C'EST ARRIVÉ EN ÉTÉ Il y a 30 ans deux pilotes se tuaient en luttant contre un incendie
Les événements de la semaine dernière font resurgir de vieilles tragédies. La mort récente de Franck Chesneau, un pilote à bord de son Tracker alors qu'il combattait les flammes à Générac, plonge la mémoire dans un autre souvenir douloureux...
Un précédent accident de bombardier d'eau est survenu dans le Gard. C'était il y a 30 ans quand un pilote et son co-pilote s'écrasaient au nord d'Alès en luttant contre un incendie allumé par la main d'un homme. Deux morts restés dans les mémoires des Cévenols.
Il y a trente ans, le 4 septembre 1989, les enseignants avaient regagné leur classe en cette pré-rentrée, tandis que les enfants profitaient de leur dernière journée de vacances. Vers 13h, les pompiers du Gard sont alertés d'un virulent incendie dans une zone difficile d'accès avec une végétation de pins et châtaigniers très fournie. La forêt du Rouvergue près de la Grand-Combe au dessus d'Alès, sur la commune de Laval-Pradel s'embrase. 300 pompiers vont combattre les flammes pendant près de deux jours à proximité de la mine à ciel ouvert de Mercoirol, tandis que 6 bombardiers d'eau sont en action pour essayer de ralentir la propagation du feu dans ce secteur très boisé.
6 bombardiers d'eau et 300 pompiers
À 17h, au moment où l'incendie faibli - avant de reprendre plus tard poussé par le vent - et alors que la noria des avions poursuit la lutte, un Fokker s'avance du foyer à basse altitude. "Je m'étais arrêté au bord de la route au dessus de la Grand-Combe, pour montrer le travail des Canadair et des avions qui étaient engagés dans les airs. D'un coup j'ai vu apparaître le Fokker qui me semblait perdre de l'altitude. J'ai dit à mes deux enfants qui étaient à l'arrière de ma voiture de regarder cet avion et puis d'un coup il a disparu derrière la forêt et j'ai vu un immense nuage noir s'élever de terre, affirme Bernard, aujourd'hui retraité, comme s'il l'accident était survenu hier. Je ne me souviens pas du bruit, juste de ce nuage impressionnant. J'ai mis quelques secondes à comprendre que le bombardier d'eau s'était écrasé", poursuit le père de famille.
En effet l'avion qui combattait les flammes a accroché des arbres avant de fracasser une vieille bâtisse. Un second foyer s'allume dans cet accident. Un des hommes présent dans l'appareil sera retrouvé mort carbonisé. L'autre pilote, éjecté, connaîtra le même destin funèbre.
Un pyromane qui ne supportait pas la rupture avec sa copine
L'incendie ne sera fixé que le lendemain, mais rapidement l'enquête prend place sur 300 hectares de cendres. Et le fil de l'enquête mènera tous droit vers un jeune homme, blond, aperçu par des voisins en train de déguerpir aux premières fumées. Un garçon de 19 ans, bien connu des pompiers de la Grand Combe, puisqu'il est stagiaire depuis des années dans la caserne de l'ancienne cité minière.
Il finira au bout de quelques heures de garde à vue passées chez les gendarmes par avouer l'origine de cet incendie qui a dépassé de loin ce qu'il imaginait. Ce garçon pas tout à fait sorti de l'adolescence a allumé un feu sous la pinède car il ne supportait pas la rupture avec sa petite copine du moment.
Le pilote du Fokker et son adjoint n'ont pas eu droit à cette époque à un hommage national, mais la terre des Cévennes se souvient encore et pour longtemps du sacrifice des pompiers du ciel.
Boris De la Cruz