FAIT DU JOUR Au centre de rééducation du Gard rhodanien, on combat les symptômes du covid long
Depuis neuf ans, le centre de rééducation du Gard rhodanien accueille des patients qui ont besoin de retrouver leur autonomie. En décembre 2021, l'établissement bagnolais a été labellisé pour accueillir des patients d'un nouveau genre : ceux qui souffrent des effets du covid long.
C'est en mars 2013 qu'est né le centre de rééducation du Gard rhodanien, dans les anciens locaux de la polyclinique La Garaud à Bagnols-sur-Cèze. Il s'agit d'un établissement de soins de suite et de réadaptation (SSR) issu d'un partenariat public-privé entre le centre hospitalier et le groupe Clinipole.
Parmi les patients pris en charge, on trouve des personnes qui ont besoin de se remettre après une chirurgie, des personnes âgées qui ont été hospitalisées et pour qui le retour en Ehpad ou à domicile est prématuré, des personnes qui ont eu un accident de voiture, de ski... ou tout événement qui a pu avoir une incidence sur l'appareil ostéo-articulaire. Une grande partie des patients est envoyée par le centre hospitalier de Bagnols-sur-Cèze. "On répond à un besoin de la population avec de la proximité", atteste Emmanuel Obert, le directeur.
Soit ils suivent une hospitalisation de jour, qui a moins d'impact sur la vie professionnelle et familiale, soit une hospitalisation complète. Cinquante lits sont ouverts dans l'établissement où les patients restent en moyenne une trentaine de jours. Chaque année, entre 400 et 450 patients sont accueillis en hospitalisation complète. Ils profitent pendant leur prise en charge d'un plateau technique de 300m2 et de diverses activités liées à la rééducation (balnéothérapie, salle d'activités, jeux, marche en extérieur...). Les patients sont entourés d'une équipe d'une cinquantaine de personnes, formée notamment d'infirmiers, de médecins, de kinésithérapeutes, d'ergothérapeute, d'enseignants APA (activité physique adaptée), d'une assistante sociale, d'un psychologue...
Des symptômes multiples et très handicapants
Comme tous les établissements médicaux, le centre de rééducation du Gard rhodanien a dû faire face au covid-19. Encore aujourd'hui, les repas ne se prennent plus en collectif, pour éviter tout risque de contamination. Les tensions se font encore sentir quand il faut remplacer au pied levé des infirmiers ou aide-soignants testés positifs. Au fil des mois, l'équipe "a acquis une expérience de prise en charge des patients covid", assure Emmanuel Obert. Au sein même de ses effectifs, certains ont subi les effets du covid long. C'est ce qui l'a convaincu de candidater auprès de l'Agence régionale de santé (ARS) pour prendre en charge les patients souffrant de symptômes prolongés du covid-19. Le label a été accordé à la structure bagnolaise en décembre 2021 et déjà 4-5 patients sont passés par ce cursus en hospitalisation de jour.
Les premiers résultats sont déjà là. "J'ai un patient, ancien sportif VTT, qui faisait 130 watts sur le test à l'effort. C'est 50% de ce qu'il était censé faire vu son âge. Il a doublé sa capacité en six semaines, passant à 260", assure Aurélien Lasserre, enseignant APA. Les troubles ou diminutions respiratoires font parties des symptômes les plus courants du covid long. Il y a aussi la fatigue majeure, la toux, les douleurs thoraciques, les problèmes cardiaques ou digestifs, les troubles de la concentration et de mémoire, les céphalées, les troubles de l'odorat et du goût, les douleurs musculaires, les troubles du sommeil, l'anxiété...
Vous l'avez compris, les symptômes sont polymorphes mais très handicapants. Il y en a une vingtaine possibles. D'ailleurs, le programme prévoit seulement trois jours au centre de rééducation, car "ce sont des patients très fatigables et les faire venir tous les jours pourraient générer un sentiment d'échec", explique le directeur. Au-delà du physique, les symptômes persistants ont des effets bien plus graves sur la vie personnelle et le psychisme : "Certains n'arrivent pas à monter trois étages quel que soit leur âge. D'autres sont en incapacité de travailler ou ont perdu leur emploi pour "inaptitude"."
"Plus tôt on prescrit une rééducation, plus on diminue le risque d'échec"
À travers des protocoles personnalisés, les équipes ont pour objectif de "réadapter" ces patients à la vie quotidienne, de reprendre le travail. Ils restent au minimum six semaines au centre. "On essaye de différencier nos processus. Chaque patient a ses résultats et ne récupèrera pas de la même manière (...) Notre psychologue peut intervenir en cas de besoin, tout comme notre assistante sociale en cas de problèmes sociaux", précise Céline Bertrand, cadre de rééducation. La première journée est vraiment dédiée à l'évaluation de la "fatigabilité" grâce à des exercices sur vélo ou sur le tapis de course.
Avant cela, il faut que le lien entre les symptômes et le covid soit établi. C'est peut-être le plus compliqué avec les écarts d'une personne à l'autre. Ce sont le centre hospitalier ou les médecins qui orientent les patients qui ne parviennent pas à récupérer vers le centre de rééducation. "Le passage par un médecin de ville, avec un bilan médical, est primordial pour s'assurer que ce n'est pas lié à une maladie chronique", insiste le directeur. Celui-ci souhaite sensibiliser les généralistes du secteur à ces symptômes longs du covid, qui sont réversibles grâce à la rééducation.
D'autant que "plus tôt on prescrit une rééducation, plus on diminue le risque d'échec", assure le directeur. Reste que pour l'instant, l'équipe médicale n'a aucune explication à donner sur l'origine de ces symptômes : "Quand les patients font des examens neurologiques et pneumologiques, tout va bien. Et pourtant, ils sont fatigués, c'est indéniable. Alors on travaille sur les conséquences pour que ça s'améliore", livre Aurélien Lasserre. Les connaissances scientifiques sur le covid restent très limitées encore. Alors le directeur voit aussi ce parcours de rééducation comme "un protocole de recherche". Sûrement que les données collectées aujourd'hui serviront à mieux comprendre ce coronavirus demain.
Marie Meunier