VAUVERT Accusation d'achat de voix : la "lanceuse d'alerte" s'exprime
La vidéo a fait le tour des réseaux sociaux et a beaucoup fait parler les Vauverdois. En enregistrant à son insu le maire sortant, Fouzia Rachidi, colistière de Bruno Lebeau - qui se présente comme lanceuse d'alerte -, espérait dénoncer des supposées pratiques clientélistes de Jean Denat. Pour Objectif Gard, elle revient sur ses motivations.
Tout commence selon elle le soir du premier tour. Crédité de 3% des voix, Bruno Lebeau est éliminé de la course à la mairie. Jean Denat devance quant à lui Jean-Louis Meizonnet de 85 voix. "Il est venu vers moi, s'est penché et m'a dit : "Fouzia, il va falloir que tu viennes m'aider", raconte Fouzia Rachidi. Il savait que c'est grâce à moi que Bruno Lebeau a pu compléter sa liste et que je pouvais lui être utile pour la campagne au second tour."
"Dans un premier temps, je lui ai dit oui car mes convictions politiques me poussent à combattre le Rassemblement national, poursuit-elle. Je l'ai recontacté par message le lendemain afin de voir comment on pouvait s'organiser. Puis, il y a eu le confinement et Jean Denat m'a finalement donné rendez-vous dans son bureau le 8 juin dernier."
Du soutien à la dénonciation
C'est alors que tout bascule dans l'esprit de Fouzia Rachidi. "À ce moment là, j'envisageais un soutien à titre personnel et je pensais l'aider à convaincre son électorat dans les quartiers populaires, explique-t-elle. Mais Jean Denat m'a donné un communiqué de presse de soutien qu'il avait rédigé pour moi et m'a demandé de le faire signer à tous les autres colistiers de Bruno Lebeau, excepté lui et sa compagne."
"J'ai été un peu surprise je ne m'attendais pas du tout à ça, raconte-t-elle. Il a vu que j'hésitais et m'a alors demandé quelle était ma situation professionnelle. Je lui ai répondu que j'étais en accident de travail depuis 2016. Il m'a alors proposé de faire jouer ses réseaux et de soutenir ma candidature pour un poste d'État lié à la "Politique de la ville". J'ai alors décidé de monter le dossier de preuves et de dénoncer ces pratiques."
"Pas dirigée par Meizonnet"
Fouzia Rachidi nie être dirigée par Jean-Louis Meizonnet, le candidat Rassemblement national à ces Municipales vauverdoises. "Personne ne savait ce que je faisais, hormis mon mari, affirme-t-elle. Ce n'est que la veille de la diffusion de la vidéo que j'ai appelé Bruno Lebeau, Joëlle Cachia-Moreno et Jean-Louis Meizonnet pour les prévenir." Des enregistrements qui affichent à l'heure actuelle plus de 40 000 vues sur les réseaux sociaux.
Reste à comprendre précisément les motivations de la "lanceuse d'alerte" qui semble vouloir dans un premier temps "combattre" le RN et s'associer à Jean Denat. Puis finalement dévoiler publiquement un enregistrement audio posté sur le réseau social Facebook sous le pseudonyme de Lina Casablanca, où l'on peut entendre la voix d'un homme présenté comme étant Jean Denat. Enregistrement réalisé à l'insu de l'interlocuteur de Fouzia Rachidi lors de conversations qui semblent privées. Et diffuser l'enregistrement sans avoir demandé apparemment l'autorisation et sans avoir indiqué tous les tenants et les aboutissants de ces échanges multiples par téléphone et messagerie.
Il est important de préciser par ailleurs que, contacté par notre rédaction, le Procureur de la République de Nîmes, Éric Maurel fait savoir "qu'il n'a pas, à ce stade, connaissance d'une plainte, de qui que ce soit."
À trois jours d'un second tour des Municipales qui s'annonce serré à Vauvert, on se demande bien à qui profite toute cette histoire ? Nos lecteurs en jugeront par eux-mêmes.
Boris Boutet
En marge de cette affaire :
- Jean Denat a déclaré sur les réseaux sociaux avoir fait placer sous scellées par un huissier les captures d'écran de ses échanges avec Fouzia Rachidi. Contacté ce jeudi, il n'a pas souhaité répondre à nos questions.
- Jean-Louis Meizonnet a déposé une plainte pour violation de l’article L106 du code électoral*.
- Bruno Lebeau a lui aussi déposé deux plaintes contre Jean Denat. L'une pour violation de l'article L106 du code électoral, l'autre pour diffamation. "Il a évoqué sur les réseaux sociaux mon “ralliement” à Jean-Louis Meizonnet dont il demande le “prix”, déclare-t-il. Il laisse donc entendre que ma voix a été achetée."
* Article L106 : "Quiconque, par des dons ou libéralités en argent ou en nature, par des promesses de libéralités, de faveurs, d'emplois publics ou privés ou d'autres avantages particuliers, faits en vue d'influencer le vote d'un ou de plusieurs électeurs aura obtenu ou tenté d'obtenir leur suffrage, soit directement, soit par l'entremise d'un tiers, quiconque, par les mêmes moyens, aura déterminé ou tenté de déterminer un ou plusieurs d'entre eux à s'abstenir, sera puni de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 15 000 euros."