FAIT DU SOIR À la découverte de l'agriculture gardoise, de ferme en ferme

Pour sa 13ᵉ édition de ferme en ferme, pas moins de 65 fermes du Gard ont répondu à l'appel du CIVAM bio Gard pour ouvrir leurs différentes exploitations au grand public, le temps d'un week-end.
Et si vous alliez découvrir et pousser les portes des exploitations agricoles à côté de chez vous, le temps d'un week-end ? C'est ce que propose le CIVAM (Centre d'initiatives pour valoriser l'agriculture et le milieu rural) du Gard en ce dernier week-end du mois d'avril. Au total, pas moins de 65 fermes gardoises jouent le jeu, avec une thématique commune : l'eau. Un bien commun qui remet en question la gestion des ressources hydriques par les agriculteurs, à l'heure d'une mondialisation qui exploite toujours plus les ressources vitales.
Des agriculteurs, viticulteurs, boulangers ou encore apiculteurs ouvrent leur ferme pour attirer un public de curieux. Dans le pays alésien, c'est le cas de Suzanne Desmarest, fille d'un boulanger picard, qui a repris l'exploitation de son père décédé, avec l'appui de sa sœur Hélène, qui s'occupe des pâtisseries.
Une belle découverte pour tous
"On a toujours aimé De ferme en ferme, c'est un moyen de rencontrer des gens et de leur montrer notre travail. C'est un moment où on prend le temps", explique la boulangère entre deux visites. Elle en profite donc pour montrer d'où part sa production, c'est-à-dire de ses champs, derrière la ferme, le long de la route des Cévennes, entre Saint-Christol-lès-Alès et Ribaute-les-Tavernes. "J'ai des clients qui me disent qu'ils me prennent du pain depuis toujours ici, mais qu'ils ne savaient pas que je faisais le blé et la farine. C'est important pour moi de leur montrer que le blé vient d'ici, que la mouture est faite avec un moulin à meule de pierre et que le fournil est exploité seulement quelques jours dans la semaine. C'est possible d'aller de A à Z."
Lors de cette visite du fournil, Suzanne Desmarest montre aussi ses champs en projet d'agroforesterie, mêlant plusieurs variétés de blé, récolté en juillet, mais exploité trois mois plus tard. Une exploitation de son champ qui ne lui prend au final que 80 heures par an, puisque le reste du temps, elle le passe entre le four et le moulin. Un moulin qui déroule le grain sans l'oxyder ni le chauffer, ce qui permet de l'utiliser instantanément. Puis, avec son levain naturel et sa farine, la boulangère ouvre les portes de son fameux four à 250°C, devant, ce matin-là, une famille de Saint-Privat-des-Vieux venue montrer aux enfants comment le pain local et artisanal pouvait être fabriqué.
La viticulture grâce aux animaux
Un peu plus loin, à Martignargues, c'est un autre visage de l'agriculture locale que Simon Le Berre fait découvrir aux visiteurs. Ce Breton d'origine, installé depuis 2019, cultive son vignoble en agriculture biologique sur une exploitation à taille humaine, où tout est fait manuellement, dans le respect de la nature et des saisons. Sur son îlot de 10 hectares réparti entre Martignargues et Ners, la polyculture est de mise : brebis, agneaux, poules, chevaux et même quelques abeilles — grâce à une amie apicultrice — cohabitent joyeusement. "Je suis très attaché à l'idée d'une ferme autonome et résiliente, explique-t-il. Ce modèle de polyculture et d'élevage permet de s'adapter aux aléas du marché et du climat."
Mais après un démarrage prometteur, Simon confie que le contexte actuel complique son développement : "Le marché du vin bio n'est pas au beau fixe, et au niveau local, les politiques municipales freinent plus qu'elles n'accompagnent. Aujourd'hui, même construire un simple hangar pour stocker mes produits est un vrai casse-tête." Pour autant, pas question de baisser les bras. L'événement "De ferme en ferme" est pour lui une bouffée d'air frais, une opportunité précieuse de sensibiliser le public. "Je crois que beaucoup aimeraient consommer local et bio, mais ils manquent d'informations. Montrer comment on produit, échanger, c'est aussi notre rôle de paysan aujourd'hui."
Sur son domaine, il organise des démonstrations d'attelage avec ses chevaux de traction, pour rappeler que d'autres pratiques agricoles, plus respectueuses, sont possibles. "Avec le cheval, ta journée s'organise différemment. Tu prends le temps, tu travailles autrement." Et ce dimanche, entre dégustations de vin, balades dans les vignes et découverte des animaux, petits et grands auront l'occasion de voir qu'un autre modèle agricole existe, ici, juste à côté de chez eux.
Marguerittes, terre de fleurs comestibles
À Marguerittes, route de Poulx, Catherine Gachet et son mari Fabrice cultivent depuis 2017 du safran et des fleurs comestibles sous le nom des Fleurs du Mazet. Une exploitation entièrement en bio : "Nous cultivons essentiellement avec du broyat collecté par les espaces verts, ce qui permet que la terre ne se tasse pas, d’isoler du froid et du chaud et de moins arroser", explique-t-elle. L’agricultrice y va aussi mollo sur le désherbage, pratiqué de toute façon sans produit phytosanitaire.
La spécialité des Fleurs du Mazet est le safran. En ce moment, la plante est en dormance. "Le safran est une plante décalée qui fleurit à l’automne", explique Catherine Gachet. Un décalage qui se transforme en atout : "Le safran est en dormance tout l’été et ne craint donc pas la chaleur", affirme l’agricultrice, qui s’apprête à débulber le safran "pour le multiplier et le replanter ailleurs", précise-t-elle, sur les quelque 3 000 mètres carrés de safranière que l’exploitation a en garrigue autour de Marguerittes.
Si l’"or rouge" est la principale culture du couple, les Fleurs du Mazet proposent aussi une large gamme de fleurs comestibles, comme différents types de sauges - dont la sauge ananas qui, comme son nom l’indique, a un goût d’ananas -, la tagète, l’arquebuse au goût de cola ou encore l’aubépine, consommée en tisane.
Les fleurs comestibles sont vendues à des pâtissiers, fromagers et restaurateurs, mais une partie est transformée sur place : moutardes, sirops, confits, vinaigres, bonbons, le safran et certaines fleurs comestibles se déclinent à travers une large gamme. Les amateurs peuvent aussi acheter directement du pistil de safran. Et depuis l’année dernière, les Fleurs du Mazet proposent aussi une gamme de bijoux avec des fleurs séchées. Les produits des Fleurs du Mazet se trouvent directement à la ferme, sur certains marchés et dans deux magasins, la Halte paysanne de Saint-Dionisy et Naturellement paysan à Maubec (Vaucluse).
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