FAIT DU JOUR Handicap à l’école : les ULIS ou la difficile marche du collège
C’est l’histoire d’un dispositif qui fonctionne, et qui aide chaque année de nombreux enfants porteurs de handicap, notamment de déficiences intellectuelles, à avoir accès à une scolarité sur mesure et à progresser.
Un dispositif mis en place dans un grand nombre d’écoles élémentaires, notamment dans celle du petit village de Connaux, à une douzaine de kilomètres de Bagnols.
« Certains arrivent éteints et repartent confiants »
Ce dispositif, ce sont les Unités locales pour l’inclusion scolaire (ULIS). Ici, c’est l’enseignant coordinateur Jean-Marc Ambrosino qui s’en occupe. « On a des enfants de la circonscription de Bagnols qui sont considérés comme relevant du handicap, majoritairement des enfants touchés par un trouble du développement des apprentissages. » En clair, il s’agit en majorité d’enfants souffrant de déficiences intellectuelles, de trisomie 21 ou encore de troubles autistiques. À Connaux, ils sont ainsi douze à avoir accès à une école comme les autres, dans une classe pas tout à fait comme les autres : « on leur propose un apprentissage adapté, on ne va pas exiger un apprentissage par classe d’âge, on vise un niveau CE2 dans le meilleur des cas, car certains ne sont pas lecteurs et ont des difficultés scolaires lourdes. »
Alors pour aider ces enfants à combler leur retard scolaire, les ULIS proposent « un menu à la carte, on va cibler les difficultés et autant que possible travailler avec les autres classes, avec un temps scolaire aménageable », précise l’enseignant coordinateur, qui travaille sur le dispositif avec une auxiliaire de vie scolaire. Ici, « on parle plus d’épanouissement que de réussite », avance l’enseignant, qui vise autant à transmettre des connaissances qu’à permettre aux enfants de sa classe ULIS à reprendre confiance en eux pour exploiter au mieux leurs capacités. « En ULIS tout se vit deux fois plus fort, et quand les enfants arrivent à débloquer la lecture par exemple, c’est une grande victoire. Certains arrivent éteints et repartent confiants. »
Un dispositif qui marche : « on a des résultats intéressants, les familles sont satisfaites, mais il faut mettre les moyens », tempère Jean-Marc Ambrosino. Car l’enseignant est inquiet. Inquiet car les progrès effectués en primaire grâce au dispositif ULIS sont menacés par un manque de place en ULIS collège. Inquiet au point qu’il a écrit une lettre au président de la République Emmanuel Macron sur le sujet.
Un manque de places en ULIS collège
« Le problème c’est le collège, chaque année un certain nombre d’enfants n’ont pas de place en ULIS », expose l’enseignant, qui avance le nombre de 140 enfants dans le Gard victimes de ce manque de places pour la rentrée à venir. Car « si certains partent en SEGPA ou en Institut médico éducatif, une grande majorité cherche à poursuivre en ULIS au collège. » Or, faute de place, « ils se retrouvent catapultés dans le circuit ordinaire, avec une auxiliaire de vie scolaire dans le meilleur des cas », affirme l’enseignant dans son courrier au Président. Une « solution » temporaire, « mais quand on nous dit que ça peut durer de un à trois ans, ça fait beaucoup pour un enfant », souligne Jean-Marc Ambrosino, sachant « que dans le cycle ordinaire, ils peuvent retomber dans la spirale de l’échec », hypothéquer les progrès effectués lors du cycle primaire et à plus long terme leur inclusion sociale.
Côté institutionnel, on reconnaît le problème : « pour le moment nous avons un quota de deux à trois ULIS écoles pour un ULIS collège, on ne constate que maintenant les effets de la loi de 2005 », explique l’inspectrice de l’Education nationale en charge de l’adaptation sociale et scolaire des élèves handicapés pour le Gard Michèle Koch. Face à ce constat, l’Education Nationale, seule décisionnaire dans l’ouverture de nouveaux ULIS, met en avant sa bonne foi : « il y a une vraie volonté de progresser dans l’installation d’ULIS collèges, on en a ouvert douze en quatre ans, c’est énorme. »
Une volonté accompagnée par le Département, qui gère les collèges. « À chaque fois que le DASEN (le directeur académique des services de l’Education nationale, ndlr) nous propose une ULIS collège, on accepte et on met les moyens, 5 à 6 000 euros à chaque fois », affirme la vice-présidente du Département déléguée à l’éducation Nathalie Nury.
À la rentrée 2017-2018, trois nouveaux ULIS collèges ouvriront dans le département, à Bellegarde, au collège Jean-Rostand de Nîmes et à Saint-Ambroix, dans un souci de « répartir les ouvertures en fonction de la demande », précise Michèle Koch, qui conclut que « le problème tend à se résoudre. » Reste à voir maintenant sous quels délais. Car comme l’écrit Jean-Marc Ambrosino dans sa lettre ouverte : « il faut à tout prix que ce massacre cesse. »
Thierry ALLARD