ARLES EN FERIA Talavante quatre oreilles et un large sourire
Corrida mixte de Los Espartales pour Diego Ventura (oreille et silence) et Jandilla pour Jose Maria Manzanares (applaudissements et silence) et Alejandro Talavante (deux oreilles et deux oreilles).
C’était nouveauté cette année, une corrida mixte était intégrée à la feria. Une corrida mixte prestigieuse avec trois figuras dont une à cheval, Diego Ventura, qui faisait aussi son grand retour dans les arènes d’Arles après son dernier paseo ici même en 2022 où il avait vécu un triomphe (quatre oreilles et une queue).
Honneur au cavalier. Premier en piste, Ventura est habitué des lieux et de leur public. Le Portugais a échauffé ses chevaux dans les tunnels romains des arènes et on notera que ça lui réussit plutôt bien. Dans les bons terrains et sans touchette, Ventura s’aventure dans une tauromachie posée et plaisante. Une oreille de bienvenue pour le cavalier qui lance la course devant un bon toro de Los Espartales.
Deuxième chance et nouvelle proposition pour un Portugais décidé. Hélas cette suggestion du jour le voit retomber dans des travers populistes et peu élégants. En plus d’une faena qui perd très vite en intensité et en qualité taurine, Ventura embarque le toro dans une danse répétitive et moins bien ajustée. Il ne trouve pas la clé, il enlève la bride mais le public, même s’il applaudit à la moindre preuve de dressage, n’en est pas plus joueur pour autant. Silence.
Figura qui est sortie en triomphe à de multiples reprises des arènes d’Arles, Jose Maria Manzanares continue sa tauromachie dynastique. Le natif d’Alicante écoutera quelques légers applaudissements à l’issue d’un duel avec un brave de chez Jandilla, peut-être le seul de la tarde. Manzanares fait le job mais tout à coup le toro passe en mode économie d’énergie…
Toujours aussi marqué par le sceau de l’élégance, le diestro touchera le toro le plus fade de la soirée venteuse et humide. Manzanares tente bien de réveiller son adversaire sur une série, belle et léchée, mais trop rapidement avortée. Le piéton n’en veut plus, il chiffonne et semble déjà ailleurs…
Enfin, le troisième du lot n’est autre qu’Alejandro Talavante dont on connaît la proximité avec l’empresa. On l’attend au tournant. Pour lui, deux oreilles au troisième de la course, un du fer frère de Jandilla, Vegahermosa. Talavante refait du Talavante nouvelle génération. Il entame sa faena les genoux à terre et prolonge la série. Ensuite ? On l’a déjà vu dominer, cette fois, il a joué. Et bien joué. A gauche surtout. Mais l’alchimie ne prend pas et l’affaire se termine en eau de boudin. Le toro meurt, le public sort quelques mouchoirs, la pétition n’a pas le temps de prendre que le palco tombe les deux mouchoirs blancs synonymes d’autant de trophées.
Dernière opposition de Talavante face à un Jandilla et rebelote, deux oreilles largement plus méritées. Là, on a revu le Talavante qu’on aime, celui qui s’occupe du toro, celui qui aime créer, celui qui torée avant tout. Son opposant n’est pas violent, il coopère et il n’en faut pas moins pour assurer le succès du piéton. Talavante se grandit, mange le terrain, dessine des courbes magiques et plonge les arènes, que quelques centaines de spectateurs avaient déserté pour cause de fine pluie venteuse, dans un rêve éveillé. Deux oreilles et rien à redire si ce n’est la vuelta offerte au Jandilla à titre posthume.