L'INTERVIEW Alain Portes (USAM et HBCN) : « Je suis en paix maintenant »
L’ancien joueur et entraîneur de l’USAM vient de publier « Le handball de père en fils », un livre dans lequel il évoque les bons et les mauvais moments de sa carrière. De l’USAM au HBCN, de l’équipe de France féminine à la Tunisie en passant par Besançon et l’Algérie, le médaillé de bronze aux Jeux Olympiques de Barcelone nous replonge dans son parcours de sportif de haut niveau.
Objectif Gard : Comment est venue l’idée d’écrire ce livre ?
Alain Portes : Cela remonte à une dizaine d’années. Chaque fois que je viens à Nîmes, on me parle de l’USAM, de Pablo-Neruda, des matchs dans les arènes et avec le temps l’histoire se déforme un peu. Avant que cela ne devienne n’importe quoi, il fallait que l’un d’entre nous laisse une trace.
Comment avez-vous procédé pour rassembler tous ces souvenirs ?
J’ai une très bonne mémoire et puis la secrétaire de l’USAM Christine Escalier, dit « Cricoune », m’a donné un pressbook où sont consignés tous les articles de presse concernant l’USAM. Ça m’a beaucoup aidé.
« Je me suis dit que ça pouvait intéresser quelques personnes »
C’était un projet secret ?
Non, j’en parlé autour de moi, à certains anciens coéquipiers, ma famille et à Raymond Legrand (ancien journaliste nîmois spécialiste de l’USAM des années 80-90, NDLR). À chaque fois, les gens m’encourageaient à publier. Je me suis dit que ça pouvait intéresser quelques personnes.
À quel moment avez-vous décidé de franchir le pas ?
Je me posais des questions sur mon avenir professionnel. J’ai discuté avec une femme rencontrée par hasard et qui fait du conseil en entreprise, mais qui n’a rien à voir avec le sport. Elle m’a dit : « Il faut absolument le publier. » Ça m’a définitivement convaincu.
Vous parlez notamment de votre père dans ce livre...
Je ne peux pas occulter mon père dans mon parcours d’handballeur, car il a été important. C’était tout à fait normal.
« Il y a des gens qui sont méchants et je n’ai pas de cadeaux à leur faire »
Ce livre a-t-il été difficile à écrire ?
Non, ça a été très facile. J’assume mon chemin. Quand j’ai subi des choses négatives, je n’ai aucun scrupule à l’évoquer.
Réglez-vous vos comptes dans ce livre ?
Non, car je n’ai rien à me reprocher. J’ai une philosophie d’approche de mon sport qui fait que quand les gens dépassent les limites, j’aime bien le montrer. Mais quand on a un parcours comme le mien, les gens adhèrent ou détestent. Il y a des gens qui sont méchants et je n’ai pas de cadeaux à leur faire.
Avez-vous tourné la page de cette expérience difficile avec l’équipe de France féminine (*) ?
Je suis passé à autre chose. Depuis je suis allé à Besançon, au Qatar, en Algérie. Au niveau handbalistique, la page est tournée. Ce ne sont pas trois imbéciles avides de pouvoir et quatre joueuses qui craignaient pour leur place qui vont m’empêcher de le digérer. Ça m’a fait beaucoup de mal à un moment, j’ai beaucoup de hauteur sur ça. Mais je suis en paix maintenant. Je me suis débrouillé seul et grâce à ça j’ai vécu des moments exceptionnels avec le Qatar et l’Algérie. En revanche, on n’est pas obligé de pardonner dans la vie et ça je ne le pardonne pas.
« Le HBCN m’a permis de concrétiser tout ce que j’avais appris »
Vous saviez pourtant que dans le monde du sport professionnel on reçoit des mauvais coups.
Que les plus mauvais coups bas soient français, c’est ça qui m’a fait mal. Quand je suis allé à l’étranger, on me disait « tu vas voir, là-bas c’est difficile » ! Mais qui on est pour donner des leçons ?
Justement, le président de la fédération tunisienne a écrit un mot dans votre livre.
Cela me touche beaucoup plus que ces blaireaux de la fédération française de handball et les joueuses concernées.
Quel souvenir gardez-vous de votre passage au HBCN ?
Quand on a des gens qui adhèrent à ce que l’on propose c’est bien. Le HBCN m’a permis de concrétiser tout ce que j’avais appris. Je voulais faire progresser ces filles et elles étaient à 200 % dans le projet. Ça s’est soldé par une victoire historique en Coupe d’Europe. Parmi ces filles, il y en a qui m’ont beaucoup soutenu et je ne l’oublierai pas.
« Je suis content de laisser une trace »
L’épisode avec l’équipe de France a révélé vos vrais amis ?
Oui, et j’ai fait du tri. Certains m’ont soutenu sans condition et d’autres pas au point de mettre en péril leurs intérêts.
Cela vous a-t-il fait du bien d’écrire ce livre ?
Je suis content de laisser une trace. Ceux qui vont lire ce livre vont mieux comprendre qui je suis et comment je fonctionne. Il y a des gens qui se sont chargés de me salir et c’est bien qu’ils voient que je ne me défile pas.
Avez-vous des premiers retours de lecteurs ?
Oui. J’ai par exemple un supporter de Montpellier qui a aimé l’histoire et la façon dont je l’abordais. En même temps il est de Béziers, la ville où je suis né, ça rapproche. Une femme médecin m’a aussi dit qu'elle l’avait dévoré.
Aviez-vous une appréhension sur l’accueil que le livre allait recevoir ?
Je l’avais avant de me décider mais, une fois qu’il a été publié, j’ai vite vu que les gens étaient curieux.
(*) Lorsqu'il était à la tête de l'équipe de France féminine, Alain Portes a été victime d'attaques personnelles sur les réseaux sociaux, de fausses accusations, jusqu'à se faire voler son téléphone portable dans le vestiaire. Dans un contexte malsaint, il sera finalement démis de ses fonctions.