiment que la politique ne peut pas changer les choses. Tout cela a créé une mise à distance d'une partie importante de la population qui, dans certains scrutins, s'est éloignée des élections, ou parfois s'est tournée vers le Rassemblement National et vers l'extrême droite. Nous, le travail qu'on a commencé à travers les élections européennes, et puis au moment des élections législatives où on a eu un sursaut de la participation, est source d'espoir, notamment dans une ville comme Nîmes...
Les municipales dans quelques mois maintenant se dérouleront sans le candidat-maire historique, Jean-Paul Fournier, à la tête de la ville depuis plus de vingt ans…
Cela ouvre des perspectives de victoire, mais ce n'est pas le seul objet de ma venue, je viens pour évoquer les batailles nationales, et appuyer les Insoumis nîmois dans leur organisation en vue des échéances municipales.
Aujourd’hui, la tête de liste pressentie pour une union large de la gauche, c'est Vincent Bouget, le leader communiste. Je crois qu'il est prévu une rencontre entre vous deux demain ?
Ah, mais attendez, je ne sais pas s'il y a des têtes de liste pressenties. Chez les Insoumis en tout cas, rien n’est acté du tout.
Au niveau national, le vote du budget est au cœur des enjeux de cette fin d’année avec des coupes budgétaires très importantes pour les collectivités territoriales…
Il y a une inquiétude majeure partout en France, et particulièrement dans des départements paupérisés comme celui du Gard. Les mesures très injustes, comme les mesures qui toucheraient les retraités avec le report de la revalorisation des retraites, soit à travers par exemple des mesures d'augmentation des tarifs d'électricité, et puis dans des coupes dans les budgets des ministères. Prenons le cas du budget de l'Éducation nationale, où il y aurait 4 000 suppressions de postes d'enseignants. Pour nous, c’est un budget inacceptable. Un budget d'austérité qui créera des conséquences sociales désastreuses, un budget qui est irresponsable d'un point de vue écologique. Face à l'urgence climatique, il faut des investissements massifs. Enfin, c'est un budget qui va se traduire par une récession économique. Que l'on voit déjà là. L'UE disait que c'est 0,8 points en moins dans la croissance l'année prochaine si le budget était adopté.
Les entreprises, et les plus petites particulièrement, sont aussi très inquiètes…
Bien sûr, on a atteint cette année un record du nombre de faillites d'entreprises, avec plus de 60 000. Et puis on a sous les yeux des plans de destruction d'emplois massifs, les plus symboliques d'entre eux. Avec l'annonce de 1 200 suppressions d'emplois chez Michelin, de plus de 2 000 suppressions d'emplois chez Auchan. Mais ça, c'est la face émergée de l'iceberg. En vérité, derrière, il y a plein de petites entreprises et des suppressions d'emplois par dizaines de milliers aujourd'hui dans le pays.
Selon vous, ce budget d'austérité de M. Barnier se traduira aussi par une récession et un recul de l'activité économique ?
Vous savez, 60 milliards d'euros d'économies, ce que M. Barnier veut aller chercher, c'est très exactement ce à quoi l'État a renoncé en termes de recettes depuis qu'Emmanuel Macron est arrivé au pouvoir. Avec une politique de distribution de cadeaux aux plus riches, aux grandes entreprises, aux grandes multinationales. Aujourd'hui, on nous dit, il manque 60 milliards d'euros dans les caisses, et c'est vous, les Français, c'est l'activité économique de manière générale qui va en payer le prix. Un autre chemin est possible. C'est celui qu'on a proposé d'ailleurs dans la discussion budgétaire. On avait très largement modifié le budget. Plutôt que d'augmenter les tarifs d'électricité pour tout le monde, on a proposé une taxe de 2% sur le patrimoine des milliardaires, ça représente 15 milliards d'euros. C'est un quart du chemin qu'il faut faire. Et à chaque fois, on nous dit : ne touchez pas aux milliardaires, ne touchez pas aux plus riches. Donc, il y a un choix qui est un choix idéologique, dogmatique...
Le Premier ministre envisage une adoption de la loi des finances par le 49-3…
C'était plutôt prévisible, non ? Clairement, il est certain qu'il n'a pas de majorité à l'Assemblée nationale pour faire passer ce budget. Et que contrairement à ce qu'il a annoncé initialement, il n'est pas du tout dans une optique d'aller rechercher quelques compromis que ce soit. Puisque la preuve, c'est qu'on a fait voter, on a mené le débat budgétaire à l'Assemblée de manière loyale. Mais à la fin, ce n’était jamais bon pour eux. Donc, ils se sont coalisés avec le Rassemblement national pour s'y opposer. S'il y a un 49-3, que les choses soient claires, il y aura une motion de censure.
Et on fait comment s'il n'y a pas de budget de voté ?
Si le budget tombe avec le gouvernement, il y aura dans ce cas-là l'obligation de mettre un nouveau gouvernement. Et le nouveau gouvernement mettra en place un autre budget. Et s'il lui faut quelques semaines pour le faire, la loi prévoit ce cas de figure-là. Dans ce cas-là, c'est le budget de l'année précédente qui est reconduit pendant les premiers mois de l'année suivante. On aurait pu faire autrement avant. Le plus simple aurait été de nommer la candidate du nouveau Front populaire comme Première ministre.
Un mot pour finir sur les réquisitions contre Marine le Pen, dans le procès des assistants parlementaires à l’Europe. Comme le RN, vous pensez que c’est injuste si elle ne peut pas se présenter à la Présidentielle en 2027 ?
Moi, je suis respectueux du calendrier judiciaire. Ce qui me semble clair dans les réquisitions, c'est que les reproches qui sont formulés à Marine Le Pen et au Rassemblement national sont importants, que le procès, pour l'instant, semble faire apparaître des irrégularités. Après, moi, je ne suis pas un juge. Ce n'est pas moi qui décide à la fin. Par contre, s'il devait y avoir une mesure d'inéligibilité, elle devait pouvoir être prise qu'une fois que l'ensemble des recours prévus par la loi auraient été expirés. Parce que je vois bien dans quelle mesure une décision de cette nature pourrait jeter le trouble, sur une instrumentalisation politique de la justice. Je pense qu’il faut battre le Rassemblement national à la loyale lors des élections. Si vous êtes considéré comme innocent et que vous n'avez pas été définitivement jugé, il me semble difficile de considérer qu'une sanction commence à s'appliquer avant…