Publié il y a 1 an - Mise à jour le 21.07.2023 - Anthony Maurin - 8 min  - vu 353 fois

NÎMES Pour savoir comment Louis est devenu le célèbre Pasteur

(Photo Anthony Maurin).

L'exposition "De Louis à Pasteur, 1822-1895" est à découvrir à la galerie Jules Salles (prendre les billets au Muséum d'histoire naturelle juste à côté) jusqu'au 19 novembre.

La galerie Jules Salles (Photo Anthony Maurin).

Louis Pasteur naît le 27 décembre 1822, à Dole, dans le Jura. Cinq ans plus tard, son père installe sa tannerie à Arbois. Le jeune garçon y fréquente l'école primaire et secondaire. Élève sérieux et appliqué, mais pas particulièrement brillant, Louis se découvre très tôt une passion pour le dessin. Ces œuvres lui attirent quelque gloire... Mais son aspiration le conduit ailleurs.

Quand Louis Pasteur était enfant, de fausses croyances persistaient, dues à la méconnaissance. Quel genre ? « L'espèce humaine est supérieure à toutes les autres espèces » ou encore « La pourriture apparait d'elle-même sans raison », « Les espèces sont apparues telles qu'elles sont encore aujourd'hui » ou encore « Ce que l'on ne voit pas n'existe pas ! ».

(Photo Anthony Maurin).

Le jeune Pasteur se pose alors des questions auxquelles la science ne sait pas encore répondre. Heureusement, durant le XIXe siècle, de nombreux progrès scientifiques sont réalisés. Les fausses idées sont alors remises en cause, car la science permet d'expliquer les phénomènes.

En 1843, il est reçu à l'École normale supérieure où il effectuera plus tard l'essentiel de sa carrière. Reçu à l'agrégation en 1846, il attire l'attention de l'un de ses maîtres, le professeur Antoine Jérôme Balard, qui l'accueille comme préparateur. Le jeune homme soutient avec succès en 1847 ses thèses de physique et de chimie : premiers travaux consacrés à la cristallographie. En 1849, Louis Pasteur est nommé professeur suppléant à Strasbourg, où il poursuit ses travaux sur la dissymétrie moléculaire. Dès son arrivée, il rencontre Marie Laurent, la fille du recteur, avec laquelle il se marie cinq mois plus tard.

(Photo Anthony Maurin).

De leur union naîtront cinq enfants, dont trois mourront prématurément. Madame Pasteur sera la compagne attentive et discrète d'une vie consacrée à la science. C'est alors qu'il fait sa première découverte.

Une première pour la longue route

Nous sommes à présent en 1857 et Pasteur fait sa première découverte. Pasteur découvre que le tartrate, un composé qui se dépose au fond des cuves à vin, peut exister sous deux formes, donnant des cristaux dissymétriques, image l'un de l'autre dans un miroir. Il en déduit que les molécules de ces deux formes de tartrate, quoique composées des mêmes atomes, se distinguent par leurs positions dans l'espace.

C'était la première fois que l'on considérait les molécules comme des objets à trois dimensions. Or, dans la science contemporaine, on explique les phénomènes biologiques par des interactions entre les molécules, conditionnées par la forme tridimensionnelle de celles-ci.

(Photo Anthony Maurin).

Cette découverte de la dissymétrie moléculaire, en 1857, dont Pasteur constate qu'elle est caractéristique des molécules constituant les êtres vivants, va le rendre célèbre dans le monde des chimistes. Louis est en passe de devenir Pasteur.

Avant cela, en 1854, Pasteur est nommé doyen de la faculté des sciences de Lille. C'est là, alerté par un de ses étudiants dont le père rencontrait des problèmes dans la production d'alcool à partir du jus de betterave, qu'il commence ses travaux sur la fermentation. Travaux qu'il poursuivra à l'École normale supérieure à Paris. Pasteur met en évidence que la fermentation résulte du métabolisme de micro-organismes.

(Photo Anthony Maurin).

Dans la fermentation alcoolique, des levures se nourrissent du sucre de raisin ou de betteraves et se multiplient. L'alcool produit est l'un des déchets de ce métabolisme. Pasteur précise comment cultiver ces micro-organismes et apporte ainsi une contribution majeure à la naissance d'une nouvelle science : la microbiologie.

