FAIT DU SOIR À Bessèges, Benjamin Panis participe à un nouveau convoi vers l'Ukraine
L'association Partir Offrir est du nord-est mais, grâce au Bességeois Benjamin Panis, elle bénéficie aussi de dons cévenols. Mi-mai, Benjamin participera à un deuxième convoi en Ukraine afin d'acheminer du matériel aux populations civiles, le dixième de l'association depuis l'attaque russe. En témoin, il raconte ce qu'il a vu du pays, les besoins des populations et les craintes qu'il en tire pour la suite. Notamment celle de voir les militaires russes continuer à gagner du terrain.
Un dixième voyage en deux ans. L'association Partir Offrir, de Montbéliard, s'apprête à lancer un nouveau convoi de fourgons à destination de l'Ukraine, le 10 mai prochain. Un site de départ bien loin de Bessèges. Pourtant, Benjamin Panis, propriétaire bien connu de l'auto-école de la commune, sera de l'aventure, pour la deuxième fois.
"C'est à cause d'un ami que j'ai rencontré il y a vingt ans, à Gagnières, entame Benjamin Panis pour expliquer son implication dans cette aventure. Il se trouve qu'il fait des convois humanitaires depuis les années 80." L'un de ceux qui fait, quand d'autres se posent la question du comment. Récemment, c'est vers les zones sinistrées par le tremblement de terre que cet ami, Dany Hurter, a fourni de l'aide au Maroc. Autant, donc, s'inscrire dans ses pas.
Monté en Alsace pour les marchés de Noël, Benjamin Panis lui propose son aide. "Parce que je n'aime pas faire des dons sans savoir où ça va", précise Benjamin. Si les bénévoles du nord-est s'occupent de se procurer des denrées alimentaires, des vêtements neufs invendus, ou du matériel médical, Benjamin tente de lever des fonds pour payer le déplacement. Récemment, c'était en organisant un repas à Saint-Brès. Car, en février, ce sont quatorze fourgons de type Master qui ont traversé une grosse partie de l'Europe.
"Soit les fourgons appartiennent à l'association, soit ils nous ont été prêtés par des entreprises d'Alsace, Emmaüs, ou la Croix-Rouge." Partir Offrir s'occupe évidemment de l'entretien, en échange. Puis, sur place, les besoins sont identifiés grâce à un réseau fiable. "On s'appuie sur un Ukrainien, réfugié en Pologne, et un réseau d'églises protestantes. On livre le pasteur, on fait la distribution avec lui. Ou bien, on entrepose vite dans des locaux quand c'est un peu chaud..." Car, si les bombardements ne sont pas permanents, ils peuvent survenir à tout moment et les occasions d'assister à une alerte n'ont pas manqué, dans ces quelques jours de février, à l'ouest ou à l'est du pays, à proximité de Zaporijia.
"Ensuite, les pasteurs nous envoient une photo des gens qui ont bénéficié de l'aide, ou une vidéo de remerciement, raconte Benjamin Panis. Comme ça, on a un suivi. Puis, on retourne sur un point de dépôt qu'on avait utilisé lors de l'avant-dernier convoi, pour voir comment ça évolue. En mai, par exemple, on va retourner dans un orphelinat qui avait été desservi en décembre." En février, le convoi a accéléré l'opération, pour ne pas risquer d'être dans les frontières d'Ukraine quand le deuxième anniversaire du conflit arrivait, le 24 février.
"C'était très chaud sur place, témoigne Benjamin Panis. Ils viennent de pondre une loi pour garder des hommes plus longtemps dans l'armée, on évoque un risque de mobilisation des femmes..." Et ce, alors que Benjamin a eu l'impression de remonter le temps à mesure qu'il s'enfonçait dans l'est européen, jusqu'à identifier la famille traditionnelle ukrainienne, très proche de ce qu'a dû vivre la France, il y a des décennies, lors de ses propres guerres : "Un homme qui travaille et apporte l'argent à la maison. Mais qui est appelé à faire la guerre. Du coup, mère et enfant ont un lieu de vie mais n'ont plus d'argent pour faire des courses dans un magasin." Et les services publics défaillent : pour l'orphelinat, l'association a dépêché quatre palettes de lait, en décembre. Il reste alors "le contact avec les amis à l'église".
"Aider ces gens, c'est aussi éviter que la guerre arrive ici, que la folie de Poutine vienne chez nous"
Benjamin Panis
"Trois kilomètres après la frontière, en février, on a déjà vu une remorque avec un canon anti-aérien dessus, poursuit Benjamin Panis. Le pays vit, aussi, dans la mémoire des guerres précédentes. On voit un rond-point décoré par un tank, un paysage post-guerre ou de guerre en cours, des portraits de gens tombés dans un village, ensevelis au bord de la route avec des drapeaux ukrainiens... Le patriotisme est omniprésent." En s'approchant d'Ukraine, il a aussi vu les sourires grossir à la vue du convoi. Jusqu'en Pologne, où les habitants "nous ont dit : "c'est bien ce que vous faites, parce que les prochains, c'est nous". Je pense vraiment qu'il faut soutenir la population, mais aussi militairement."
"Aider ces gens, poursuit-il convaincu - alors qu'il se tenait plutôt à l'écart du débat en début de conflit - c'est aussi éviter que la guerre arrive ici, que la folie de Poutine vienne chez nous." En pleine campagne pour le scrutin européen, il ne comprend d'ailleurs pas que la guerre en Ukraine ne soit pas le thème majeur des élections. Du 14 au 22 mai, entre Belfort - le point de départ du convoi - et l'Ukraine, Benjamin aura l'occasion de ressasser cette réflexion. Avec le sentiment qu'une bonne part des politiciens d'Europe de l'Ouest sont à côté de la plaque.
Pour participer au financement du voyage, joindre Benjamin Panis sur panis.benjamin@orange.fr ou au 06 33 30 65 89.