FAIT DU JOUR 4e, 5e et 6e circonscriptions : la Gauche unie relèvera-t-elle le défi ?
Soutenus par Jean-Luc Mélenchon et la Nupes, les candidats Arnaud Bord sur la 4e, Michel Sala sur la 5e et Nicolas Cadène sur la 6e ont créé la surprise en se qualifiant au second tour des Législatives. Reste à savoir s’ils pourront transformer l’essai au soir du second tour.
4e circo : le Rassemblement national à l’Est
Le découpage bizarre de cette 4e circonscription, qui s’étend d’Alès à Pont-Saint-Esprit, ne rend pas forcément service au candidat de la Nupes, Arnaud Bord, arrivé deuxième dimanche avec 26,58 % des voix derrière le candidat du Rassemblement national (RN) Pierre Meurin (30,56 %). Car si le RN est fort un peu partout sur la circonscription, il l’est encore plus au fur et à mesure qu’on se rapproche du Rhône, avec Pont-Saint-Esprit en point d’orgue. « Il y a un pôle RN sur la vallée du Rhône », analyse Arnaud Bord.
La deuxième ville de la circonscription place ainsi le candidat RN à 39,49 % des voix, soit tout simplement deux fois plus que celui de la Nupes (18,78 %), qui finit troisième derrière le candidat de la majorité présidentielle Philippe Ribot (21,19 %). Le soutien de la maire de Pont, Claire Lapeyronie, n’y aura rien changé. En revanche, Arnaud Bord peut compter sur la commune la plus importante de la circonscription, Alès, où il est en tête avec 26,9 % des voix, près de trois points devant Pierre Meurin, qui résiste toutefois plutôt bien dans la porte des Cévennes. Le candidat du RN fait le plein dans les petites communes, comme prévu : « Je me suis contenté de mobiliser l’électorat RN déjà existant sur cette circonscription en me rendant dans des communes rurales qui ont souffert des cinq années avec Macron », reconnaissait-il dimanche soir.
Désormais se pose la question du report de voix : où vont aller les suffrages portés sur Philippe Ribot au premier tour ? Le candidat éliminé n’a en tout cas pas donné de consigne de vote claire - même s'il indique qu'il ne donnera jamais sa voix à un candidat du RN (relire ici) - et ses plus de 9 600 électeurs seront les arbitres de ce second tour, surtout vu le niveau de l’abstention, avec seulement 48,35 % de participation. « On a un gros travail à faire au niveau des abstentionnistes », affirme le candidat de la Nupes, soulagé de ne « pas être décroché ». Et ce dans un contexte qui voit le RN gagner plus de 4 300 voix par rapport au premier tour de 2017, et la Gauche unie en perdre autant que tous les candidats cumulés de 2017. Rien n’est donc fait pour Arnaud Bord, et Pierre Meurin peut espérer l’emporter dimanche, à condition de trouver, lui aussi, quelques réserves de vote, ou de voir l’abstention grimper encore un peu plus.
5e : Michel Sala déjà à l'Assemblée ?
C’est la surprise de ce premier tour : le candidat Nupes Michel Sala arrive en tête du premier tour avec 33% des suffrages soit 16 451 voix. Le maire de Saint-Félix-de-Pallières éclipse la députée Renaissance, Catherine Daufès-Roux. Celle qui a repris le flambeau du député Olivier Gaillard découvre les résultats avec une certaine amertume : « Le choix des électeurs s’est porté sur un candidat extrême. Il vont voir ce que c’est d’avoir un député d’opposition. » Michel Sala n’est pas très étonnée de la défaite de la sortante : « À défendre le même programme, les voix pour la candidate LR Léa Boyer et Catherine Daufès-Roux se sont éparpillées. » La prouesse est d’autant plus importante que Michel Sala a fait mieux que le marcheur et ex-socialiste, Olivier Gaillard qui, en 2017, a récolté 32% soit 15 620 voix.
Pour certains, la surprise Sala n’est qu’une demie surprise : les électeurs de la 5e circonscription ont placé Jean-Luc Mélenchon en bonne position lors du premier tour, avec 25% contre 26% pour Marine Le Pen. Sans compter qu’il y a 5 ans, la Gauche unie aurait pu se qualifier au second tour. « Je représente le PS, les verts, le PCF et FI… Je pense que l’ensemble de ces forces méritent ce score sur cette circonscription ancrée à gauche depuis longtemps ! », réagit Michel Sala. L’autre satisfaction de l’insoumis est que le candidat du Rassemblement national, Jean-Marie Launay, est loin derrière avec 23% des suffrages. « Ce n’est pas encore gagné. Il va falloir mobiliser les électeurs dans les quartiers populaires et la jeunesse. Il y a encore un travail pour amplifier cette victoire du premier tour et on espérera aller à l’Assemblée nationale », conclut l'homme de Gauche.
6e circo : La Nupes face au miraculé Berta
Il est passé par un trou de souris : le député sortant MoDem - Ensemble de cette 6e circonscription Philippe Berta s’est qualifié pour le second tour avec 89 petites voix d’avance sur la candidate du RN, Laurence Gardet. « J’ai eu chaud, mais le plus important est d’en être », lâchait-il, soulagé, dimanche à l’issue d’une interminable soirée électorale comme seuls les scrutins serrés savent les proposer.
La qualification du député sortant, longtemps très incertaine, est une mauvaise nouvelle pour le candidat de la Nupes, l’écologiste Nicolas Cadène, qui termine toutefois en tête de ce premier tour avec 25,65 % des voix, un peu plus d’un point devant le député sortant (24,38 %). Satisfait de sa première place, notamment à Nîmes où il met 900 voix d’écart à Philippe Berta, il va devoir cravacher pour aller chercher des réserves de voix à première vue bien plus limitées que celles de son adversaire, auteur de bons scores dans l’Uzège. « Il nous faut désormais transformer l’essai », lance Nicolas Cadène, et ça passera par confirmer à Nîmes, limiter la casse dans des villes qui lui sont moins favorables, comme Uzès et Marguerittes, et tenter de convaincre les abstentionnistes.
Loin d’être une formalité : ce second tour s’annonce incertain, surtout en l’absence du Rassemblement national. Une absence devenue inhabituelle dans notre département et qui ouvre la voie à une question : que vont faire les électeurs du RN dimanche ? Le choix est loin d’être évident pour ces 9 000 électeurs, plus vraiment habitués à ne pas voir leur candidat se qualifier au second tour. Une des hypothèses pourrait être de voir encore grossir une abstention très forte : au premier tour, seuls 45,01 % des électeurs de cette 6e circonscription se sont déplacés.
En attendant, les deux candidats ont donné le ton de cette campagne du second tour. Nicolas Cadène accuse la majorité sortante de « casse sociale et d’inaction climatique », quand le député sortant assimile la Nupes à des « extrémistes » rangés derrière un Jean-Luc Mélenchon « qui a la volonté de devenir une espèce de dictateur ». En tout cas, « le choix est très net », souligne le candidat de la Nupes.
Thierry Allard et Coralie Mollaret