Publié il y a 5 h - Mise à jour le 11.02.2025 - Propos recueillis par François Desmeures - 4 min  - vu 326 fois

L'INTERVIEW Simon Lanes, président du tribunal d'Alès : "Casser une barrière entre la population et la justice"

Simon Lanes à l'issue du conseil de la Maison de justice et du droit d'Alès

- François Desmeures

Inaugurée le 1er février 2024, la Maison de justice et du droit d'Alès tenait son conseil annuel, ce lundi. Elle affiche un bilan important pour une première année, et surtout qualitatif, a tenu à préciser la présidente de la commission départementale d'accès au droit, Claire Gadat. Le président du tribunal d'Alès, Simon Lanes, fait le point sur cet outil d'information, mais aussi de règlement de litiges majoritairement civils, tout en permettant de soulager un peu le pénal. 

Simon Lanes à l'issue du conseil de la Maison de justice et du droit d'Alès • François Desmeures

Objectif Gard : Quel bilan pour cette première année de vie de la Maison de justice et du droit alésienne (relire ici) ?

Simon Lanes : Un bilan qui est, pour nous, extrêmement satisfaisant puisque en moins d'une année d'exercice, on compte plus de 8 700 personnes accueillies. Ce qui représente un volume considérable et qui démontre quy'il y avait véritablement un besoin de justice et d'accès au droit dans notre arrondissement judiciaire d'Alès. 

Pouvez-vous rappeler le champ de compétences de la Maison de justice et du droit (MJD) ?

La Maion a vocation à délivrer un conseil juridique aux personnes qui en font la demande. Cela concerne toute personne qui se retrouve face à un litige civil du quotidien - comme des affaires familiales ou un conflit de voisinage au sens large - qui peut être orienté pour recevoir un conseil juridique d'un conciliateur ou d'un médiateur, mais également d'un avocat, car ils tiennent un certain nombre de permanences. La Maison de justice et du droit a aussi vocation à recevoir des personnes dans un cadre un peu plus coercitif, donc pénal, qui font l'objet d'une alternative aux poursuites, de type composition pénale ou avertissement pénal. Ces rappels à l'ordre ou mesures alternatives aux poursuites sont exercés par des délégués du procureur. Le volet civil représente les trois quarts de l'activité ; le volet pénal, pour les personnes convoquées, représente un quart de l'activité. 

"Les personnes qui bénéficient d'une mesure alternative aux poursuites ne récidivent pas, en général"

Ce quart d'activité de volet pénal permet-il de désengorger le tribunal correctionnel ?

Oui, c'est l'objectif. Que ces dossiers-là n'atterrissent pas sur le bureau du juge au tribunal. C'est vraiment dans l'idée de graduer la réponse pénale en fonction de la gravité, du casier judiciaire des auteurs, pour que le tribunal correctionnel - qui a déjà fort à faire - n'ait à se concentrer que sur les faits les plus graves et les personnes les plus préoccupantes. 

Est-ce que la Maison est prise, par les auteurs des faits concernés par le volet pénal, avec la même distance ou crainte qu'une salle de tribunal ?

Ce n'est évidemment pas la même solennité mais ce dont on se rend compte - même s'il faudrait sans doute étudier cela de plus près pour Alès - c'est que les personnes qui bénéficient d'une mesure alternative aux poursuites ne récidivent pas, en général. Ce n'est pas forcément dû au cadre qui est mis ou aux délégués du procureur, mais simplement que ce sont souvent des faits peu graves et que les personnes sont peu connus des services judiciaires. Ils comprennent assez rapidement les avertissements qui leur sont adressés. 

"S'il y avait un territoire sur lequel prioriser l'installation d'une nouvelle MJD, ce serait nécessairement tout le bassin viganais"

La Maison de justice et du droit permet-elle aussi désacraliser l'institution judiciaire pour des gens qui n'entreraient pas naturellement dans un tribunal ?

Complètement. C'est l'esprit qui nous anime dans cette Maison, de casser une barrière entre la population et la justice. Que des gens arrivent à se figurer que le tribunal n'est pas là seulement quand c'est trop tard. Mais qu'il y a différents moyens de désamorcer des litiges et des conflits. 

Il existe des Maisons de justice à Vauvert ou Bagnols. Dans les Cévennes, pourrait-on envisager un projet de Maison de justice et de droit au Vigan ?

À ce stade, non. Mais effectivement, s'il y avait un territoire sur lequel prioriser l'installation d'une nouvelle MJD, ce serait nécessairement tout le bassin viganais, qui se trouve très enclavé et très loin des lieux de justice d'Alès. 

L'an dernier, lors de l'inauguration de la MJD, le maire Max Roustan disait qu'il ne manquerait plus qu'un tribunal pour enfants à Alès. Où en est le dossier ?

Ça avance... On a porté la demande de création d'un tribunal pour enfants auprès des chefs de groupe de la cour d'Appel de Nîmes, qui n'y sont pas hostiles. C'est une différence par rapport au positionnement des précédents chefs de groupe... Maintenant, à nous de travailler pour porter cette demande, de déterminer le besoin - savoir s'il faut un juge des enfants ou deux - pour déterminer où les installer, parce que le tribunal est petit. Aura-t-on besoin de faire des travaux, de réaliser une extension... ? Et puis, qui dit création de postes de juge des enfants dit aussi création de postes de greffiers correspondants... Je ne peux pas donner une échéance mais le dossier est susceptible d'avancer plus vite que les années précédentes parce qu'on a des chefs de cour qui sont favorables au projet. Mais il faudra aussi une réforme des textes, et ça prend du temps : il faudra créer la compétence "mineurs" dans le code de l'organisation judiciaire du tribunal d'Alès et de Nîmes. Ça avance, mais dire qu'il y aura une issue rapide et favorable, c'est impossible de le garantir. 

Propos recueillis par François Desmeures

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