BAGNOLS/CÈZE Depuis la fermeture du passage sous la voie ferrée, les habitants de Carmignan se sentent "pénalisés"
Depuis juillet 2022, le passage sous la voie ferrée du pont SNCF est fermé à la circulation automobile. Et il ne rouvrira pas tout de suite, malgré le mécontentement des habitants du quartier de Carmignan.
Près de cinquante ans après sa fermeture, la ligne de train rive droite du Rhône a rouvert aux voyageurs le 29 août 2022. Il est désormais possible de relier Pont-Saint-Esprit et Bagnols-sur-Cèze à Avignon ou Nîmes en train. Jusqu'alors réservée au fret, la ligne a subi plusieurs aménagements notamment au niveau des voies et des gares. Afin de sécuriser le cheminement des voyageurs, chaque gare doit être équipée d'un passage souterrain ou d'une passerelle piétonne avec ascenseur pour aller de part et d'autre du quai.
Il n'y a pas encore de passerelle piétonne en gare de Bagnols-sur-Cèze. Mais il existe un passage sous la voie ferrée reliant la RD165 au centre-ville, en face de la jardinerie Coulange et juste à côté de la gare. Il a été décidé de fermer ce passage aux voitures et de le rendre piétonnier afin que les voyageurs puissent aller de chaque côté du quai en toute sécurité.
L'Agglomération du Gard rhodanien s'est chargée de le rendre conforme aux normes PMR (personnes à mobilité réduite), même si sans aide, la pente reste compliquée à franchir pour les personnes en fauteuil roulant. Mais sans cet aménagement alternatif, la gare de Bagnols n'aurait pas pu rouvrir aux voyageurs de manière anticipée. Il s'agit donc d'une solution temporaire en attendant la construction de la passerelle aérienne "d'ici 2-3 ans", rapporte le 1er adjoint bagnolais, Maxime Couston.
"Ça ne donne plus envie d'aller dans Bagnols"
Quand la passerelle sera construite, il appartiendra au maire de remettre en place ou pas la circulation voiture en place. Chose qui sera acceptée bien entendu. Problème, ce passage était très utilisé par les habitants des quartiers au nord et à l'est de Bagnols-sur-Cèze, à savoir Carmignan, Bazine et Maransan. Il leur permettait de rejoindre directement le centre-ville. Depuis la fermeture du passage aux voitures, ils sont obligés de faire un détour et leur temps de trajet s'est rallongé. "On est pénalisé. On a le droit à des bouchons terribles désormais. On n'arrive jamais à l'heure à nos rendez-vous, on se prend des PV de stationnement car on est pressé. Ça ne donne plus envie d'aller dans Bagnols", déplore une habitante, venue à la réunion de quartier de Carmignan, mercredi soir.
Se sentant pénalisés, les habitants regroupés au sein de "l'association de défense et de l'environnement des quartiers Nord et Est de Bagnols-sur-Cèze" (appelée plus simplement association de Carmignan) ont envoyé un courrier à la mairie pour faire part de leurs doléances : "mesure sans présentation ou discussion préalable", "sensation d'isolement-d'exclusion des habitants", "incitation à consommer dans les commerces extérieurs au détriment de ceux du centre-ville", "accroissement de la circulation routière surtout dans les horaires de pointe"...
La SCNF ne veut pas envoyer "de signal défavorable"
Dans cette lettre, les habitants ont avancé plusieurs propositions qui permettraient de concilier à la fois cheminement piétonnier des voyageurs et circulation automobile. Entre autres, l'installation d'un système de barrières intelligent qui se fermerait un quart d'heure avant l'arrivée du train et un quart d'heure après son départ. "Ça équivaut à trente minutes par train, et ça permettrait que l'accès voiture soit ouvert 18h sur 24h", avance Didier Walczak, président de l'association de Carmignan.
La municipalité a alors demandé si cette solution était techniquement envisageable. Dans un courrier-réponse datant du 17 avril, SNCF Réseau Occitanie et SNCF Gares & Connexions considèrent que revenir sur ce cheminement piéton quelques mois seulement après la réouverture de la ligne aux voyageurs "constituerait un signal défavorable vis-à-vis des services instructeurs de l'État". D'autant que d'autres gares doivent encore rouvrir par la suite comme Laudun-l'Ardoise, Roquemaure, Villeneuve-lez-Avignon, Aramon, Remoulins et Marguerittes.
"Pour cette raison, nous ne sommes pas favorables à ce que le gestionnaire de la voirie engage des modifications du souterrain à ce stade du projet", objectent par écrit Catherine Trevet et Agnès Moutet-Lamy, directrices des deux entités SNCF. Elles justifient leur réponse en considérant que ce passage souterrain n'a pas qu'un usage ferroviaire mais profite à tous les piétons.
La mairie fait pression pour accélérer les travaux
Elles concluent en disant : "Nous comprenons que l'interdiction des circulations routières dans le souterrain puisse constituer une modification des usages et des habitudes et générer une gêne pour les habitants. Notre priorité reste donc de créer une passerelle ferroviaire dans les plus brefs délais. Les études techniques sont en cours et nous analysons actuellement les conséquences de l'avis de l'autorité environnementale sur le planning." À savoir que la SCNF n'a passé qu'un seul marché public pour équiper toutes les gares de la ligne rive droite du Rhône.
Il faudra donc que les riverains s'arment de patience et changent leur itinéraire pendant quelques années. La mesure a dû mal à passer. "J'aimerais bien savoir combien il y a de gens à pied comparé au nombre de voitures qui ne peuvent désormais plus passer", rouspète un habitant, lors de la réunion de quartier. Maxime Couston qui, lui-même habitant de Carmignan, reconnaît que "cette solution est pénible pour tous mais que cela ne dépend pas de la mairie. (...) La municipalité fait pression sur la Région pour que les travaux soient accélérés."
Pourtant, les riverains craignent que les délais ne soient pas tenus. "Pendant deux ans, ce sera comme ça. Après, il y aura des travaux. On doit suivre des règles de sécurisation. On fait pression pour 2024", insiste l'adjoint à la Sécurité, Christian Baume. Mais il n'est pas possible de passer outre les temps de procédure imposés par le code du marché public européen.