Études sur le vin puis la bière

En 1860, le gouvernement de Napoléon III signe avec celui de la reine Victoria un traité de libre-échange qui ouvre le marché anglais aux vins français.

Malheureusement, ceux-ci souffrent de multiples « maladies ». Napoléon III fait appel à Louis Pasteur et l'invite à « rechercher les causes des maladies des vins et les moyens de les prévenir ». Seule explication plausible pour Pasteur : les viciations du vin résultent de la présence de germes contaminants. II trouve alors une méthode pour en détruire la plus grande partie : pratiquer un chauffage de quelques minutes à une température située entre 55 et 60° C.

(Photo Anthony Maurin).

C'est ce que l'on appellera la « pasteurisation », qui pour le vin n'est plus que très rarement utilisée, mais l'est toujours pour conserver de nombreux autres boissons et aliments.

Quelques années plus tard, la défaite de la France lors de la guerre franco-prussienne de 1870 bouleversera Pasteur. Pour participer au relèvement de la nation, il décide d'apporter son soutien à l'industrie de la bière, spécialité allemande.

(Photo Anthony Maurin).

Comme le vin, la bière française souffre d'une inconstance dans sa qualité et se conserve mal, cela étant dû à la présence de germes contaminants. Depuis Clermont-Ferrand, où il s'est réfugié chez son élève Émile Duclaux, puis à Paris, Pasteur élabore des procédés qui vont permettre le contrôle des ferments durant la fermentation et la pasteurisation du produit fini. « Je désire que les bières fabriquées avec mon procédé portent en France le nom de Bière de la revanche nationale », dira Louis Pasteur. Tous les brasseurs d'aujourd'hui reconnaissent l'apport de Pasteur à l'industrie de la bière.

1880, le vaccin mais avant, le ver à soie

En 1865, son ancien professeur, le chimiste Jean-Baptiste Dumas, devenu sénateur du Gard, demande à Louis Pasteur de sauver la sériciculture. Alors que la France produisait 10 % de la soie mondiale, depuis quelques années les vers à soie étaient décimés par une maladie épidémique.

Bien qu'il n'ait aucune connaissance des vers à soie, Pasteur accepte le défi. Il constate que les vers sont en fait affectés par deux maladies (la pébrine et la flacherie). Il comprend que celles-ci doivent être dues à des micro-organismes et propose des mesures d'hygiène qui vont sauver la sériciculture tant en France qu'à l'étranger.

(Photo Anthony Maurin).

Ces découvertes sur les maladies des vers à soie vont guider ses recherches ultérieures sur les maladies contagieuses des animaux puis des hommes.

À la fin du XVIIIe siècle, le Britannique Edward Jenner avait montré que l'on pouvait immuniser contre la variole en inoculant une maladie bénigne des vaches ressemblant à la variole, la « vaccine ». Pasteur, qui comprend que les maladies contagieuses sont dues à des microbes, fait l'hypothèse que le microbe de la vaccine pourrait représenter une forme atténuée de celui de la variole. Dès lors, pourrait-on isoler des formes atténuées de microbes causant d'autres maladies et les utiliser pour protéger contre les formes virulentes ? Effectivement, en 1880, c'est ce qu'il parvient à faire pour le choléra des poules. En 1881, il en fait de même pour le charbon des ovins et des bovins.

Les drames familiaux

Pendant ces études sur les vers à soie, la famille de Pasteur est durement frappée. Déjà, en 1859, sa fille aînée, Jeanne, avait été terrassée par la fièvre typhoïde à neuf ans. En 1865, le père de Pasteur meurt. À peine quelques mois plus tard, la petite Camille, âgée de deux ans, est atteinte d'une tumeur du foie, et meurt à son tour. L'année suivante, une troisième fille, Cécile, âgée de treize ans, est à son tour victime d'une fièvre typhoïde. Puis, en 1868, le destin va encore sévir : Pasteur lui-même est frappé par un accident vasculaire cérébral qui manque de l'emporter et le laissera hémiplégique.

La postérité et les obsèques nationales de Pasteur

Le 27 décembre 1892, on célèbre avec faste à la Sorbonne le 70e anniversaire de Louis Pasteur. Le grand amphithéâtre est envahi par près de mille invités venus du monde entier. Lorsque Pasteur entre, au bras du président de la République, Sadi Carnot, il est accueilli par une longue ovation.

