FAIT DU JOUR Robert Siatka, un Gardois dans la légende du football européen
Robert Siatka a d’abord travaillé dans une mine au Martinet avant d’atteindre les sommets du football français et européen. Retour sur le fabuleux destin de ce Gardois, seul survivant français de la première finale de la Coupe des Champions, en 1956.
Nul n’est prophète en son pays. Robert Siatka en a fait la douloureuse expérience. Ne pas être reconnu à sa juste valeur dans sa région reste « la plus grande déception de ma carrière ». Malgré son palmarès, qui est un des plus beaux du football français, il regrette : « J’ai fait venir le grand Stade de Reims à la mairie du Martinet pour que les habitants en profitent. Vous vous rendez compte ! Pourtant, pas un stade (à son nom), pas une rue, ni même une médaille de la part de ma commune de naissance. »
À aujourd’hui 86 ans, il n’a rien oublié de sa riche carrière de footballeur. À commencer par ses débuts à l’Étoile Sportive du Martinet.
À 14 ans il travaille dans une mine à charbon dans les Cévennes
C’est le temps de l’insouciance pour l’adolescent qui découvre les pelouses râpées des petits clubs gardois, en ce début des années 1950. « Mes idoles étaient Roger Marche et Robert Jonquet. Dans France Football, je découpais les articles les concernant. Je ne savais pas encore que je jouerai avec eux quelques années plus tard ».
Mais Robert, dont les parents sont nés en Pologne, ne se plaint pas, car quand il ne joue pas au football, il travaille dans une mine à charbon. De 14 à 16 ans, il évolue dans des galeries de 80 centimètres de haut ,et il lui faut déjà être très costaud. C’est une expérience qui lui a beaucoup appris : « C’était très difficile, mais cela m’a endurci. On peut dire que ça m’a aidé dans ma carrière. J’avais un physique et une volonté de fer, et il n’y avait rien qui m’effrayait. »
Ses qualités au-dessus de la moyenne n’échappent pas à l’Olympique Alésien qui le recrute en 1951. Il a alors 17 ans. Il touche un salaire de 23 000 anciens francs, soit environ 514 de nos euros. Le club Cévenol vient de terminer dernier de la deuxième division, mais il est tout de même repêché grâce à Amiens et Le Mans qui abandonnent le professionnalisme. À Alès, il décroche ses premières sélections en équipe de France Juniors et dès qu’il le peut, il descend au stade Jean-Bouin pour voir les Crocodiles nîmois de Pierre Pibarot.
« Nous devions la gagner cette finale »
Le passage de Robert au stade municipal de la Prairie se limite à une saison. Car Jean Sadoul, le président de l’OA, a promis son jeune joueur à Henri Germain le président du Stade de Reims, malgré des offres plus lucratives de Toulouse. Lille, Marseille, Monaco et Nîmes qui sont aussi intéressés. Mais à cette époque, les footballeurs n’ont pas leur mot à dire.
Robert vient d’être recruté par le champion de France en titre. C’est le début d’une aventure entre Siatka et le club Champenois qui durera dix ans. Une décennie durant laquelle les titres s’accumulent.
« Rahis et Akesbi étaient des très bons joueurs »
Le 13 juin 1956, le milieu de terrain gardois entre dans l’histoire du football en faisant partie de l’équipe rémoise finaliste de la première coupe d’Europe de football des clubs champions. « Nous devions la gagner cette finale, parce que l’on menait 2-0, et Michel Hidalgo a raté deux buts immanquables. On aurait pu mener 4-0 à la mi-temps. » Ce manque d’efficacité ne pardonne pas face au Real Madrid de Di Stefano, et les Espagnols s’imposent finalement 4-3.
Trois ans plus tard, les deux clubs se retrouvent pour une nouvelle finale. Cette fois Robert est dans le groupe, mais il ne joue pas. Une fois encore le Real Madrid s’impose : « Celle là, on ne méritait pas de la gagner ». Mais à ces échecs continentaux, le Stade de Reims répond avec des succès nationaux.
Il bat Nîmes Olympique en finale de la coupe de France 1958
Robert est sacré champion de France quatre fois (il le sera une cinquième fois avec Nantes) et il remporte une coupe de France 1958. Cette dernière est décrochée au détriment du Nîmes Olympique. « Ce n’était pas trop glorieux car Nîmes a été privé de Schwager, sorti sur blessure en début de rencontre. Je me souviens que Rahis et Akesbi étaient des très bons joueurs. »
Ces années rémoises lui permettent de décrocher son unique sélection en équipe de France (le 5 juillet 1960, défaite 2-0 à Marseille). « J’ai été sélectionné plusieurs fois, mais à l’époque on ne pouvait pas faire entrer des remplaçants. » En 1963, il quitte Reims. Il joue ensuite au FC Nantes (1963-65) avant de tenter des expériences de joueur-entraîneur à Avignon et Bourges. Une fois sa carrière terminée, son ami Jean Wendling (ancien joueur de Reims), le fait entrer chez Adidas.
Robert Siatka s’installe ensuite dans le Var pour y couler une retraite bien méritée. Au bord de la Méditerranée, il continue à suivre le football à la télévision, mais surtout le PSG, Barcelone et le Real Madrid. Le tout en attendant enfin la reconnaissance de la terre Cévenole où il a vu le jour.
Norman Jardin
Réalisé avec l'aimable collaboration de l'Olympique d'Alès en Cévennes.