ESTÉZARGUES Des micro-algues pour purifier l’air de l’école
Lorsqu’elle est fermée, la bête n’a rien d’extraordinaire, tout juste fait elle penser à un petit frigo. Lorsqu’on l’ouvre, on comprend vite qu’elle n’a rien à voir avec un frigo : une lumière rose et bleue se dégage, laissant deviner un enchevêtrement de tuyaux.
C’est un prototype de photo-bio-réacteur conçu par Novatec, une entreprise bagnolaise et installé il y a quelques semaines à l’école d’Estézargues, près de Remoulins. Un dispositif tout à fait innovant, créé par le Bagnolais Sofian Adib, et qui fonctionne tout simplement avec la photo synthèse : des micro-algues sont dans les 200 mètres de tuyaux de la machine, et ces plantes, stimulées par la lumière spécifique, vont fixer le CO2 présent dans l’air pour rejeter de l’oxygène. L’air est ensuite désinfecté grâce à une lampe UV en sortie et filtré, pour le débarrasser aussi de ses pollens et autres allergènes.
Ça paraît simple, mais ça ne l’est pas du tout. « Je travaille depuis six ans sur ce projet », explique Sofian Adib, électricien de formation. Outre le travail, le secret de sa machine réside dans le type de micro-algue qu’il a sélectionné parmi les 40 000 existantes. « Je le tiens secret », glisse-t-il, car ses micro-algues présentent la particularité « d’avoir une grosse capacité de fixation du CO2, et de se multiplier par quatre en 20 heures », présente l’inventeur. Quant à l’entretien, il reste limité : « une fois par an un remplacement du filtre et de l’eau pour repartir sur un nouveau cycle », avance-t-il.
Et si son invention est en test à l’école d’Estézargues depuis le 18 janvier et jusqu’à la fin de l’année scolaire, ce n’est pas un hasard. D’abord, la Communauté de communes du Pont du Gard, qui fait partie du Contrat de transition écologique Aramon-Gard rhodanien, s’inscrit dans la philosophie du dispositif qui veut que les collectivités puissent accompagner l’innovation dans les technologies propres, notamment en permettant de l’éprouver. Ensuite, la maire Martine Laguérie, ancienne enseignante, a fait de la qualité de l’air de l’école « une de (ses) préoccupations » et a installé il y a trois ans deux capteurs dans les salles de classe, un pour le CO2 et un pour les particules et les poussières.
Un terreau favorable pour tester le prototype Airwash One, en somme. Les capteurs restent au vert depuis l’arrivée de la machine, capable de traiter 90 mètres cube par heure, et qui possède aussi trois capteurs internes qui produisent un rapport toutes les heures. Quant aux enfants, « ils sont très fiers d’être les premiers à bénéficier d’un tel dispositif », ajoute la maire d’Estézargues. La machine sert aussi de support pédagogique à leur enseignante.
Présent vendredi soir avec notamment le président de la Communauté de communes du Pont du Gard Pierre Prat, le député Anthony Cellier a salué le fait « qu’il se passe quelque chose sur ce territoire. » Le député, qui voit en Sofian Adib quelqu’un « qui essaie, qui ose, qui ouvre des portes », l’encourage à rentrer dans l’accélérateur de projets de la CleanTech Vallée, à Aramon, qui a incubé 20 entreprises en deux ans.
Car Sofian Adib a des projets ambitieux : son procédé peut être reproduit à une bien plus grande échelle et en extérieur pour capter le CO2 de la circulation routière, notamment dans les endroits très souvent embouteillés. Car outre le CO2, « les micro-algues sont capables de fixer certains métaux lourds, et il faut faire des études pour voir si elles fixent les particules de diesel », précise-t-il.
Thierry ALLARD