CINÉMA "Boucan", ce court-métrage gardois qui braque la lumière sur les fêtes votives
Moins de deux ans après Rabinar, la Gardoise Salomé Da Souza, désormais exilée à Paris, s'apprête à livrer Boucan, un court-métrage qui fait la part belle à l'accent gardois et aux traditions du département. Alors que le tournage est prévu cet été, la jeune réalisatrice lance un "casting sauvage".
Nombreux sont les provinciaux qui ont rallié Paris dans l'espoir d'y faire décoller leur carrière professionnelle une fois la majorité atteinte. Salomé Da Souza en fait partie. Née à Nîmes il y a 26 ans, la jeune femme a grandi à Saint-Étienne-de-l'Olm, un petit village de 400 âmes, près de Vézénobres. À ses 18 ans, après l'obtention de son baccalauréat au lycée JBD d'Alès, la Gardoise monte à la capitale avec la ferme intention de devenir actrice.
À bonne école, elle apprend le métier en intégrant le prestigieux Cours Florent, tout en tentant d'apprivoiser la ville lumière, loin de sa famille. Casting après casting, Salomé se heurte à l'âpreté d'un métier qui n'ouvre pas si facilement ses portes. Six années se sont déjà écoulées lorsqu'elle intègre la Résidence de la Femis, une école publique de cinéma, pour passer de l'autre côté de la caméra et devenir réalisatrice.
C'est dans ce cadre scolaire que la parisienne d'adoption livre Rabinar, fin 2020, un premier court-métrage de 26 minutes signant la fin de sa résidence à l’école nationale supérieure des métiers de l’image et du son (Femis). Tournée dans le Gard, cette auto-fiction dans laquelle Salomé interprète le rôle d'Électra traduit un Sud débarrassé de ses clichés, mais tout de même porté par ses symboles que sont les traditions taurines, l'accent chantant et le côté sanguin de ses habitants.
Boucan, plus abouti que Rabinar
"C'était mon Sud idéal, composé de toutes les choses qui me manquaient depuis Paris", rejoue la réalisatrice, toujours tiraillée entre sa terre natale et sa trépidante vie parisienne plus propice au décollage de sa carrière. Parce qu'elle est intimement persuadée que la réalisation lui convient "beaucoup mieux", dans la mesure où "tous les défauts que j'ai lorsque je suis comédienne tels que le manque de lâcher prise et la volonté de tout contrôler sont des qualités importantes pour un réalisateur", Salomé Da Souza s'apprête à livrer Boucan, son second court-métrage.
Une œuvre dont elle accouche après plusieurs escales gardoises. "J'écris toujours à partir de lieux que je connais. Je ne peux pas écrire et les imaginer sans les avoir arpentés pour en ressentir l'ambiance", clame la jeune femme. Produit par Alta Rocca Films, Boucan se veut "plus ambitieux" que Rabinar en termes de mise en scène. "J'ai envie de rentrer davantage chez les gens. Je ne vais pas m'en tenir seulement aux paysages", promet Salomé Da Souza, qui abordera les traditions taurines gardoises par le prisme de l'adolescence.
"J'aimerais déconstruire certains préjugés au sujet des fêtes votives. À Paris, les gens n'y comprennent rien. Ils s'imaginent que ce n'est que pour les vieux et que le taureau meurt à la fin", déplore l'ex-pensionnaire du collège de La Gardonnenque. Et d'ajouter : "Lorsque tu ne vis plus là où tu es né, tes combats deviennent plus importants !" Après deux ans de crise sanitaire mettant à mal la majorité des manifestations taurines, le projet de la réalisatrice tombe à pic à l'heure où la pandémie reflue.
Une dizaine de rôles à pourvoir
Pour ne pas perdre le caractère authentique qui lui est cher, Salomé mise sur un tournage durant l'été, en s'immergeant au cœur d'une vraie fête votive. Il pourrait bien s'agir de celle de Saint-Maurice-de-Cazevieille, d'ordinaire organisée lors du dernier week-end du mois de juin. "C'était ma fête préférée quand j'étais ado. Les taureaux passent en bas du village et la fête a lieu en haut, près de l'église que je trouve trop belle. La spatialisation est hyper-intéressante pour un tournage", justifie celle qui est déjà entrée en contact avec le comité des fêtes.
"Je veux montrer que les fêtes votives constituent un moment important dans un village. Les gens l'attendent toute l'année. C'est intergénérationnel. On peut y retrouver ses grands-parents, ses parents, ses amis, et ses cousins", analyse fort justement la Gardoise, reconnaissant par ailleurs que Boucan racontera "aussi une histoire d'amour". Désormais, place au casting qui s'est ouvert il y a quelques jours. Au total, pas moins d'une dizaine de rôles sont à pourvoir, tous réservés à des amateurs.
Un potentiel tremplin
"Aucune expérience de jeu à la caméra ou au théâtre n'est requise", prévient la réalisatrice, qui recherche "des personnalités" et non des "acteurs" pour faire vivre à l'écran la terre qui est la sienne. Puisque les deux personnages principaux, Johanes et Gabin, sont des adolescents, Salomé Da Souza projette de faire la sortie des lycées à la recherche de la "bonne gueule" dès son retour dans le Gard prévu le 15 mars prochain.
"Je cherche de l'authenticité car j'en ai ras-le-bol de ces films qui se font dans le Sud avec des acteurs qui n'y ont jamais vécu. Donc n'hésitez pas à postuler ! Idir Azougli, qui jouait Enzo dans Rabinar, est lui aussi issu d'un casting sauvage", resitue la Nîmoise. Une belle référence quand on sait que le jeune homme a récemment décroché un rôle dans le tonitruant Bac Nord aux côtés de Gilles Lellouche, et apparaîtra dans le prochain long métrage de Tom McCarthy, Stillwater, pour donner la réplique à Matt Damon et Camille Cottin.
Corentin Migoule
"Casting sauvage". Pour postuler, envoyez une petite vidéo de présentation (une minute maximum, filmée avec votre téléphone) à boucan.lefilm@gmail.com. Plusieurs jours de tournage sont prévus durant l'été. Les prestations sont toutes rémunérées.