ALÈS Audience de rentrée d'une justice "saturée dans tous ses champs d'intervention"
Par la voix du nouveau procureur de la République alésien, ainsi que de la présidente du tribunal, l'intense activité de la juridiction alésienne a été mise en face de moyens qui augmentent, certes, mais restent insuffisants. Une situation illustrée par le nombre de magistrats "placés" et quelques vacances. Violences intra-familiales et trafic de stupéfiants se retrouvent en tête des affaires auxquelles sont confrontés les magistrats.
Un courrier amical qui met le doigt sur ce qui fait mal. En ouverture de l'audience solenelle de rentrée, la présidente du tribunal d'Alès, Céline Simitian, a listé les partants de l'année 2023. Dont l'ancien procureur de la République, François Schneider, parti au tribunal de Reims. Une juridiction dont les moyens sont "sans commune mesure avec les petites juridictions du Sud", a écrit le magistrat à ses anciens collègues. La phrase avait le mérite de planter un décor que son successeur, Abdelkrim Grini, a complété avant que Céline Simitian n'y mette sa touche finale.
Officiellement intronisé, le nouveau procureur de la République, Abdelkrim Grini, a emprunté les mots du Président de la République pour dénoncer un "ensauvagement de notre société", constat étayé par "la hausse significative des atteintes aux personnes". Avec une pensée pour le meurtre de la jeune Sihem à La Grand'Combe, il y a tout juste un an, et le double féminicide des Salles-du-Gardon, en mars dernier. Le procureur a relaté un recours accru aux téléphones grave danger, au cours de l'année 2023, ou encore la mise en place de bracelets anti-rapprochement, nécessités par "235 affaires de violences intra-familiales" sur la juridiction, qui prend tout le nord du département et va jusqu'au Vigan et la foprntière avec l'Aveyron.
"Le trafic de stupéfiants gangrène toute notre société et implique la mobilisation de tous"
Abdelkrim Grini, procureur de la République d'Alès
Le nombre d'affaires nouvelles a connu une très légère diminution en 2023, par rapport à 2022, avec 11 806 plaintes et procès-verbaux, soit une baisse de 2%. Le taux de réponse pénale a atteint les 88%, soit une baisse de cinq points par rapport à 2022. 1 5672 affaires ont été ou sont poursuivies. 131 ont doné lieu à comparutuon immédiate, soit une hausse de 2%, quand le nombre de jugements correctionnels a diminué de 31%, avec 511 affaires jugées.
2024 verra donc le magistrat du parquet insister sur "la lutte contre toutes les formes de violence, ainsi que tout ce qui touche au harcèlement scolaire, à la délinquance routière, au cambriolage, etc." Abdelkrim Grini a réservé une place à part au "trafic de stupéfiants, qui gangrène toute notre société et implique la mobilisation de tous". Il a promis "réactivité et fermeté" afin que les citoyens accèdent à une réponse pénale "a minima à 90%". Il a souhaité une année 2024 qui voie l'amélioration "du fonctionnement de notre justice" qu'il a définie "saturée dans tous ses champs d'intervention". Ils s'est tout de même réjoui d'une "hausse de moyens (qui) nous motive et nous oblige".
"La vacance de postes a des conséquences catastrophiques sur une juridiction de notre taille."
Céline Simitian, présidente du tribunal d'Alès
Chez la présidente du tribunal, Céline Simitian, ce qui dominait ce lundi était la "satisfaction de par ce qui a été accompli avec les moyens restants", insistant sur "la qualité des hommes et des femmes qui rendent la justice à Alès". Constatant que certains postes du tribunal ne sont pas occupés, elle a lâché, ferme : "La vacance de postes a des conséquences catastrophiques sur une juridiction de notre taille". Avant de rendre hommage aux présents "qui acceptent de retrousser leurs manches, parfois plus que de raison".
Car si les audiences sont en baisse au tribunal, "les temps d'audience augmentent". Ainsi, par exemple, les comparutions immédiates ont représenté 317 heures en 2023, contre 273 heures en 2022. "Le temps passé en audience pénale est du temps retiré à la justice du quotidien, proche des citoyens", a plaidé Céline Simitian. En 2024, la présidente du tribunal attend donc un effet du "développement de la procédure pénale numérique", concluant sur un message professionnel et sociétal, en faisant le constat que "la jusitce n'est jamais meilleure que quand elle est un objectif partagé".