FAIT DU JOUR Un an de répit pour les 126 platanes de la RN 113 d'Aigues-Vives
Pour sécuriser la RN 113 sur la traversée d'Aigues-Vives jugée très accidentogène, la préfecture du Gard avait autorisé par arrêté l'abattage de 126 platanes. Une importante mobilisation contre cette mesure s'est engagée et ce mardi le tribunal administratif de Nîmes a décidé de sursoir à l'exécution de l'arrêté jusqu'en septembre 2021. D'ici là, des concertations doivent être engagées.
C'est une première victoire pour les nombreux défenseurs des arbres. Ce mardi, la préfecture a accepté de suspendre pour un an l'abattage des 126 platanes qui bordent la RN 113 à Aigues-Vives. "Le début des travaux étaient prévus pour ce lundi mais nous n'avons été informés que trois jours plus tôt, s'insurge Jacky Rey, le maire d'Aigues-Vives. La procédure a été pour le moins étrange puisque que je n'ai jamais été prévenu. Il n'y a eu qu'une pseudo consultation, seulement par voie électronique et qui ne nous est pas parvenue."
Résultat, dès l'annonce de l'arrêté prévoyant l'abattage des arbres disséminés sur 1,2 kilomètre de part et d'autre de la route nationale qui traverse Aigues-Vives, tout le village a fait front. "C'est notre identité paysagère qui est en jeu, déclare Nathalie Peretti, élue d'opposition à l'origine du mouvement "Mon arbre, ma bataille". Nous sommes en train de réaliser un travail de fond pour comprendre les motivations de cet arrêté." Et Jacky Rey de surenchérir : "Ces platanes ont 150 ans d'existence. Ils font partie de la biodiversité. Seize espèces d'oiseaux et sept mammifères différents vivent ici. On ne peut pas défendre la sécurité routière aux dépens de l'environnement."
La sécurité routière, vrai faux argument ?
Car pour motiver sa décision, la préfecture (*) s'appuie principalement sur une étude d'accidentologie dénombrant sept accidents impliquant onze victimes parmi lesquelles quatre ont été tuées et six ont été blessées et hospitalisées sur la période 2011-2015. Insuffisant pour justifier l'abattage d'une centaine d'arbres selon les défenseurs de l'environnement, qui se se sont mobilisés aux côtés des élus de la commune lundi soir pour s'opposer à l'arrêté préfectoral.
"D'autres routes du département sont également connues comme étant dangereuses sans pour autant faire l'objet de telles mesures, souligne Alain Roubineau, militant au sein de l'association A.R.B.R.E.S, pour les amoureux de la nature. "Il y a tout un arsenal de mesures préventives, comme par exemple la mise en place de radars ou de glissières de sécurité ,qui peuvent permettre d'inverser cette tendance. D'ailleurs, dans le Gard, les route qui relient Uzès à Lussan ou encore Remoulins et Bagnols-sur-Cèze, sont elles aussi bordées d'arbres sur plusieurs hectomètres. Ce ne sont pas eux qui provoquent les accidents."
"Les provoquer sûrement pas, mais ils peuvent être un facteur aggravant, pointe Laurent Savall, directeur du comité départemental de prévention routière. Personnellement, j'adore la nature et les voies ombragées, mais pour les gestionnaires des routes, la question peut se poser. Il est incontestable qu'en cas de sortie de piste, une victime s'en sort mieux si elle n'heurte pas un platane."
Mais pour Jacques Barac, coordinateur à la Fédération française des motards en colère (FFMC), la sécurité routière est un faux argument. "Moi-même, je fais de la prévention des risques dans les collèges, explique-t-il. À mon sens, il faut regarder la cause des accidents et pas leur nombre. La sécurité routière a bon dos mais à mon avis cet arrêté a surtout des motivations économiques. Il coûte moins cher d'abattre 126 arbres que de les élaguer tous les ans. Pour améliorer la sécurité routière, d'autres mesures s'imposent comme la réfection de la voirie. Ce n'est sûrement pas en abattant des arbres qu'on arrangera les choses."
Une trêve avant les concertations
Des arguments qui semblent avoir trouvé un écho favorable auprès de la préfecture. "En attendant le délibéré du tribunal administratif, attendu ce mercredi, elle s'est engagée à suspendre l'exécution de l'arrêté jusqu'en septembre 2021, apprécie Jacky Rey. Je pense qu'il y a eu des problèmes de communication au sein de la préfecture. Nous allons mettre en place une table ronde pour trouver une solution satisfaisante d'ici là."
"On reste en veille pour le moment, prévient quant à lui Jacques Barac. À l'heure où nous parlons, la décision n'est que reportée. Le même problème peut se reposer dans quelques mois. Il faut rester vigilant." Nul doute que les Aigues-Vivois, mobilisés en masse pour la défense de leur identité paysagère, le seront.
Boris Boutet