Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 30.10.2020 - abdel-samari - 4 min  - vu 1107 fois

RECONFINEMENT Hervé-Georges Bascou : "Le télétravail s’impose aux chefs d’entreprise qui n’ont plus le choix"

Hervé-Georges Bascou, avocat très connu à Nîmes spécialisé dans le droit social Photo AS / Objectif Gard

Me Herve-Georges Bascou est avocat à la Cour d’appel de Nîmes depuis 1992, titulaire de la spécialisation en droit du travail, droit de la sécurité sociale et droit de la protection sociale. Il est par ailleurs cofondateur et cogérant de la Société d’Avocats Bascou-Cayez Associés. Me Hervé-Georges Bascou revient pour Objectif Gard sur les conséquences du télétravail imposé par le Gouvernement dans le cadre du reconfinement.

Objectif Gard : Le télétravail est désormais imposé par le Gouvernement depuis ce 29 octobre 2020. Quelles sont les directives précises ?

Hervé-Georges Bascou : À titre liminaire, il convient de rappeler la définition légale du télétravail donnée par l’article L. 1222-9 du code du travail : « Le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire (sauf en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure ; CT L ;1222-11) en utilisant les technologies de l’information et de la communication ». Ainsi les critères cumulatifs pour caractériser le télétravail sont les suivants : le télétravailleur est un salarié (personne physique liée à un employeur par la conclusion d’un contrat de travail et par une relation de subordination permanente). Le travail doit s’effectuer en dehors des locaux de l’entreprise (domicile du salarié – principal ou résidence secondaire, ou dans espace collectif situé en dehors de l’entreprise et mis à disposition par celle-ci). Le travail effectué en dehors de l’entreprise aurait pu s’effectuer à l’intérieur de l’entreprise. Et enfin, le télétravail doit utiliser les technologies de l’information et de la communication.

Le protocole sanitaire du 29 octobre 2020, est clair et sans ambiguïté concernant le télétravail ?

Le télétravail devient la norme, la règle « pour les activités qui le permettent ». Il s’impose aux chefs d’entreprise qui n’ont plus le choix. Le protocole expose deux cas de figure concernant les populations éligibles au télétravail : Le salarié peut effectuer toutes ses tâches à distance. C’est le cas du salarié notamment qui est parfaitement autonome. Il devra effectuer un télétravail sédentaire (tous les jours travaillés de la semaine). Le salarié ne peut effectuer toutes les tâches à distance. Il devra effectuer un télétravail alterné (quelques jours par semaine). Dans ce cas, il lui sera possible de se rendre sur le lieu de travail occasionnellement (par exemples : bureau d’étude, ingénieur, architecte qui ont besoin d’équipements spécifiques pour télétravailler ; l’organisation doit leur permettre de regrouper leurs activités pour limiter les déplacements).

Comment imposer ce travail à des salariés qui ne le souhaitent pas ?

La mise en place du télétravail pour les activités qui le permettent est une obligation pour l’employeur. Le salarié n’a donc pas le choix. S’il refuse cette organisation de travail, l’employeur peut le sanctionner, voire le licencier.

Des activités ne permettent pas le télétravail. Comment cela se passe pour ces entreprises ?

Pour les activités qui ne peuvent être réalisés en télétravail (ouvriers du bâtiment par exemple), l’employeur organise systématiquement un lissage des horaires de départ et d’arrivée du salarié afin de limiter l’affluence aux heures de pointe.

Comment contrôler le travail de ces salariés qui ne sont plus dans les entreprises ?

Le chef d’entreprise doit distinguer les salariés bénéficiant d’une convention de forfait jours (la convention de forfait jour, obligatoirement annuelle, a pour objet de rémunérer le salarié en fonction du nombre de jours travaillés sur l’année peu important le nombre d’heures de travail accompli). Ces salariés ne sont pas soumis à un contrôle de temps. Attention cependant, à l’instar des autres salariés, ils bénéficient aussi d’un temps de repos quotidien minimal de 11 heures consécutives et d’un repos hebdomadaire au moins égal à 35 heures). Des autres salariés soumis à une durée de travail hebdomadaire déterminée (ex : 24 heures, 35 heures, 39 heures ..). Pour ces salariés, la charge de travail à domicile doit correspondre au volume de travail effectué lorsque le salarié travaille au sein des locaux de l’entreprise. Normalement, cela ne devrait pas engendrer des dépassements en terme de temps de temps de travail effectif ; celui-ci étant contrôlé par les logiciels de gestion du temps de travail utilisés dans l’entreprise. Bien évidemment, si le salarié travaille plus le jour de télétravail, ce temps supplémentaire sera soit payé, soit récupéré.

Le télétravailleur doit donc organiser son temps de travail ? 

Oui en respectant les durées maximales de travail et les durées minimales de repos, soit 11 heures par jour et 35 heures par semaine. Pour pouvoir contrôler le temps de travail effectué ainsi que le respect des durées maximales de travail et des temps minima de repos, le télétravailleur indiquera ses heures de début et de fin de travail en utilisant le logiciel de gestion du temps de travail installé sur son ordinateur. En l'absence de logiciel, pour pouvoir contrôler le temps de travail effectué ainsi que le respect des durées maximales de travail et des temps minima de repos, le télétravailleur relèvera ses horaires de travail sur un document pour chaque jour travaillé à son domicile et transmettra ce relevé à son supérieur hiérarchique chaque fin de semaine.

Est-ce que l’entreprise doit dédommager le salarié en télétravail pour les frais d’électricité, d’Internet, etc. ?

S’il est vrai que depuis le 24 septembre 2017, la Loi ne prévoit plus d’obligation pour le chef d’entreprise de prendre en charge les frais résultant de l’activité du télétravail, la Cour de cassation l’impose. Tout frais engagé par le télétravailleur (électricité, assurance, abonnement internet …) devra être pris en charge par la société par la voie d’un remboursement mensuel sous forme d’allocation forfaitaire. Il convient que ce remboursement soit raisonnable et conforme à son objet car en cas de contrôle, l’inspecteur URSSAF peut considérer que ce remboursement constitue un avantage en espèce et redresse.

Propos recueillis par Abdel Samari

Abdel Samari

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