Le chirurgien britannique Joseph Lister, représentant de la communauté scientifique internationale, ouvre les discours d'hommage. Pasteur, submergé par l'émotion et affaibli physiquement, laisse son fils Jean-Baptiste lire sa réponse : « Vous m'apportez la joie la plus profonde que puisse éprouver un homme qui croit invinciblement que la science et la paix triompheront de l'ignorance et de la guerre... »

(Photo Anthony Maurin).

Le 1er novembre 1894, une crise d'urémie terrasse Pasteur. En dépit d'un léger mieux dans les semaines qui suivent, son état s'aggrave. Le 13 juin 1895, trop faible pour supporter le voyage traditionnel à Arbois, il part en voiture pour le domaine de Villeneuve l'Étang, à Marnes-la-Coquette, non loin de Paris.

Un domaine qui avait été mis à la disposition de Pasteur par le gouvernement pour ses expériences sur la rage. Malgré le repos sous les calmes ombrages des « hêtres pourpres » du parc, ses forces déclinent rapidement. Le 28 septembre 1895, dans une chambre monacale au mobilier réduit à un lit, une table, un large fauteuil, Louis Pasteur s'éteint.

Le 5 octobre, dans la pompe officielle, comparable à celle déployée pour Victor Hugo dix ans auparavant, le char mortuaire tiré par six chevaux caparaçonnés s'ébranle vers Notre-Dame. Une foule compacte, innombrable s'est rassemblée sur le parcours du convoi funèbre.

Conformément au souhait de sa famille, Pasteur sera inhumé à l'Institut Pasteur, sous un sobre tombeau de granit dominé par une coupole en mosaïques polychromes à fond d'or où s'inscrivent, en images allégoriques, tout un bestiaire et des entrelacs de feuillage. Chacune des découvertes pasteuriennes, gravée dans le marbre précieux qui lambrisse les murs, signe autant de victoires remportées sur l'ignorance.

L’héritage

Au-delà de ses découvertes, Louis Pasteur nous a laissé en héritage une certaine conception de la science, que l'on appelle parfois « l'esprit Pasteur ».

La rigueur dans une recherche alliant intuition et esprit critique. L'entretien d'un lien permanent entre la recherche la plus fondamentale et ses applications. Enfin, une vision planétaire se résumant par la formule de Pasteur lors de l'inauguration de l'Institut Pasteur « la science n'a pas de patrie ! » et qui s'est notamment traduite par la création et le développement de ce qui est aujourd'hui le Pasteur Network. Cet « esprit Pasteur », c'est évidemment au sein de l'institut qu'il a créé et dans le réseau international qu'il est resté le plus vivant.

(Photo Anthony Maurin).

Cet héritage de Louis Pasteur est aussi pour une part celui de ses « lieutenants », c'est-à-dire les scientifiques de son premier cercle qui ont fondé avec lui l'Institut Pasteur et dirigé son développement entre la fin du XIX° et le début du XX siècle : Émile Roux, Émile Duclaux, Charles Chamberland, Joseph Grancher, Elie Metchnikoff ; puis dans les années qui suivront une nouvelle génération de plus jeunes chercheurs, Albert Calmette, Alexandre Yersin, Étienne et Edmond Sergent, Charles Nicolle…

Depuis plus de 130 ans l'Institut Pasteur n'a cessé de poursuivre les missions assignées par Pasteur en 1887. Institution de recherche biomédicale de renommée internationale, il est un leader reconnu dans le domaine des maladies infectieuses, de la microbiologie et de l'immunologie.

(Photo Anthony Maurin).

Ses travaux portent non seulement sur les maladies infectieuses mais aussi sur certains cancers, sur les maladies neurologiques et neurodégénératives. Fondation reconnue d'utilité publique, l'Institut Pasteur est financé, à des niveaux comparables, par l'État, les revenus des applications de la recherche pasteurienne, et la générosité du public, sous forme de dons, de legs et de mécénat.

À la Galerie Jules Salles, 13 Boulevard Amiral Courbet. Du mardi au vendredi : 10h-18h, samedi et dimanche : 10h-18h30. Tarifs habituels du Muséum Les billets d'entrée donnent accès à l'exposition temporaire Galerie Jules Salles et aux salles permanentes du Muséum (galeries de Géologie, Préhistoire, Zoologie, Ethnologie).

Anthony Maurin

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