Publié il y a 7 ans - Mise à jour le 09.01.2017 - anthony-maurin - 3 min  - vu 283 fois

FAIT DU JOUR Les "Faucheurs de chaises" au pays des banques

Lors de ce faux procès, la banque est jugée coupable par le tribunal citoyen (Photo Anthony Maurin).

A Nîmes, le boulevard Victor Hugo est celui des banques. Sur la Place Questel ou à moins de 50m à la ronde, on trouve la BNP Paribas, le CIC, la Société Générale ou encore la Banque Populaire. Le collectif des "Faucheurs de chaises" se rassemblait samedi matin pour une action très visuelle.

Tout démarre l'année dernière lors de la campagne de réquisition de chaises pour lutter contre l'évasion fiscale et pour la transition énergétique lors de la COP21. Cette année, avec le concours d'Attac, de Nuit debout et de CCFD, les "Faucheurs de chaises" organisaient une action militante devant la BNP Paribas pour dénoncer l'évasion et l'impunité fiscales.

"Nous souhaitons faire écho au procès qui a lieu lundi (NDLR aujourd'hui) à Dax, c'est le symbole de l'évasion fiscale et la BNP y joue un rôle prépondérant. Nous estimons entre 60 et 80 milliards d'euros d'évasion fiscale chaque année en France" expliquent les membres du collectif citoyen. "Nous sommes ici pour une action symbolique de désobéissance civique non violente devant la BNP qui en 2014 avait plus de 200 filiales dans des paradis fiscaux. Nous voulons rencontrer le directeur de l'agence et dans le cadre de la galette des rois, nous voulons lui remettre la couronne du roi de l'évasion fiscale!" poursuivent, enjoués mais frigorifiés, les "Faucheurs de chaises".

Peu à peu le parvis de la BNP devient hermétique à la manière d'une scène de crime pour l'instauration d'une saynète théâtrale. On voit quelques pancartes grinçantes, les logo et slogan de la banque sont allègrement détournés avec des requins en lieu et place des étoiles et "Une banque d'un monde qui triche" était préféré à "d'un monde qui change" . On voit aussi une grande machine à laver, symbole de l'argent blanchi, un palmier rappelant les paradis fiscaux, une mère Noël distribuant des billets de 60 milliards d'euros, des galettes des rois et des banderoles mais surtout tout un tas de chiffres éloquents...

Devant la BNP Paribas, le collectif se met en action (Photo Anthony Maurin).

"Il ne faut pas qu'on juge les faucheurs de chaises ou les lanceurs d'alerte! Nous voulons simplement montrer ce qu'on pourrait faire avec tout cet argent! Avec 60 milliards d'euros, on pourrait réaliser de belles choses pour l'emploi, le social ou encore l'écologie et la transition énergétique. 60 milliards, c'est aussi le déficit du budget de l'Etat français chaque année ou encore l'équivalent de la collecte de l'impôt sur le revenu! Ce chiffre, revient à dire que chaque Français, même ceux qui ne paient pas d'impôt, paie en réalité et à cause de l'évasion fiscale 131 euros par mois pour combler ces pertes!" continuent les "Faucheurs de chaises".

Mais c'est bel et bien le procès de l'évasion fiscale qui se joue aujourd'hui dans le sud-ouest, à Dax. "C'est un grand moment pour nous et notre lutte. Il y aura des personnalités et beaucoup de monde pour soutenir notre collègue lanceur d'alerte John Palais". Anticipant le procès, une saynète était organisée sur le parvis de la banque nîmoise. Un faux juge perché sur une chaise prend la parole et évoque la tenue d'un tribunal populaire pour juger les banques. Il liste les chefs d'accusations mais n'en retiendra finalement qu'un seul examiné en cette fraîcheur matinale. Un faux allocataire du RSA prend à son tour la parole et explique son humble vie avant d'entendre celle, moins humble, d'un exportateur (toujours faux) de pâté de requin installé aux îles caïmans et qui explique la facilité avec laquelle il parvient à s'évader et à faire voyager son argent...

Le faux juge liste les chefs d'accusations (Photo Anthony Maurin).

Panneaux explicatifs et très visuels agrémentés de quelques chiffres relativement ahurissants... Sur le boulevard vidé de nombreux automobilistes et exsangue de piétons et d'animations, quelques coups de klaxons bien amicaux retentissent et viennent réchauffer le coeur des manifestants. "C'est une justice à deux vitesses... Si on arrivait à augmenter de 10000 personnes les effectifs du Ministère des Finances, on arriverait à récupérer une grosse partie de ces 60 à 80 milliards d'euros. Il en va de même avec les magistrats spécialisés, ils étaient 27 en 2007 mais en 2012, ils n'étaient plus que 8!". De là à dire que la crise financière et ses troubles économiques sont passés par là...

Certainement effrayée par tout ce joli ramdam, l'équipe de direction de la banque refusait même l'entrée à ses clients. Bloquées à la porte du sas, une femme et sa mère handicapée ne comprenaient pas et tentaient de s'expliquer, "Nous avons rendez-vous, ma mère ne peut pas rester debout..." Aucune réponse de l'intérieur, les clientes abandonnent leur rencard économique et reviendront un autre jour!

Anthony Maurin

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