Comme l'indique la plaque apposée sur l'une des deux entrées de la bâtisse, c'est vers 1750 que le négociant Laurent Boudon fait construire ce vaste hôtel de 800 m2 par l'architecte nîmois Antoine Fabre. Propriété de plusieurs familles, l'hôtel a notamment accueilli les premiers pas du célèbre écrivain et journaliste Bernard Lazare, connu comme le premier défenseur d'Alfred Dreyfus. Là aussi, une plaque vient rappeler ce pan de l'histoire locale. 

L'hôtel Boudon est ensuite racheté par la ville de Nîmes en 1980. "J'ai commencé ici quand j'étais chargé du Tourisme, mon bureau était là de 1989 à 1995", s'exclame Franck Proust, en arrivant sur les lieux. "La cour servait de lieu de réception pendant la Feria. Jean Bousquet était un homme de fête", se souvient le président de Nîmes métropole en s'adressant notamment à Jean-Paul Boi, entrepreneur nîmois, qui a acquis le rez-de-chaussée de l'immeuble pour en faire un lieu culturel depuis un an accueillant des expositions et des concerts. 

Une rénovation à 5 millions d'euros

Avant l'appel à projets lancé par la municipalité en 2018, ce lieu, labellisé Monument historique en 2004, tombait en désuétude. Ainsi, pour 1,2 million d'euros, le groupe François 1er, basé à Paris et spécialisé depuis 20 ans dans la restauration de bâtiments historiques, a racheté l'hôtel. Six ans après, avec quatre années de travaux, sous la houlette de l'architecte nîmoise Nathalie d'Artigues l'hôtel Boudon a été totalement rénové pour un montant de 5 millions d'euros. Une nouvelle vie inaugurée ce vendredi matin en présence également de Julien Plantier, premier adjoint à la ville de Nîmes. 

Quinze nouveaux logements allant d'une vingtaine de m2 à plus de 130 m2 (T1 à T3). Une restauration complète de ce patrimoine nécessitant de répondre à des critères bien précis. L'escalier monumental, caractéristique de ce bâtiment, a été évidemment conservé. Le promoteur a obtenu une dérogation pour ne pas mettre d'ascenseur et donc ne pas respecter dans ce cas la réglementation liée aux personnes handicapées. "Pour avoir la certification Monument historique, on est obligé de remettre le bâtiment dans son état original comme à l'époque", résume Antoine Lebougault, chargé des opérations chez François 1er. 

Hors de question de dénaturer un tel joyau architectural. Ainsi, les fenêtres ont été reproduites à l'identique sur-mesure et la façade ont été restaurés avec des pierres d'origine venues de Baillargues (Hérault). La modernisation de l'hôtel se trouve dans l'aménagement intérieur. Il faut s'adapter à ces hauts plafonds et ces immenses fenêtres. La pierre au sol a été conservée. "Tout était vendu en à peine un an et demi, c'est allé très vite. La ville de Nîmes est recherchée", lâche Laurent Demay, directeur commercial du groupe parisien. 

Des loyers de 600 à 1 200 euros

Dans le cadre d'un monument historique, les propriétaires ont l'obligation de louer leur bien pendant neuf ans pour bénéficier d'avantages fiscaux. Il s'agit de la loi Malraux. Ainsi, les 15 locataires poseront leur valise d'ici à la semaine prochaine. Les loyers varient de 600 jusqu'à 1 200 euros par mois. Ce bâtiment est loin d'être le premier hôtel particulier de la ville restauré et remis sur le marché du logement. 

Julien Plantier, qui a inauguré deux autres rénovations dernièrement, table sur d'autres projets de ce type à venir. "De nouvelles opportunités vont arriver avec une extension du secteur sauvegardé prévu d'ici à deux ans", assure l'élu. Pour que le renouveau soit complet, la municipalité finance des travaux de réfection de la rue de Bernis. Le sol va devenir entièrement pavé comme dans d'autres rues étroites de l'Écusson. Ainsi, 275 ans après, l'histoire de l'hôtel Boudon continue de s'écrire...